Discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre (27 janvier 2010) – Andreas Gross, Doris Stump

La corruption judiciaire (27 janvier 2010) – Dick Marty

Seuils électoraux et représentation des femmes en politique (27 janvier 2010) – Liliane Maury Pasquier

Le fonctionnement des institutions démocratiques en Albanie (28 janvier 2010) – Dick Marty, Andreas Gross

Quinze ans après le Programme d'action de la Conférence internationale sur la population et le développement (29 janvier 2010) – Francine John-Calame, Liliane Maury Pasquier

Biodiversité et changement climatique (29 janvier 2010) – Francine John-Calame

 

Discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre (27 janvier 2010) – Andreas Gross, Doris Stump

M. GROSS – Ce rapport se fonde sur trois motions. La première motion est le partenariat juridique de personnes de même sexe, la deuxième, la liberté de réunion de personnes, lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres (LGBT), la troisième, qui date de l'année dernière, a trait à la discrimination sur la base de l'identité de genre. Au cœur de ces trois résolutions réside la même préoccupation. Toutes les personnes sont différentes, mais toutes ces personnes doivent disposer des mêmes droits. C'est d'ailleurs le slogan du Conseil de l'Europe.

Je me suis rendu dans différents pays, notamment en Espagne qui connaît une législation très progressiste et qui fait œuvre de pionnier en matière de droits des personnes de même sexe. D'autres pays, en revanche, ont plus de difficultés. Dans le mien, c'est le caractère intemporel qui marque ces questions. Nous souhaitons que toutes les personnes aient les mêmes droits, surtout si elles sont différentes, mais nous ne parvenons pas aux mêmes résultats dans tous les pays.

Pourquoi le caractère intemporel existe-t-il et pourquoi est-il si dérangeant? Il est très important d'accorder les mêmes droits aux personnes qui sont différentes. Pour y parvenir tout un travail d'apprentissage collectif et social est à mener. Cela est possible dès lors qu'on peut manifester son désaccord. Pour avoir un débat, il faut respecter les libertés. Beaucoup de personnes ont été exclues de l'exercice de ces libertés. Il en résulte que le processus d'apprentissage est très déséquilibré. Le rapport qui vous est présenté a pour objectif de surmonter ce déséquilibre, de surmonter les différences qui existent toujours dans les différentes législations par suite de quarante ans de divisions en Europe.

Ce rapport, il convient de le faire observer, ne concerne ni le mariage ni la famille. Je ne remets pas en question le mariage ou la famille. Je ne veux absolument pas toucher à ces institutions. Mais ceux qui ne constituent pas une famille traditionnelle et qui souhaitent vivre différemment ne devraient pas faire l'objet de discriminations. Tout le monde doit pouvoir bénéficier des mêmes droits fondamentaux, même si l'identité de genre est différente.

L'identité de genre n'est pas la même chose que l'orientation sexuelle. L'orientation sexuelle est le produit de notre volonté. L'identité de genre, est quelque chose de profond, d'ancré en nous et que nous ne pouvons pas changer.

C'est la raison pour laquelle nous devons respecter ces différences identitaires. A cet égard, il n'est pas possible que ceux qui sont différents de nous n'aient pas les mêmes droits. Cela vaut également pour leurs enfants et pour les personnes qui vivent en partenariat.

J'en arrive au dernier point. Le rapport se fonde dans une très grande mesure sur les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, lesquels se sont pratiquement transformés en discours politiques. Il faut savoir que la cour est très progressiste. J'ai cité un certain nombre d'arrêts dans mon rapport. Ils montrent qu'il faut être très prudent dans les discours que nous tenons. C'est la raison pour laquelle j'ai cité trois arrêts relatifs à l'hétérosexualité, à l'homosexualité et à la transsexualité. Les personnes transgenres sont celles qui disposent du moins grand nombre de droits. Il y a vingt ans, l'OMS déclarait officiellement que l'homosexualité n'était pas une maladie, mais les personnes transgenres ne bénéficient pas des mêmes idées progressistes.

Il reste donc un travail à faire sur le plan législatif dans nos pays respectifs. Je vous invite donc, mes chers collègues, à examiner ce que vous pouvez améliorer dans vos législations nationales. J'espère que mes collègues prendront ce rapport très au sérieux. C'est peut-être une chance que nous ne puissions voter sur ce rapport qu'à la prochaine partie de session car cela nous laisse un délai pour réfléchir à tous ces sujets.

 

Frau STUMP – Schwule, Lesben, Bisexuelle sowie Transgender werden in allen Ländern nach wie vor diskriminiert, sei es offen oder weniger offen. Diskrimination ist überall noch vorhanden. Deshalb ist dieser Bericht bitter nötig. Gewisse Diskriminierungen müssen mit Gesetzesänderungen bekämpft werden, z.B. die Ungleichbehandlung von ausländischen Partnern und Partnerinnen oder die Frage der Adoption von Kindern durch homosexuelle Paare. Andere Vorurteile beruhen auf individuellen Haltungen und Fehlinformationen, die allein mit Gesetzen nicht bekämpft werden können.

In einem Punkt der Darstellung in diesem Bericht muss ich jedoch dem Berichterstatter und dem Gerichtshof für Menschenrechte widersprechen. In Punkt 2 der Empfehlungen heißt es: «Da die sexuelle Orientierung ein sehr intimer Aspekt des Privatlebens eines Menschen ist, erfordert eine unterschiedliche Behandlung aufgrund der sexuellen Orientierung eine besonders stichhaltige Begründung.»

Wenn ich mich in der Welt der Medien und Werbung umschaue, dann ist die heterosexuelle Orientierung kein intimer Aspekt des Privatlebens. Auf Schritt und Tritt begegne ich der Zelebrierung der Heterosexualität in allen Formen, von der sogenannten Sexualisierung der Werbung bis zur penetranten Darstellung der sogenannten normalen heterosexuellen Familie in Schulbüchern.

Homosexualität hingegen wird zur Privatsache gemacht, zu etwas, über das nicht, nur unter vorgehaltener Hand oder gar abschätzig gesprochen wird. Die in diesem Bericht auch ausgesprochene Forderung nach mehr Öffentlichkeit für alle sexuellen Orientierungen ist meines Erachtens deshalb zentral.

Je früher Kinder erfahren, dass es nicht nur eine einzige sexuelle Orientierung gibt und dass Lesben, Schwule, Bisexuelle ohne Vorbehalte als Menschen in unserer Gesellschaft akzeptiert werden, desto weniger werden sie später, als Jugendliche und Erwachsene, Menschen mit einer anderen sexuellen Orientierung als der heterosexuellen diskriminieren, desto weniger werden Menschen ein Doppelleben führen müssen, weil sie nicht zu ihrer sexuellen Orientierung stehen können, und desto weniger werden vor allem Jugendliche aus Verzweiflung über ihr Anderssein Selbstmord begehen.

Die Tatsache, dass unsere Gesellschaft Jugendliche in den Selbstmord treibt, weil sie Homosexualität verschweigt und Lesben, Schwule, Bisexuelle und Transgender ausgrenzt, ist ein Verbrechen, das endlich gestoppt werden muss. Deshalb unterstütze ich den Vorschlag des Berichts, dass in Fällen offensichtlicher Diskriminierung Sanktionen vorgesehen werden müssen.

Auch Worte können töten! Deshalb ist Redefreiheit nicht frei von Verantwortung. Auch die Rede muss kontrolliert werden können, wenn sie andere Leute verletzt oder in den Selbstmord treibt.

 

La corruption judiciaire (27 janvier 2010) – Dick Marty

Ce remarquable rapport touche au cœur de nos institutions démocratiques. Il touche au cœur les valeurs que nous essayons de défendre jour après jour dans cet hémicycle. Le sujet, me semble-t-il, aurait mérité une plus grande attention de la part de nos collègues aujourd'hui absents.

La corruption est un poison, un virus, qui s'insinue dans toutes les structures d'une société démocratique et libérale. A la fin, elle les détruit. La corruption judiciaire est la «mère» de toutes les corruptions. Comment voulez-vous combattre la corruption si la police et la justice sont elles-mêmes corrompues? Aucun Etat, même le plus évolué, n'en est à l'abri. Si dans certains Etats, la corruption revêt des formes grossières affichant argent et faveurs, dans d'autres, elle revêt des formes raffinées et sournoises. La lutte contre la corruption est un devoir de tous au quotidien. La corruption est pour nos institutions démocratiques une menace encore plus grave que le terrorisme, car plus sournoise, plus cachée dans les plis de notre société.

Quand on parle de justice et de lutte contre la corruption dans le cadre de la justice, on se doit de mettre l'accent sur l'indépendance de la justice, ce qu'a très bien fait le rapporteur. On doit aussi penser au ministère public et à la police. La lutte contre la corruption est difficile, faute du schéma habituel auteur-victime, qui est remplacé par celui de corrupteur-corrompu, les deux étant coupables. C'est pourquoi il est si difficile de combattre ce phénomène. Nous avons besoin d'autres instruments, des donneurs d'alerte, les whistle-blowers, par exemple.

J'ai été magistrat moi-même, j'ai collaboré avec des magistrats italiens qui se sont engagés contre la corruption et qui y ont laissé leur vie. J'aimerais rappeler le nom de certains: les juges Caponneto, Falcone, Borsellino, Chinnici, le général dalla Chiesa. Ils ont combattu la mafia et ont perdu leur vie. La mafia est un phénomène institutionnel de corruption. Ces personnes qui ont engagé leur vie dans cette lutte doivent être pour nous des exemples et je leur rends hommage.

 

Seuils électoraux et représentation des femmes en politique (27 janvier 2010) – Liliane Maury Pasquier

La question de la sous représentation des femmes en politique ne concerne pas que les femmes, mais l'ensemble de la société. Elle doit préoccuper toutes les personnes soucieuses du bon fonctionnement de la démocratie. C'est ce que souligne le rapport de la Commission sur l'égalité des chances, qui affirme notamment que l'inégalité de la représentation entre hommes et femmes est un danger pour la légitimité de la démocratie – rapport et conclusion que je soutiens entièrement.

Le système électoral, bien qu'apparemment neutre, comme l'écrit Mme Err, a une influence directe sur la société. Une meilleure parité dans les institutions politiques ne peut qu'avoir des effets bénéfiques sur l'égalité des sexes d'une part et sur les droits des femmes en général de l'autre. A son tour, une augmentation de la proportion de femmes en politique peut susciter des vocations et motiver les femmes pour franchir le pas.

Augmenter la représentation des femmes en politique ne peut toutefois se réaliser que par une action ciblée, le plus en amont possible, sur le mode de fonctionnement des partis, la désignation des candidats et l'élaboration des listes. Pour cela, il faut généraliser les quotas, sachant que, sous l'angle du droit, la Commission de Venise les considère comme adéquats et légitimes. Bien sûr, plutôt que d'imposer une exacte parité, difficilement envisageable au vu des déséquilibres actuels, il est possible de fixer un seuil minimum – par exemple 40% – en faveur du sexe sous-représenté.

Je me rallierai toutefois au rapport de la Commission des questions politiques sur les seuils électoraux de M. Daems, qui, tout en insistant sur l'importance de l'égalité hommes-femmes dans les processus décisionnels, préconise que les quotas soient des mesures transitoires. En effet, ils ne sont que le moyen d'atteindre un but et ne sauraient constituer une fin en soi. Un jour, que j'espère le plus proche possible, les mentalités auront suffisamment changé pour que les femmes et les hommes bénéficient des mêmes chances d'être élus. D'ici là, et pour favoriser la disparition des a priori et des stéréotypes, il faudra bien prendre des mesures suffisamment efficaces.

Ainsi, lorsque la question se pose, il convient d'encourager les réformes des scrutins et des circonscriptions en faveur d'une meilleure représentation des femmes. On peut également envisager un financement public en faveur des candidatures féminines, ainsi que des mesures de sanction.

Il n'est qu'à considérer la sous-représentation flagrante des femmes au sein de cette assemblée – qui résulte du comportement de l'électorat de nos différents pays – mais aussi au sein de nos différents organes – et il dépend directement de nous qu'aussi peu de femmes occupent des présidences et vice-présidences! – pour comprendre qu'il reste beaucoup à faire et que la simple mention non contraignante de la recherche de l'égalité dans les règlements ne suffit pas.

 

Le fonctionnement des institutions démocratiques en Albanie (28 janvier 2010) – Dick Marty, Andreas Gross

M. MARTY – Je me suis rendu récemment en Albanie, dix ans après ma première visite. J'ai pu constater des progrès évidents, voire spectaculaires pour ce qui concerne la qualité de la vie des hommes et des femmes qui vivent dans ce pays. Aujourd'hui, dans cette enceinte, nous devons constater que cette dynamique de progrès ne se manifeste pas de la même façon dans le domaine politique. La manière d'interpréter et de vivre la démocratie est inquiétante. En effet, lorsque la moitié des élus ou presque ne participe pas à l'activité parlementaire, lorsque le véritable débat politique ne s'instaure pas entre les forces qui ont été élues, mais sur la place et dans les rues et avec violence, il n'est pas seulement juste de parler de crise, il faut aussi parler de crise grave de la démocratie et du système politique. Lorsqu'il y a absence de dialogue, lorsqu'il y a politique de la chaise vide, cela constitue une trahison des attentes des citoyennes et des citoyens, qui ont le droit d'exiger que les femmes et les hommes politiques élus fassent leur devoir qui est celui de dialoguer et de travailler ensemble.

Je ne crois pas, mes chers collègues, que nous contribuons à résoudre le problème en entamant maintenant un débat sémantique sur le sens du mot «crise». Si nous le faisions, nous nous rendrions complices de cette trahison des droits et des attentes des Albanaises et des Albanais. Le Conseil de l'Europe doit aider l'Albanie, mais c'est surtout les hommes et les femmes politiques de ce pays qui doivent dialoguer et faire leur devoir envers les électeurs.

 

M. GROSS – La démocratie n'est pas qu'une machine technique, c'est aussi une culture, qui fait notamment que l'on respecte les perdants et qu'on les considère comme parties prenantes d'un processus. Si vous voulez voir ce qui se passe en l'absence d'une telle culture, regardez l'Albanie.

Ce pays connaît depuis quinze ans une transition très difficile. C'est à ma connaissance le seul pays dans lequel des élections ont dû se dérouler sous la protection des forces armées de l'OTAN. J'étais là-bas et je n'oublierai jamais comment les choses se sont passées. J'étais transporté par un tank français et j'avais à mes côtés un soldat autrichien! C'est dire que l'Albanie n'a pas encore une grande culture politique.

Ce n'est pas parce que vous gagnez une élection qu'il faut ensuite faire comme si les perdants n'existaient plus. La minorité politique a le droit d'être respectée comme telle. C'est ce que l'on appelle les droits de l'opposition. Mais cette culture-là n'existe pas en Albanie. Je suis d'accord avec les rapporteurs pour parler de crise. Nous sommes en effet dans un contexte où le dirigeant du parti qui a perdu estime qu'il ne doit pas participer aux travaux du parlement, mais plutôt mobiliser les gens contre le gouvernement actuel et les faire descendre dans la rue. Lorsqu'un opposant menace de recourir à la violence contre le gouvernement en place, il me semble qu'il y a bien lieu de parler de crise.

Il faut donc regarder la réalité en face et appeler un chat un chat. Voyons ce que nous pouvons faire pour éviter cette violence. J'approuve l'excellente idée des rapporteurs: il faut que le Comité des présidents et les rapporteurs se rendent sur place et s'entretiennent avec les responsables politiques. Il faut en tout cas mettre un terme à une situation qui jette le discrédit sur le pays. Il faut trouver un compromis entre les gagnants et les perdants. Bien sûr, c'est aux Albanais de le trouver mais je crois que nous pouvons les y aider.

 

Quinze ans après le Programme d'action de la Conférence internationale sur la population et le développement (29 janvier 2010) – Francine John-Calame, Liliane Maury Pasquier

Mme JOHN-CALAME – Je partage les préoccupations de Mme McCafferty. Son rapport est d'une grande actualité, car les programmes en faveur de la santé sexuelle et reproductive stagnent voire régressent dans plusieurs pays européens, notamment pour ce qui est de l'accès à la contraception et aux soins prénataux et postnataux.

Lors du sommet mondial de 2005 les ministres des pays membres de l'Union africaine ont souscrit à un engagement proposé par la communauté internationale, qui considère l'accès universel aux soins de santé reproductive comme un des objectifs du Millénaire. Ainsi la santé sexuelle et reproductive est considérée comme faisant partie des droits humains, car il s'agit d'un élément clé pour lutter contre la pauvreté, l'objectif du Millénaire.

Chaque personne, homme ou femme, où qu'il soit, a le droit de disposer de son corps librement et sans contrainte et de déterminer sa destinée. Chaque personne est libre de décider d'avoir des enfants et de leur nombre et libre de chercher à avoir une vie sexuelle saine, sans craindre une grossesse non désirée ou une infection sexuellement transmissible, VIH compris.

L'accès à une information de qualité concernant l'éducation sexuelle et reproductive est donc primordial. Il convient donc d'intensifier la mise en place de programmes scolaires pour informer les enfants, filles et garçons, et développer des centres de planning familial pour les adolescents et les adultes. Etant donné les scènes pornographiques que les jeunes peuvent aujourd'hui visionner sur Internet, l'éducation sexuelle revêt une importance particulière pour préciser le contexte dans lequel les relations sexuelles ne seront pas avilissantes. Les relations sexuelles sont naturelles et participent à l'épanouissement de la personne, pour autant qu'elles ne sont pas contraintes mais librement consenties dans un moment d'intimité partagé avec son ou sa partenaire.

La grande majorité des amendements, mis à part ceux qui ont été déposés par la Commission des migrations, concerne l'interruption volontaire de grossesse. Leurs auteurs souhaitent limiter, voire supprimer la possibilité d'avoir recours à l'avortement comme ultime solution pour mettre fin à une grossesse non désirée. Cela nous choque à plus d'un titre. L'avortement est une décision qui appartient à la jeune fille ou la femme. Elle n'est jamais prise à la légère mais après une longue réflexion et un, voire deux avis médicaux. L'interruption de grossesse est une opération pénible et douloureuse, à laquelle elles n'ont pas recours par plaisir.

Les géniteurs se sentent parfois si peu concernés par la grossesse de leur partenaire que c'en est consternant. «Elle n'avait qu'à prendre des précautions, elle savait bien que je ne voulais pas d'enfant». De telles idées restent inscrites dans bien des esprits, et la responsabilité de la contraception incombe très souvent à la femme. A l'évidence, la grossesse non désirée n'est pas un problème d'homme. D'ailleurs, ils ne tombent pas enceintes! Mais à moins de trouver des femmes fécondées par le Saint-Esprit, l'homme y est tout de même pour quelque chose.

Les mentalités doivent changer, même si cela doit prendre du temps. Il est exclu que ce que les femmes ont obtenu après plusieurs dizaines d'années de lutte soit remis en question aujourd'hui. L'interruption volontaire de grossesse, pratiquée par des personnes compétentes et dans des conditions d'hygiène optimales, reste un réel progrès, n'en déplaise à certains.

 

Mme MAURY PASQUIER – Au nom de la commission, je tiens à souligner l'importance, plus de quinze ans après son adoption, du programme d'action de la Conférence sur la population et le développement qui a recueilli l'accord de 179 pays. C'est fort de cette conviction qu'elle soutient dans les grandes lignes la proposition de recommandation de la rapporteure; la commission a traité à plusieurs reprises les nombreuses propositions d'amendement. Les trente-trois premiers l'ont été l'an dernier. Ils proposent de suivre la rapporteure, sauf en ce qui concerne les amendements de la Commission des migrations, des réfugiés et de la population. La Commission des questions sociales s'est ralliée à ces propositions. Malheureusement, les conditions dans lesquelles nous avons examiné hier vingt-huit nouveaux amendements, c'est-à-dire en très peu de temps, ont certainement conduit à un manque de lisibilité, voire de cohérence, dans les recommandations de la commission. Ainsi, nous n'avons examiné les amendements que jusqu'au numéro 53 inclus.

Pour conclure, je vous invite à encourager les Etats signataires du programme d'action à poursuivre et à développer leur engagement pour améliorer la santé de millions de femmes dans le monde et contribuer ainsi à un meilleur équilibre de l'ensemble de nos sociétés.

Je souligne également que les mots utilisés dans le rapport, et qui ont été contestés par certains orateurs, notamment les termes «santé sexuelle et reproductive» sont, comme Mme McCafferty l'a précisé, exactement ceux qui sont utilisés dans le programme d'action. Ils ont été adoptés, je vous le rappelle, par 179 pays. Il ne serait donc pas judicieux de les modifier ici.

Je vous invite enfin à lire attentivement le texte de la recommandation et des différents amendements afin de permettre l'adoption par cette assemblée d'un texte cohérent. Je réitère aussi les excuses de la commission qui n'a pas réussi à faire correctement son travail. Mais la pluie d'amendements déposés cette semaine encore a réellement contribué à rendre nos travaux difficiles.

 

Biodiversité et changement climatique (29 janvier 2010) – Francine John-Calame

Pour une politique efficace en faveur de la biodiversité, il est essentiel d'expliquer ce qu'est la biodiversité, qui pour beaucoup de personnes ressemble davantage à un concept abstrait qu'à une réalité concrète liée au vivant. Il est clair qu'on ne protège bien que ce qu'on connait et dont on reconnaît l'importance. Je salue donc le travail remarquable fourni par les ONG afin d'effectuer cette vulgarisation et cette sensibilisation auprès de la population civile.

Comme cela a déjà été dit, la biodiversité ou diversité biologique est la base de toute vie. Elle se traduit aussi bien par la pluralité des espèces que par la richesse de leur patrimoine génétique et la variété des écosystèmes qui les abritent. Sans cette diversité des espèces, il n'y a pas de vie possible sur terre. C'est bien ce message-là qu'il est important de faire passer auprès de la population et des autorités économiques et politiques, afin que celles-ci adoptent un comportement à même de préserver une biodiversité qui n'a jamais été autant menacée qu'aujourd'hui par les activités humaines.

En fait, si nous comparons les écosystèmes à une maison, les espèces vivantes constitueraient les briques des murs, chacune ayant sa fonction, même si isolée, elle nous paraît de faible importance. Cette subtile construction est garante de notre qualité de vie. Or, chaque espèce qui disparaît, c'est un trou dans la mur. Au fil des extinctions, l'écosystème se fragilise, la maison se détériore et l'équilibre est menacé. A la fin, l'édifice entier s'effondre et nous nous retrouvons sans protection ni ressources.

De nombreux êtres vivants cachent sous des apparences souvent les plus modestes des caractéristiques, chimiques ou autres, susceptibles d'être un jour utiles à l'homme, notamment dans les domaines de l'agriculture et de la pharmacie. Se priver de cette richesse est donc dommageable à terme. Toutes les espèces comptent dans l'équilibre de la nature. Simplifier un habitat naturel, c'est le fragiliser. Sans cette formidable variété du vivant, les animaux, les végétaux et aussi l'être humain seraient très rapidement condamnés à disparaitre.

Les effets de l'activité humaine sur le climat et la biodiversité sont multiples. Les activités humaines ont souvent un impact double sur le climat et la biodiversité. Par exemple, l'abattage de forêts anciennes entraîne l'émission de gaz carbonique, du fait de la combustion ou de la décomposition de la biomasse, et l'extinction d'espèces, du fait de la destruction de leur habitat naturel. L'assèchement des zones humides et l'exploitation de gisements de pétrole et de gaz dans des régions sauvages encore vierges ont le même type d'effets négatifs.

L'intensification de l'élevage et de l'agriculture est aussi problématique, car le recours accru aux engrais minéraux entraîne des émissions d'oxyde d'azote et la production de fumier provenant des grands élevages de bétail une augmentation des émissions de méthane. Or, ces deux gaz contribuent à l'effet de serre. La perte de biodiversité se produit simultanément, du fait de la conversion en terres arables – sur lesquelles sont cultivées un nombre restreint de variétés - de prairies semi-naturelles riches en espèces, de la disparition des lisières et des haies et du remplacement de races d'élevage traditionnelles par une race unique.

Le changement climatique en cours, avec les vagues de chaleur, les cyclones, les inondations et les sécheresses qui en sont le corollaire, représente bien évidemment une menace supplémentaire pour la biodiversité. Le réchauffement global actuel est sans équivoque. Il constitue un défi sans précédent pour la biodiversité, car il se conjugue avec les autres dangers liés aux activités humaines.

De par son impact visuel et émotionnel, l'illustration la plus frappante de ce changement climatique est certainement l'amincissement et le rétrécissement de la calotte glaciaire des pôles, qui a pour conséquence de menacer la survie des ours et d'une façon générale la biodiversité arctique.

Il est donc évident que le changement climatique a des répercussions importantes sur les populations animales, sur la répartition des espèces, sur les écosystèmes, sur la durée des saisons et sur les périodes de reproduction, sur la croissance des animaux et des plantes, sur les migrations animales, sur la fréquence des infestations parasitaires et des maladies…

Le changement climatique va obliger certaines espèces à s'adapter, notamment en migrant vers des lieux plus favorables. Cependant, la fragmentation des habitats limite grandement ces mouvements de population et diminue ainsi la capacité d'adaptation des espèces. De plus, la perte de biodiversité réduit la résistance des écosystèmes à certaines maladies ou à certaines plantes envahissantes.

Il est donc indispensable de prévoir des corridors naturels pour aider les espèces menacées à quitter certaines zones aux conditions de vie insatisfaisantes et à migrer vers des zones plus hospitalières. Les écosystèmes devront certes s'adapter, mais il convient de se demander dans quelle mesure cette adaptation sera possible face à l'exploitation intensive du sol et au caractère statiques des zones protégées.

Une partie de la solution pourrait par exemple provenir du développement d'une agriculture durable et respectueuse de l'environnement qui permettrait de ralentir la perte de la biodiversité et de réduire la vulnérabilité des écosystèmes tout en diminuant les émissions de gaz à effet de serre qui ont un impact prépondérant sur le changement climatique.

En cette année que les Nations Unies ont déclaré celle de la biodiversité, les parlementaires ont pour tâche de sensibiliser leurs gouvernements respectifs à l'importance que revêt le maintien d'une biodiversité aussi riche que possible. Afin d'atteindre cet objectif, il faut absolument cesser la surexploitation de certaines ressources naturelles comme la faune marine et éviter la transformation d'énormes pans de nature sauvage en pâtures ou en terres cultivées. Cette surexploitation des ressources utiles sacrifie des intérêts vitaux à long terme au bénéfice d'intérêts plus immédiats.

Certaines actions très concrètes peuvent être prises afin de limiter l'impact des activités humaines sur la nature, mais aussi pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. La conférence de Copenhague n'a pas donné de résultats très concrets, mais c'est à nous, parlementaires, qu'incombe maintenant la responsabilité de passer du discours aux actes pour obtenir des projets concrets de nos gouvernements en faveur du climat d'une part et de la préservation, voire de la restauration de la biodiversité, d'autre part.