Des élections équitables et transparentes sont le fondement d'une démocratie qui fonctionne. Depuis plus de 30 ans, des parlementaires suisses s'engagent dans des missions d'observation électorale à l'étranger.

C’est en 1989 que la Suisse envoie sa première mission d’observation électorale à l’étranger. En contribuant à hauteur de 31 expertes et experts au Groupe d’assistance des Nations Unies en Namibie, la Suisse donne un nouveau souffle à sa politique étrangère. Alors que l’effondrement du mur de Berlin met fin à la Guerre froide, de nombreux pays en Europe de l’est, en Asie ou en Amérique latine sont en voie de démocratisation, rendant nécessaire la mise en place de missions d’observation électorale. Concrètement, ces missions consistent en un mécanisme d’évaluation indépendante des processus électoraux, se concentrant sur la collecte le jour de l’élection. Mais si cette tâche garde toute son importance, elle n’est qu’une étape du processus électoral, et certaines de ces missions ont peu à peu pris la forme d’une assistance électorale complète, notamment dans les pays dépourvus de structures démocratiques historiques. Ainsi, en 2005, la Déclaration de principes pour l’observation internationale d’élection précise que cette pratique sert à « évaluer la situation avant et après les élections, ainsi que le jour même du scrutin ». En effet, l’objectif à terme est de réduire le niveau de fraude, atténuer les conflits et renforcer la confiance de l’électorat dans les institutions, et à ce titre, les missions d’observation à long-terme deviennent nécessaires.
Si l’ONU a eu un rôle pionnier dès 1989, puis en 1992 lorsque la Division de l’assistance électorale a été mise sur pieds, cette tâche a par la suite été de plus en plus assumée par d’autres institutions telles que l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), l’UE, l’OSCE ou encore l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF). La Suisse a dès le départ pris la mesure des besoins en matière d’observation électorale, en se joignant à de multiples missions tout au long des 34 dernières années. A l’origine formée essentiellement d’experts techniques, les missions ont peu à peu intégré des membres du Parlement. En 2004 en effet, l’ancienne conseillère nationale socialiste zurichoise Barbara Haering était nommé cheffe de la mission parlementaire de l’OSCE pour observer le duel Bush-Kerry pour l’élection présidentielle américaine. Elle expliquait alors à swissinfo que « la surveillance des élections ne se limite naturellement pas au jour du scrutin. Elle prend également en compte l’analyse de la campagne électorale, l’accès de tous les candidats aux médias, la question de l’inscription des électeurs ainsi que le système électoral en tant que tel et les questions de techniques. » En tant qu’observateur, « l’OSCE n’a pas un rôle de police [mais] livre un rapport où figurent ses observations, d’éventuelles irrégularités ainsi que de possibles recommandations pour améliorer la situation. »
Depuis plus de 20 ans, les membres des délégations parlementaires auprès de l’APCE, de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE ou encore de l’APF ont ainsi multiplié la représentation au sein de ces missions, au point d’en faire un élément clé de la diplomatie helvétique en matière de promotion de la paix et de la démocratie. Ces dernières années, c’est surtout la délégation au Conseil de l’Europe qui s’est montrée particulièrement active, avec une participation nettement supérieure à la moyenne. Andy Gross (S, ZH) s’est particulièrement illustré dans ce domaine comptabilisant près d’une centaine d’observations au total. Plus récemment en 2021 par exemple, Alfred Heer (V, ZH) a dirigé les missions d’observation de trois différents scrutins en Bulgarie. D’autres membres de la délégation se sont montrés actifs dans ce domaine. Pierre-Alain Fridez (S, JU) était ainsi rapporteur pour la mission d’observation des élections législatives en Moldavie et présidait la mission d’évaluation liée aux élections législatives en Russie: Cette mission d’observation des élections à la Douma s’est déroulée moins de six mois avant l’agression militaire de la Fédération de Russie contre l’Ukraine. Prenant prétexte de la pandémie de Covid19, les autorités russes ont tout fait pour réduire au maximum les délégations de l’OSCE et du Conseil de l’Europe, une stratégie à postériori délibérée pour éviter une évaluation sérieuse. Nous devions au total être plus de 500 observateurs occidentaux, et en finalité nous nous sommes retrouvés à cinq à Moscou, un représentant par groupe politique du Conseil de l’Europe. Une observation qui s’est donc transformée en simple évaluation, mais qui nous a cependant permis d’entrer en contact avec des représentants de l’opposition russe, en particulier le parti Yabloko, et de constater que ces élections n’étaient pas concurrentielles en n’offrant clairement pas les mêmes chances à tous les participants. » D’autres membres de la délégation ont également pris part à des missions d’observation électorale, tels que Damien Cottier (RL, NE), également en Bulgarie, ainsi que Jean-Pierre Grin (V, VD) et Sibel Arslan (G, BS) en Albanie. Quant à la délégation à l’OSCE, son rapport 2021 souligne également son importante participation aux missions d’observation électorale tout au long de l’année, en particulier dans l’espace post-soviétique (Kazakhstan, Kirghizstan, Arménie, Moldavie, Russie et Ouzbékistan). Lors de la mission d’observation électorale portant sur l’élection américaine de 2020, le Conseiller aux Etats Josef Dittli (RL, UR) était par exemple chargé de visiter 10 bureaux de vote dans la capitale Washington DC et au Maryland. Sur le déroulement de la mission, il explique :« nous avons dû évaluer si le personnel était suffisant ou si l'électeur pouvait voter sans restriction. Préalablement, nous avons donc dû nous adresser au responsable du bureau de vote pour nous identifier et demander l'autorisation d'observer l'élection. Ces dirigeants ne savaient pas comment aborder la situation. L'OSCE n'était connue de personne, mais nous avions une pièce d'identité avec la signature du fonctionnaire électoral responsable de l'État concerné. Nous avons été accueillis de manière amicale partout et nous avons pu discuter de tous les sujets et évaluer tous les éléments que nous souhaitions. Nous avons eu besoin d'environ 45 minutes par local. Nous avons débuté notre mission à 6h30 du matin et celle-ci s’est terminée à 6h00 du soir. »