(ats) L'armée disposera de 4 milliards de plus pour les années 2025 à 2028. Le National a approuvé jeudi cette augmentation demandée par le Conseil des Etats. L'enveloppe sera compensée sur d'autres postes de la Confédération. Le vote est tombé par 110 voix contre 78.

Le Conseil fédéral proposait un plafond des dépenses militaires de 25,8 milliards pour la période 2025 à 2028. En juin, le Conseil des Etats a soutenu une hausse du plafond de 4 milliards de francs, à 29,8 milliards, contre l'avis du gouvernement et de la gauche.

Cela permet à l'armée d'atteindre 1% du PIB d'ici 2030, et non 2035 comme initialement prévu. Le Conseil des Etats a prévu des compensations de 2 milliards dans la coopération internationale et 2 milliards dans d'autres postes.

Irréaliste ou possible?

Le Conseil national a approuvé cette hausse contre l'avis du PS, des Vert-e-s et du PVL. Comme le note le rapport sur la sécurité, une guerre au bord du Rhin n'est pas un scénario réaliste. Les moyens financiers supplémentaires seraient mieux utilisés pour la paix, a souligné Marionna Schlatter (Vert-e-s/ZH).

Les Russes sont embourbés dans un conflit en Ukraine, ils devraient occuper la moitié de l'Europe et battre l'OTAN avant d'arriver en Suisse, a avancé Pierre-Alain Fridez (PS/JU).

La présidente de la Confédération Viola Amherd a rappelé que le rapport a été complété après le début de la guerre en Ukraine. "La possibilité d'un conflit est plus probable qu'avant et ne doit pas être perdu de vue."

"La possibilité existe que le monde change. On ne peut pas partir de l'idée que jamais rien de nous arrivera", a contré Jacqueline de Quattro (PLR/GE).

Compensations

Le débat a été vif sur la manière de financer ces dépenses supplémentaires. Au final, le choix s'est porté sur des compensations.

Des coupes sont prévues dans la coopération internationale. Les charges du personnel fédéral doivent être réduites, y compris sur le personnel des frontières, fedpol et le service de renseignement, par l'accroissement de l'efficacité de l'armée - des domaines chers à l'UDC. La part des cantons à l'impôt fédéral direct sera réduite au profit de la Confédération.

Le groupement défense et armasuisse devront économiser au total 500 millions de francs en 2028. Cela passe par une augmentation de leur efficacité. Les charges d'exploitation seront réduites au profit des investissements.

Coopération internationale

Les partis socialiste et écologiste ont défendu corps et âme la coopération internationale. Des coupes dans la coopération internationale sont une aberration. Cela revient à accélérer les mouvements migratoires contre lesquels l'UDC se bat, a argué Fabian Molina (PS/ZH).

Les orateurs de gauche ont encore rappelé que la Confédération fait déjà face à un déficit. "Où trouver cet argent?", a lancé Irène Kälin (Vert-e-s/AG). Et Fabien Fivaz (Vert-e-s/NE) de rappeler que l'UDC a également avancé l'argument des finances fédérales pour couper dans la culture et la recherche.

Pour Ursula Zybach (PS/BE), une telle augmentation est "irréfléchie". Elle a été décidée sans consultation, a rappelé Tamara Funiciello (PS/BE). Le PVL s'est également opposé à une hausse plus rapide que celle prévue par le Conseil fédéral (1% du PIB en 2035).

Patrick Hässig (PVL/ZH) a encore souligné que la coopération internationale fait partie de la politique de sécurité. "Est-ce que le peuple préfère les chars au financement des places de crèche?", a encore lancé Mme Funiciello.

Sécurité avant tout

Les partis bourgeois ont quant à eux placé la sécurité de la Suisse au-dessus de tout. "Personne ne sait ce qui nous attend et nous devons être préparés", a argué Mauro Tuena (UDC/ZH). Thomas Bläsi (UDC/GE) a accusé la gauche de sous-évaluer le risque d'embrasement général.

Au Centre, on rappelle que ces dernières années, les budgets des autres domaines, culture, recherche, assurances sociales, ont été augmentés. Et ce sur le dos de l'armée, a souligné Nicole Baradun (C/ZH).

Une position également partagée par le PLR. En effet, "depuis la chute du mur de Berlin, la priorité a été donnée à la paix et l'armée a été négligée et reléguée au second plan. Elle n'a cessé de perdre en moyens et en effectifs", a abondé Jacqueline de Quattro (PLR/GE). "Cet effort pour la paix était juste, mais maintenant les priorités ont changé et nous devons nous donner les moyens de nous prémunir contre les menaces les plus improbables."

Pas de fonds

Le Ps, opposé à une augmentation du plafond des dépenses, était toutefois prêt à soutenir l'idée d'un fonds temporaire de 10 milliards, comme proposé par le Centre. "Nous devons au moins nous assurer que cette augmentation ne se fasse pas sur le dos des autres domaines de la Confédération", a argué M. Molina.

Le Centre a finalement renoncé à sa propre proposition afin d'assurer le financement de l'armée. L'UDC y était fermement opposée et était prête à refuser l'ensemble du projet au vote sur l'ensemble.