Le 10 juillet 2024, le Ministère public du canton de Berne a demandé la levée de l’immunité du conseiller aux États Marco Chiesa et de l’ancien conseiller national Peter Keller. La Commission de l’immunité du Conseil national (CdI-N) est entrée en matière par 7 voix contre 2 en ce qui concerne Marco Chiesa et par 6 voix contre 3 en ce qui concerne Peter Keller. Elle a ensuite décidé de ne pas lever l’immunité du conseiller aux États Marco Chiesa (6/3/0) et de l’ancien conseiller national Peter Keller (6/2/1).

Dans sa requête, le Ministère public du canton de Berne a demandé la levée de l’immunité du conseiller aux États Marco Chiesa et de l’ancien conseiller national Peter Keller, et l’autorisation de mener une procédure pénale pour soupçon de discrimination et d’incitation à la haine (art. 261bis du code pénal). Concrètement, les soupçons portent sur des déclarations faites en 2023 dans le cadre de deux campagnes électorales de l’UDC, l’une intitulée « Nouvelle normalité ? », l’autre « Non à une Suisse à 10 millions d’habitants ! », qui visaient notamment la politique migratoire de la Suisse. Au moment des faits, le conseiller aux États Marco Chiesa était président de l’UDC et Peter Keller, alors conseiller national, secrétaire général du parti.

La CdI-N a entendu les deux intéressés, qui ont indiqué que le contenu des campagnes reflétait le travail politique qu’ils menaient au Parlement. Ils ont ajouté que ce contenu n’était pas dirigé contre certains groupes de personnes, mais contre la politique de la Suisse en matière de migration.

La commission estime que l’organisation des deux campagnes électorales est en rapport direct avec le mandat parlementaire du conseiller aux États Chiesa, alors président du parti, et que l’immunité relative s’applique donc dans ce cas. Elle renvoie de ce fait à sa pratique habituelle, qui consiste à considérer que le mandat de présidente ou président de parti est en rapport direct avec le mandat parlementaire. À ses yeux, le lien entre le travail de relations publiques que les personnalités politiques accomplissent dans le cadre de leur fonction de présidente ou président de parti et leur mandat parlementaire est si étroit que l’on ne saurait séparer les deux rôles. La commission est donc entrée en matière en ce qui concerne le conseiller aux États Marco Chiesa, par 7 voix contre 2. Un raisonnement similaire s’applique au secrétaire général du parti, si bien que la commission est également entrée en matière, par 6 voix contre 3, en ce qui concerne l’ancien conseiller national Peter Keller.

Dans un second temps, la commission a décidé, par 6 voix contre 3, respectivement 6 voix contre 2 et une abstention, de ne pas lever l’immunité du conseiller aux États Marco Chiesa et de l’ancien conseiller national Peter Keller. À l’instar de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États (CAJ-E), la CdI-N est d’avis que les déclarations faites lors des campagnes relèvent de la liberté d’expression et de formation de l’opinion qui prévaut dans le cadre d’une campagne démocratique et qu’elles doivent donc être tolérées. Elle renvoie aussi à la pratique des commissions dans des cas similaires (13.190 ; 12.191). À son sens, les intérêts institutionnels (intérêt public au bon fonctionnement du Parlement) l’emportent sur les intérêts liés à une procédure pénale.

S’agissant du conseiller aux États Mario Chiesa, comme la décision de la CdI-N concorde avec celle de la CAJ-E, le rejet de lever l’immunité est réputé définitif. En ce qui concerne l’ancien conseiller national Peter Keller, il revenait d’abord à la CdI-N de se pencher sur le cas, vu qu’il incombe toujours à la commission du conseil dont le membre concerné est ou était membre de procéder à l’examen en premier. Il appartient à présent à la CAJ-E de se prononcer sur son cas.

La commission a siégé le 18 novembre 2024 à Berne, sous la présidence du conseiller national Pierre-André Page (V/FR).