Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (Doc. 145259) – Liliane Maury Pasquier (Rapporteure), Alfred Heer, Liliane Maury Pasquier

Etat d’urgence: questions de proportionnalité relatives à la dérogation prévue à l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme (Doc. 14506) – Raphaël Comte (Rapporteur)

Changement climatique et mise en œuvre de l’Accord de Paris (Doc. 14521) – Manuel Tornare

Le financement du groupe terroriste Daech: enseignements retenus (Doc. 14510) – Pierre-Alain Fridez

La protection de l’intégrité rédactionnelle et Le statut des journalistes en Europe (Débat conjoint) (Doc. 14526, Doc. 14505, Doc. 14535) – Manuel Tornare, Roland Rino Büchel

Besoins et droits humanitaires des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays en Europe (Doc. 14527) – Pierre-Alain Fridez

La situation en Libye: perspectives et rôle du Conseil de l’Europe (Doc. 14519, Doc. 14534) – Pierre-Alain Fridez

Suivi du rapport du Groupe d’enquête indépendant sur les allégations de corruption au sein de l’Assemblée parlementaire (Débat selon la procédure d’urgence) (Doc. 14540, Doc 14543) – Alfred Heer

Problèmes juridiques posés par la guerre hybride et obligations en matière de droits de l’homme (Doc. 14523, Doc. 14536) – Raphaël Comte (Rapport pour avis)

Lutter contre le crime organisé en facilitant la confiscation des avoirs illicites (Doc. 14516) – Jean-Pierre Grin

La tuberculose pharmaco-résistante en Europe (Doc. 14525) – Pierre-Alain Fridez

L’intégration, l’autonomisation et la protection des enfants migrants par la scolarité obligatoire (Doc. 14524) – Raphaël Comte, Pierre-Alain Fridez

 

Lundi, 23 avril 2018

Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente (Doc. 145259) – Liliane Maury Pasquier (Rapporteure), Alfred Heer, Liliane Maury Pasquier

L. Maury Pasquier (Suisse) – Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, mes chers et chères collègues, j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui le rapport d'activité couvrant le trimestre écoulé.

Comme annoncé dans ce rapport, le Bureau s'est réuni hier – nous l’avons déjà abondamment évoqué – avec le Groupe d'enquête indépendant sur les allégations de corruption au sein de l'Assemblée, afin d’avoir un échange de vues sur son rapport final. Comme il en a été décidé, ledit rapport est désormais accessible au public et a été transmis à tous les présidents et présidentes des parlements nationaux des Etats membres du Conseil de l'Europe.

Les autres mesures ont d’ores et déjà été présentées par notre Président et abondamment commentées. Vous me permettrez néanmoins quelques mots concernant ce rapport, même s’il fera l’objet d’un prochain débat d’urgence, jeudi prochain.
Le Groupe d’enquête indépendant souligne le danger que la corruption constitue pour toutes les institutions. Je cite: «Il s’agit d’un des fléaux sociaux les plus répandus et les plus insidieux.» Tout en saluant le courage avec lequel l’Assemblée a réagi aux allégations de corruption en son sein, le Groupe d’enquête indépendant relève malheureusement que ces allégations sont très vraisemblablement fondées, au moins pour quatre de nos collègues ou anciens collègues.

Le rapport relève, par ailleurs, un certain nombre de violations de notre code de conduite, par certains collègues ou anciens collègues. Le Groupe d’enquête indépendant fait enfin plusieurs recommandations pour lutter plus efficacement, à l’avenir, contre ce fléau qu’est la corruption. Notre tâche est donc grande. Notre attitude et la mise en œuvre de ce Groupe d’enquête indépendant vont dans le bon sens, mais nous devons agir plus avant pour être réellement efficaces dans cette lutte contre la corruption.

C'est dans ce même effort de lutte contre la corruption que le Bureau s'est penché sur le suivi de la Résolution 2182 (2017) concernant la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l'intégrité des membres de l'Assemblée. En ce qui concerne le format et le contenu des obligations déclaratives, le Bureau a pris note du formulaire de déclaration des intérêts, approuvé par la Commission du Règlement, et a fixé au 30 septembre 2018 le délai pour que les membres de l'Assemblée renvoient leur déclaration sous serment signée pour l'année en cours. Passé ce délai, le refus de faire une déclaration, de la compléter et de la soumettre, la non-divulgation d'un intérêt pertinent ou encore la soumission d'une déclaration mensongère entraîneront la privation du droit d'être désigné rapporteur ou rapporteure, d'agir en tant que rapporteur ou rapporteure ou d'être membre d'une commission ad hoc d'observation d'élections. Le Bureau a par ailleurs demandé à la Commission du Règlement de rédiger les lignes directrices ou la note explicative à ajouter au formulaire de déclaration des intérêts.

Il a en outre tenu un échange de vues à propos du mémorandum sur les règles d'accès et de circulation dans l'enceinte du Conseil de l'Europe pendant les sessions et réunions de l'Assemblée. Les membres du Bureau se pencheront prochainement sur la mise au point de ce document final, à Zagreb, le 31 mai prochain.

Toujours au chapitre de la lutte contre la corruption, le Bureau a examiné, le 15 mars, les lignes directrices révisées pour l'observation des élections, lesquelles ont déjà été en partie adoptées. Là aussi, le délai pour la soumission de commentaires ou amendements sur les parties qui n'ont pas encore été adoptées a été fixé à la fin de ce mois, dans la perspective d'adopter ces lignes directrices lors de la réunion du 31 mai.

Entre autres questions, le Bureau a également discuté de la participation des membres aux sessions plénières de l'Assemblée et aux réunions des commissions, avec l'objectif d'inciter les délégations concernées par une faible participation à améliorer leur implication. Cette question n'est pas sans rapport avec une autre forme d'implication des Etats membres du Conseil de l'Europe: je veux parler de la participation financière.

En effet, la situation financière du Conseil de l'Europe n'est pas – c'est peu de le dire – au beau fixe. La décision prise par le Gouvernement turc de mettre fin à son statut de grand contributeur au budget du Conseil de l'Europe, ce dès fin 2017, conjuguée à la suspension du paiement de la contribution russe, le tout dans le contexte de maintien, depuis plusieurs années maintenant, de la décision du Comité des Ministres de maintenir une croissance nominale zéro, tout cela implique des coupes de près de 18 millions d'euros dans le budget ordinaire de l'Organisation et, par conséquent, des réductions dans le budget de l'Assemblée pour cette année 2018, sans parler de l'impact sur la liste des langues de travail. Le Bureau a d'ores et déjà approuvé certaines mesures, qui concernent notamment l'organisation du travail en commissions et qui sont détaillées dans l'annexe 3 du rapport. Mais, étant donné cette situation budgétaire «sous pression», le Bureau puis l'Assemblée pourraient être contraints de procéder à un réexamen global de nos priorités et de nos méthodes de travail.

J'aimerais en appeler ici à la responsabilité conjointe de tous les Etats membres et aux engagements qu'ils ont pris en adhérant au Conseil de l'Europe. La participation à cette Organisation implique un soutien financier conséquent et une implication active. Sans cela, le Conseil de l'Europe et, plus particulièrement, cette Assemblée, se trouvent sans ressources et incapables de remplir leurs missions essentielles.

A l'heure où l'Assemblée opère une profonde mue pour assurer la transparence en son sein, il me semble crucial de rappeler que, sans moyens financiers substantiels et sans la participation active de ses membres, ces efforts seront vains et l'Assemblée sera une coquille certes propre, mais vide.

La coquille vide, c'est la crainte qui nous a animés en prenant connaissance du projet de déclaration sur le système européen des droits de l'homme dans l'Europe de demain, prévue à l'issue de la Conférence à haut niveau organisée à Copenhague les 12 et 13 avril par la présidence danoise du Comité des Ministres: la crainte qu'elle ne parvienne à vider en partie de sa substance l'action de la Cour européenne des droits de l'homme. C'est ce que souligne le projet de déclaration à ce sujet, que la Commission des affaires juridiques avait présenté, et qui a été adopté par la Commission permanente le 16 mars.
Fort heureusement – et j'espère que la déclaration que nous avons adoptée n'y est pas étrangère – la déclaration de Copenhague ne remet en question ni l'universalité des droits protégés par la Convention européenne des droits de l'homme, ni l'indépendance de la Cour, ni l'obligation inconditionnelle des Etats parties de mettre en œuvre ses arrêts. Alors qu'il est essentiel de se concentrer sur les défis posés par la charge de travail de la Cour – elle-même principalement causée par une mise en œuvre inadéquate de la Convention dans de nombreux Etats –, il n'est pas question d'ébranler le système de la Convention. Un système dont, là encore, l'efficacité est tributaire du bon fonctionnement de chacun de ses éléments. Nous aurons l’occasion d’en reparler au cours de la semaine.

 

A. Heer (Suisse) – Sehr geehrter Herr Präsident! Geschätzte Kolleginnen und Kollegen!

Ich möchte zuerst Anne Brasseur danken. Sie war meine erste Fraktionspräsidentin als ich 2012 in den Europarat gekommen bin.
Ich möchte gerne zum Bericht der unabhängigen Untersuchungskommission Stellung nehmen. Dieser ist letztlich nicht aus deshalb zustande gekommen, weil die Schweiz als erste Delegation eine solche Untersuchung gefordert hat. Ebenfalls möchte ich betonen, dass es mir nicht darum geht, irgendein Land – auch nicht Aserbeidschan – auf die Anklagebank zu setzen. Dies wäre falsch. Wir sollten den Bericht dazu nützen, um Verbesserungen in unserer Parlamentarischen Versammlung durchzusetzen.
Ich möchte aber ebenfalls unterstreichen, dass Lobbying durchaus legitim ist. Diejenigen sind schlechte Menschen, die Geld annehmen und entsprechend handeln und weniger jene, die das Geld investieren, auch wenn dies ebenfalls nicht in Ordnung ist.
Wie erleben meines Erachtens eine fundamentale Krise im Europarat. Wir müssen feststellen, dass derzeit über uns nur mehr im Zusammenhang mit Korruption berichtet wird und wir keinen Einfluss mehr auf Menschenrechte, Demokratie und freie Meinungsäußerung haben. Wir sollten uns auf die Tatsache konzentrieren, dass wir für 800 Millionen Europäerinnen und Europäer sprechen, dass wir uns für diese 800 Millionen Menschen einsetzen, die wir vertreten und nicht nur für unsere eigenen Landsleute – Schweizer, Ukrainer, Russen, Franzosen, etc. Dieser Hauptpunkt wird manchmal vergessen, teilweise wird nationalistische Politik betrieben, die uns nicht weiterführt.

Im Bericht werden ebenfalls die Verbesserungen erwähnt, die wir in Angriff nehmen müssen. Wir stellen fest, dass es im Europarat einige wenige, rund 20 Personen gibt, die Alles beherrschen: die Fraktionspräsidenten, die Kommissionspräsidenten, die gleichzeitig alle Monitoring-Berichte schreiben usw.

Ich bin der Meinung, dass die Arbeit auf mehrere Schultern und Köpfe verteilt werden muss, so erhält man sicher ausgewogenere Berichte. Dann werden Personen auch nicht beeinflusst in einem oder anderem Sinne zu handeln, wie das jetzt der Fall ist, wenn die Macht auf so wenig Leute konzentriert ist. Dies wäre ein demokratisches Prinzip, dass wir als Parlamentarische Versammlung einführen sollten.

Ich bin zuversichtlich, dass dieser Bericht zu Verbesserungen führen wird ohne dabei auf einzelne Personen zu zeigen.

Besten Dank.

 

L. Maury Pasquier (Suisse) – Merci à tous les collègues qui ont participé à ce débat très important, me semble-t-il, pour la suite de nos travaux.

Vous me permettrez, chers collègues, de commencer par une remarque à propos de l’observation des élections au Monténégro et en Azerbaïdjan. Ces deux missions d’observation ne sont pas évoquées dans le rapport d’activité que je viens de présenter pour la simple et bonne raison qu’elles sont intervenues trop récemment. Elles seront donc discutées lors de la séance que tiendra la Commission permanente le 1er juin prochain à Zagreb. Permettez-moi simplement d’indiquer que les conclusions de la mission d’observation des élections de l’APCE, de l’OSCE et du Parlement européen ne correspondent pas aux propos tenus dans cette enceinte – mais ce n’est pas l’objet de notre débat d’aujourd’hui.

Les différents intervenants ont surtout évoqué le rapport du Groupe d’enquête indépendant. On a parlé d’un jour triste, d’une crise et d’une situation qui durent depuis trop longtemps. J’aimerais toutefois reprendre ici la comparaison souvent faite entre la corruption et le cancer, qui n’est pas le fait du hasard: les deux phénomènes se développent de la même manière, avec un début à bas bruit, des symptômes qui apparaissent peu à peu, discrètement, sans qu’il soit possible de les identifier facilement, avant de devenir de plus en plus prégnants. Le diagnostic tarde, on tâtonne avant de le formuler et de pouvoir soigner la maladie.
En ce sens, le rapport du Groupe d’enquête indépendant est sans doute un important élément du diagnostic, mais n’est probablement pas le seul. Peut-être y aura-t-il besoin d’examens complémentaires non seulement pour compléter le diagnostic mais surtout pour lutter efficacement et aussi vite que possible contre ce cancer, contre cette maladie de la démocratie qui atteint aussi notre propre Assemblée. C’est dans la logique d’une poursuite d’une action volontaire, efficace et au final gagnante que s’inscrit ce rapport du Groupe d’enquête indépendant. Dans ce cadre, il convient, en dépit des difficultés, d’avoir un regard positif et de considérer la crise comme une chance.

Permettez-moi maintenant quelques réponses à des remarques isolées.

Ce rapport n’est pas dirigé contre l’Azerbaïdjan. Il a mis en évidence la volonté systématique d’influencer de manière plus ou moins douce les rapports et les actions des membres de l’Assemblée, par le biais de violations de son code de conduite et d’incitations qui sont allées jusqu’à des tentatives de corruption avérées. Nous ne pouvons le laisser sous silence. Il ne s’agit pas de pointer un pays mais des pratiques inacceptables et qui n’ont pas leur place dans cette Assemblée.

Les personnes listées dans ce rapport le sont, pour certaines, pour des cas de corruption, pour d’autres, pour des cas de violations diverses du code de conduite. Toutes les personnes concernées qui contestent l’évaluation du Groupe d’enquête indépendant peuvent faire valoir leur point de vue auprès de la commission du Règlement. Je suis certaine que cette commission fera diligence pour clarifier les situations personnelles et proposer, si nécessaire, les sanctions qui doivent être appliquées.
Concernant les recommandations du Groupe d’enquête indépendant, notamment celles relatives à l’élection de rapporteurs ou aux missions d’observation des élections, c’est encore une fois à la commission du Règlement qu’il reviendra de les évaluer et de nous faire, dans un prochain rapport, en temps utile, les propositions de mise en œuvre qu’elle jugera nécessaires.

Quant aux questions nationales, le groupe d’experts fait lui-même mention dans ses conclusions, à la toute dernière page du rapport, avant les annexes, de la responsabilité des autorités nationales et du lien que nous devons établir avec elles afin d’assurer la meilleure représentation possible des membres des assemblées nationales au sein de notre assemblée.
J’ajouterai que la tenue du débat d’urgence prévue jeudi ne signifie bien évidemment pas la fin des débats sur cette question, loin de là, puisque nous avons un certain nombre de chapitres, donc de volets à examiner à ce sujet.

Permettez-moi un dernier mot pour remercier à mon tour Anne Brasseur. Elle a été et elle reste un modèle pour tous les membres de l’Assemblée.

 

Mardi, 24 avril 2018

Etat d’urgence: questions de proportionnalité relatives à la dérogation prévue à l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme (Doc. 14506) – Raphaël Comte (Rapporteur)

R. Comte (Suisse) – Monsieur le Président, chers collègues, la Convention européenne des droits de l’homme est le fondement de la protection des droits de l’homme aux niveaux national et régional dans toute l’Europe. Le maintien de la démocratie et de l’Etat de droit dépend de l’effectivité de droits tels que la liberté d’expression et d’association, l’interdiction de la détention arbitraire et le droit à un procès équitable et à un recours effectif, mais la Convention prévoit des situations dans lesquelles les Etats ne sont pas tenus de respecter tous ces droits. En cas de guerre ou en cas d’autre danger public menaçant la vie de la nation, un Etat partie à la Convention peut déroger à certains droits, en ayant recours à l’article 15.
Du point de vue de la protection des droits de l’homme, une dérogation est une question extrêmement grave. Dans les limites de la proportionnalité, un Etat est autorisé à prendre des mesures qui, en temps normal, constitueraient des violations manifestes. Les normes habituelles de protection des droits de l’homme, destinées à s’appliquer à tous les Etats parties, peuvent alors être écartées. Un Etat ne devrait donc déroger à la Convention que dans les circonstances les plus exceptionnelles, lorsque les mesures ordinaires sont manifestement inadéquates, pour la durée et dans la mesure strictement requises par la situation d’urgence.

Récemment, trois Etats membres ont déclaré des dérogations à la Convention: l'Ukraine, la France et la Turquie. Chaque dérogation a une origine différente et peut trouver une justification compréhensible. Il est néanmoins préoccupant de constater que trois Etats, dans une période relativement courte, ont eu recours à ce qui devrait être une mesure exceptionnelle, et l'on pourrait encore évoquer d'autres cas dans les années qui ont précédé. Tout cela ne doit pas conduire à une banalisation du recours aux dérogations.

Chaque dérogation a pris également une forme très différente, avec des effets très divers. Ainsi, la dérogation de l'Ukraine est limitée à un territoire déterminé, alors que la dérogation française couvrait l'ensemble du territoire national, ce qui est également le cas de la dérogation turque. Les dérogations ukrainienne et française concernent un nombre de lois limité, alors que la dérogation turque a une portée extrêmement large, dans des domaines très diversifiés.

Mon rapport, comme son titre l'indique, met l'accent sur la proportionnalité des mesures prises dans le cadre de ces dérogations. Là encore, les conclusions sont très différentes d'un pays à l'autre.

Concernant l'Ukraine, le rapport met le doigt sur une disposition permettant une détention administrative pouvant aller jusqu'à 30 jours. Certes, cette disposition semble n'avoir jamais été utilisée − et c'est tant mieux! −, mais on peut sérieusement douter de sa conformité avec la Convention. Son abrogation pourrait être un signal positif et ne devrait pas poser de problèmes pratiques, puisque les autorités ont à leur disposition d'autres instruments légaux parfaitement efficaces. De plus, le rapport invite les autorités ukrainiennes à intensifier leur action afin de minimiser les impacts pratiques d'autres mesures. Il serait également souhaitable que la Cour constitutionnelle ukrainienne examine la constitutionnalité des lois dérogeant à la Convention.

La principale critique de l'état d'urgence en France concernait sa durée. Il peut être politiquement plus facile de déclarer l'état d'urgence que d'y mettre fin, et nous ne pouvons que nous réjouir que la France ait mis fin à l'état d'urgence, alors même, et nous le savons tous, que la menace terroriste persiste. La sortie de l'état d'urgence a cependant fait l'objet de certaines critiques dans la mesure où certaines des mesures valables sous l'état d'urgence ont été reprises dans le droit ordinaire, certes − il faut le souligner − avec des modifications de leur nature et de leur exercice. Il est essentiel que la récente loi adoptée par le Parlement français soit appliquée en pleine conformité avec les normes de la Convention. Une attention particulière devra être apportée à l'application de certaines définitions parfois subjectives et peu précises et pour lesquelles il conviendra que les autorités fassent preuve de retenue.

La Turquie a fait face à de sérieuses menaces quant à son ordre constitutionnel et à sa sécurité intérieure avec, d'une part, une tentative de coup d'Etat qui a mené au décès de centaines de civils et, d'autre part, plusieurs attentats terroristes, avec une menace toujours présente. Mais la portée des mesures d'urgence et leur impact sur nombre d'individus et d'organismes privés semblent largement excessifs.

Comme l'a souligné la Commission de Venise, les mesures prises pour protéger l'ordre constitutionnel ne doivent pas elles-mêmes saper cet ordre. C'est pourtant ce qu'il nous semble voir en Turquie.
Mon rapport est loin d'être le premier à arriver à cette conclusion. L'Assemblée elle-même, sur la base du rapport de la commission de suivi, a déjà dit la même chose. Elle l'a fait en se référant aux travaux détaillés de la Commission de Venise. Depuis lors, une autre année s'est écoulée et les critiques sur la durée de l'état d'urgence ne sont devenues que plus pertinentes au fil des jours.
Il est temps que le Gouvernement turc mette fin à l'état d'urgence et que les instruments législatifs ordinaires soient utilisés pour faire face aux défis sécuritaires du pays.

Les recours judiciaires doivent fonctionner à nouveau pleinement, et la Cour constitutionnelle devrait examiner les mesures d'urgence qui ont depuis lors été approuvées en tant que lois ordinaires. Les 140 000 fonctionnaires qui ont été renvoyés sans préavis, souvent sur la base d'éléments de preuve douteux et soumis à ce qu'on a appelé une «mort civile», doivent avoir la possibilité de contester la décision prise à leur encontre. Les chaînes de télévision, journaux et autres médias indépendants doivent être autorisés à rouvrir afin que le débat public libre et pluraliste puisse pleinement reprendre.

Au-delà des situations individuelles de chaque Etat, nous devons également tirer des leçons générales des expériences récentes. Bien que les dérogations permettent des restrictions parfois extrêmes en matière de droits de l'homme, elles sont soumises, au niveau du Conseil de l'Europe, au même examen que les autres affaires relatives aux droits humains. Les dérogations sont soumises au contrôle de la Cour européenne des droits de l'homme, mais au moment où la Cour intervient, les dommages peuvent déjà être considérables.
Notre rapport contient donc une série de propositions faites aux Etats membres, au Secrétaire Général et au Comité des Ministres visant à minimiser le recours futur aux dérogations et à éviter les abus les plus dommageables.
Il s'agit notamment d'inviter le Secrétaire Général à utiliser systématiquement les pouvoirs que lui confère l'article 52 de la Convention pour enquêter sur l'effet des mesures prises dans le cadre d'une dérogation. A nos yeux, cet examen doit être systématique car il faut absolument éviter que l'ouverture ou non d'une enquête soit perçue comme un choix politique, avec la part d'arbitraire que ce choix peut comporter.

Nous proposons également que le Comité des Ministres examine la pratique des Etats à la lumière des exigences de l'article 15 et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, et qu'il adopte ensuite une recommandation à l'intention des Etats membres.

Monsieur le Président, chers collègues, ce rapport traite de certaines des questions les plus graves auxquelles le Conseil de l'Europe peut être confronté. Notre projet de résolution est circonstancié, mais chaque mot a été soigneusement pesé et choisi. Il ne peut pas faire que des heureux, mais notre Assemblée a justement pour but de favoriser le dialogue et de nous permettre de progresser collectivement, ce qui n'est possible que si nous nous parlons franchement.

Je me réjouis d'entendre vos prises de position sur le rapport que je présente au nom de la commission et je compte naturellement sur votre soutien.

Changement climatique et mise en œuvre de l’Accord de Paris (Doc. 14521) – Manuel Tornare

M. Tornare (Suisse) – Les Etats-Unis se sont retirés de l’Accord de Paris pour les raisons que l’on connaît, préférant leurs intérêts économiques à l’avenir de leurs enfants. C’est une occasion unique pour l’Europe de se distinguer et de s’imposer dans ce dossier. Il faut peut-être un peu plus de volonté de la part de l’Europe. Tel était le premier point que je voulais souligner.
Deuxième point: nous avons entendu beaucoup de parlementaires parler ici de la signature par leur pays de la COP21. Une signature, c’est un engagement. Souvent, des pays signent sans que l’on voie les effets ni l’efficience de cette signature. Une signature, c’est une responsabilité. Mesdames et messieurs, chers collègues, vous êtes tous parlementaires dans vos pays, comme je le suis à Berne: je vous engage, sans vouloir vous donner d’ordre, à faire pression sur vos gouvernements pour légiférer dans le sens de la COP21 et du développement durable. Les mots sont une chose, mais les actes sont autre chose!
Troisième point: l’action sur l’opinion publique. Ici, nous admettons tous que le dérèglement climatique existe. Or, dans l’opinion publique, on entend souvent le contraire, l’intoxication étant orchestrée par de pseudo-scientifiques. Il faut donc renforcer l’information, la communication, l’action dans les écoles, avec preuves à l’appui, pour démontrer que le dérèglement climatique n’est pas une fake news mais une réalité.

Quatrième point, qui me tient à cœur: l’action des lobbies. Nous l’avons constaté dernièrement au sujet du glyphosate dans beaucoup de nos parlements. Les lobbies sont dans les parlements, ils sont à la porte des parlements; souvent ils payent des députés, il y a de la corruption – le glyphosate en est l’exemple. Cela influence les débats et les votes sur ces sujets cruciaux. Il faut donc lutter contre les lobbies: c’est un impératif catégorique.

Cinquième point: je souhaite que l’on crée une ONU verte, avec un siège soit à Genève, soit à New York, qui puisse véritablement suivre la mise en œuvre des décisions liées à la COP21.

Mesdames et messieurs, l’avenir de la planète n’est ni de gauche, ni de droite: il s’agit de faire en sorte, pour paraphraser Albert Camus, que le monde ne se défasse pas.

Le financement du groupe terroriste Daech: enseignements retenus (Doc. 14510) – Pierre-Alain Fridez

P.-A. Fridez (Suisse) – Mon propos ne portera pas directement sur le sujet central du rapport, à savoir la manière dont Daech a réussi à obtenir des sources de financement. Notre collègue en a dressé une liste exhaustive et pertinente.

Je tiens à mettre le doigt sur une autre question, qui prolonge la question du financement: comment Daech a utilisé cet argent? Outre l’entretien logistique de ses troupes, l’Etat islamique a utilisé les sommes faramineuses de ses revenus occultes pour acheter des armes, toutes les armes possibles pour étendre sa puissance militaire et perpétrer ses crimes abominables. Car le marché noir de l’armement est une activité très lucrative. Et nous devons bien en faire le constat: des armes produites dans nos pays démocratiques sont susceptibles de se retrouver entre les mains de n’importe qui. Il est impératif d’arrêter les exportations d’armes vers certains Etats, des Etats instables, des Etats faillis, des Etats situés sur l’arc de crise s’étendant du nord de l’Afrique aux confins de l’Asie.

Exporter moins d’armes vers les zones sensibles, c’est finalement tarir les sources d’acquisition illicites d’armes pour les groupes terroristes. Le sujet est complexe, car il ne faut pas oublier que les ventes d’armes et le trafic qui peut en résulter sont, je le répète, une activité très lucrative, non seulement pour les trafiquants mais aussi pour les producteurs.

Je terminerai par une remarque sur mon pays, la Suisse. Celle-ci figure sur la liste, figurant au point 12.8 du projet de résolution, des pays qui n’ont pas signé la Convention du Conseil de l’Europe relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime et au financement du terrorisme. Je tiens, chers collègues, à porter à votre connaissance que le Parlement suisse a adopté au mois de décembre 2014 une loi portant sur l’interdiction des groupes Al Qaida et Etat islamique, ainsi que des organisations apparentées. En son article 2, cette loi interdit à quiconque de s’associer à ces organisations, et de leur apporter un soutien humain et matériel, elle leur interdit donc de les financer, que l’infraction soit commise en Suisse ou à l’étranger.

 

Mercredi, 25 avril 2018

La protection de l’intégrité rédactionnelle et Le statut des journalistes en Europe (Débat conjoint) (Doc. 14526, Doc. 14505, Doc. 14535) – Manuel Tornare, Roland Rino Büchel

M. Tornare (Suisse) – Ce débat est essentiel. Jamais peut-être dans l’histoire la liberté de la presse n’a été aussi menacée, dans les dictatures évidemment mais aussi dans nos démocraties. Il ne s’agit pas ici de donner des leçons aux journalistes, il s’agit de défendre la liberté de la presse. Les rapporteures ont rappelé que l’article 10 de la Convention européenne des droits humains garantit cette liberté de la presse. Les rapporteures nous ont donné des pistes, je les en remercie, notamment en ce qui concerne les recettes. Avec la disparition – ou presque – du support papier et le passage au numérique, nombreux sont les journaux qui peinent à trouver des recettes supplémentaires. Je ne suis cependant pas persuadé que toutes les pistes envisagées dans les rapports soient pertinentes, mais nous pourrions en rediscuter.

Ces pistes portent également sur un statut du journaliste, particulièrement pour les femmes, et sur l’amélioration des conditions de travail. Il faut les analyser, et essayer de les mettre en œuvre dans chacun de nos pays.

Des recommandations ont également été faites en vue d’une meilleure adaptation à la situation actuelle des médias dans de nombreux pays. Nous en rediscuterons.

Il ne s’agit pas de fustiger certains Etats, mais je salue l’oratrice précédente, car, si j’en crois Le Monde, la Norvège est considérée, notamment par selon Reporters sans frontières, comme le pays qui garantit le mieux la liberté de la presse. Certains pays représentés parmi nous n’apprécieront pas mes propos, mais Reporters sans frontières fustige, par exemple, la République tchèque, dont le président de la République n’a pas été exemplaire; la Hongrie, où Viktor Orbán réserve des conditions déplorables aux journalistes; la Russie, où l’on assassine ou fait disparaître les journalistes avec lesquels on n’est pas d’accord; la Slovaquie; la Turquie bien évidemment; Malte, où ce qui s’est passé est un scandale; la Serbie; même les Etats-Unis, dont le président, aux élucubrations bien connues, essaie de faire taire une certaine presse qui ne lui plaît pas; Israël aussi, où le Premier ministre Netanyahou a fermé la radio et la télévision d’Etat, parce que ces médias ne lui plaisaient pas. Prenons conscience de la situation pour la changer. François Mitterrand le disait: «La liberté de la presse présente des inconvénients. Mais moins que l’absence de liberté.» Nous devons l’avoir à l’esprit.

Alors, il y a la censure, les pressions politiques, même dans certaines démocraties, mais il y a aussi un autre phénomène que nous devons dénoncer, qui se présente également en Suisse, pays considéré par Reporters sans frontières comme l’un de ceux qui garantit le mieux la liberté de la presse: ces Citizen Kane qui ne connaissent rien à la presse mais rachètent des organes de presse pour dicter leurs opinions politiques. Nous en voyons en France mais aussi en Suisse, avec un chef de parti politique. Ils musèlent la presse. Nous ne devons pas l’accepter, nous devons tout faire pour combattre ces dérives qui bâillonnent la liberté.

 

Roland Büchel (Suisse) – Geschätzter Herr Vorsitzender! Geschätzte Kolleginnen und Kollegen!

Die noch druckfrische Rangliste von «Reporter ohne Grenzen» – es geht darin um die Informationsfreiheit – reicht von Rang 1 Norwegen bis Rang 180 Nordkorea.

Da könnte man fast ein bisschen durcheinanderkommen. Warum sage ich das? Norwegen ist ein Königreich und Nordkorea bezeichnet sich als eine «Demokratische Volksrepublik» – und das seit 70 Jahren.

Merken Sie etwas? Propaganda und «Fake News» sind nichts Neues, auch wenn man es gerne heutzutage so darstellen möchte.
Nun komme ich zum heute Diskutierten. Ich haben den verschiedenen Voten mit großem Interesse zugehört und beziehe mich darauf und auf den Bericht 14526 «The protection of editorial integrity».

Der Bericht ist insgesamt ausgewogen und sehr gut. Dass er zusätzliche staatliche Regulierung will, liegt wohl in der Natur der Sache und das machen wir hier halt so. Wichtig ist, dass wir versuchen Maß zu halten.

Und ja, Selbstverantwortung gilt auch für Journalisten und Journalistenverbände. Das kommt im Bericht meiner Meinung nach sehr gut heraus. Unsere Versammlung will, dass die Europäische Journalistenföderation ihren Mitgliedern klarmacht, dass die Ethikkodizes zu befolgen sind. Das ist richtig so. Ich denke man muss sich in der Ausbildung aber auch im täglichen Tun und vom Charakter her diesen Bedingungen stellen.

Wenn wir jedoch, wie gemäß Punkt 10.1 des Resolutionsentwurfes den Qualitätsjournalismus mit Auflagen wie «worthy of public trust» belegen, dann wird es schwieriger, denn was ist «das Vertrauen der Öffentlichkeit», wie kann man das definieren, wer ist der Richter darüber? Ich glaube, dass wir das herausnehmen sollten und habe darum einen Antrag gestellt. Darüber werden wir anschließend abstimmen.

In der Debatte zum heutigen Thema wurde immer wieder von der «Qualität» des Journalismus gesprochen. Viele Politiker meinen damit das, was ihrer eigenen Ansicht entspricht. Ich nehme mich dabei nicht aus. Hacks or Heroes: Was sind Journalisten? Hacks, wie Sir Edward Leigh sagt, oder heroes, wie viele andere Sprecher denken? Es wird wohl beides zutreffen. Es gibt Journalisten von beiden Sorten und das ist beileibe nicht neu.

Im freien Markt müssen sich die besten Ideen durchsetzen. Wirkliche Qualität also – und nicht das, was von Altgedienten allzu gerne als «Qualität» definiert wird. Es bringt auch nichts, Bestehendes mit der Begründung zu verteidigen, dass man es «immer schon so gemacht hat». Qualität muss obsiegen. Dafür haben wir zu kämpfen. Die Menschen müssen selbst entscheiden können, wo und wie sie sich informieren.

Selbstverständlich gilt das für Staaten wie Nordkorea und auch für jene, die sich in der Rangliste ebenfalls weit unten befinden. Es gilt aber auch für unsere Staaten, die wir vertreten, Länder, die ganz oben in der Tabelle stehen. Es ist ganz wichtig, dass wir die Freiheit stützen und dass sich die Qualität durchsetzt und nicht, weil sie reguliert ist.

Danke.

Besoins et droits humanitaires des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays en Europe (Doc. 14527) – Pierre-Alain Fridez

P.-A. Fridez (Suisse) – Notre collègue, M. Munyama, donne dans son rapport une vision d’ensemble de la situation des PDI sur le continent européen: des situations diverses selon les pays, mais toujours des drames, des conditions de vie difficile, et toujours des sentiments de profonde injustice ressenties par ces hommes et ces femmes, qui, par millions, ont dû quitter leur foyer pour un refuge au long cours au sein de leur propre pays. Des victimes de la marche inexorable et aveugle de l’Histoire.

Si l’on excepte les problématiques chypriote et turque, et les personnes déplacées en Italie suite à des catastrophes naturelles, l’essentiel des personnes déplacées en Europe sont des victimes collatérales des conflits survenus en Europe depuis trente ans, à la suite de la chute du mur de Berlin et de la décomposition de l’empire soviétique au début des années 90. Cette réorganisation de l’espace politique et les frontières des nouveaux Etats se sont appuyées sur l’intangibilité des anciennes frontières administratives héritées de l’ère soviétique. Avec, de fait, des populations qui se sont retrouvées, sur la base de leurs aspirations, du mauvais côté des nouvelles frontières.

Ces situations ont fait le lit de plusieurs conflits, des conflits pour la plupart gelés, qui animent et s’invitent régulièrement dans nos débats. Ces conflits ont brisé des vies. Des personnes ont tout perdu, leur maison, leur passé, leur emploi, quand ce n’est pas un mari, un enfant ou un frère.

Ces personnes meurtries méritent notre solidarité, la solidarité de leur nation et de la communauté internationale. Nous saluons donc toutes les démarches entreprises en leur faveur pour tenter de soulager leur détresse: le rapporteur en a établi une liste exhaustive.

Mes chers collègues, mon groupe et moi-même restons cependant un peu sur notre faim: pas en raison du rapport de notre collègue, qui est excellent, mais parce que nous aimerions rêver… Le Conseil de l’Europe a été créé au sortir de la dernière guerre mondiale pour contribuer à bâtir la paix sur ce continent. «Plus jamais cela!» était le leitmotiv à l’époque, plus jamais de folie meurtrière! L’évocation de ces millions de personnes déplacées internes sur le sol européen doit résonner, pour nous tous, comme le constat d’un échec.

Pourtant, nous connaissons les solutions pour résoudre ces conflits interminables: le dialogue, la coexistence pacifique, la coopération, le respect des droits de l’homme, la paix, l’acceptation des bons offices de la communauté internationale. Cela a plutôt bien fonctionné dans les républiques de l’ex-Yougoslavie.

Ne rien faire, c’est condamner les déplacés internes à ce que j’appellerai «le syndrome palestinien»: être déplacé sans fin, toute sa vie, sur des générations. Autant de vies brisées, de vies entre parenthèses durant des années, des décennies à attendre un hypothétique retour chez soi.

Notre Assemblée est un lieu où le dialogue pourrait s’amorcer pour cultiver l’apaisement et rétablir des relations. Rien n’est jamais acquis, le chemin est long: mais si on n’essaie pas, on perd toute chance de réussir.

La situation en Libye: perspectives et rôle du Conseil de l’Europe (Doc. 14519, Doc. 14534) – Pierre-Alain Fridez

P.-A. Fridez (Suisse) – Quel avenir pour la Libye? Après la dictature mégalomaniaque et sanguinaire du despote Khadafi et plusieurs années de chaos, la Libye revient sur les devants de la scène internationale suite aux révélations sur le sort réservé aux migrants africains. On a contraint ces migrants à rester sur le sol libyen car l’Europe a pris des mesures en collaboration avec l’Etat et les garde-côte libyens pour ajouter un verrou de plus sur la route de l’Europe, comme elle l’avait déjà fait sur la route des Balkans.

«La Libye, c’est l’enfer des migrants» a affirmé Mme Van Gulik, directrice d’Amnesty International pour l’Europe, invitée de notre commission des migrations en ce début de semaine. Ses paroles ont été dures et sans complaisance. Elle a parlé des centres de détention dans lesquels on pratique une torture systématique, des interventions en mer des garde-côtes avec des meurtres par balles et des noyades de migrants. Elle affirmait même qu’il existait une collusion entre les garde-côtes et les passeurs, sous le regard complaisant du ministère de l’Intérieur.

Chers collègues, tout doit être tenté pour rétablir un Etat de droit véritable en Libye et surtout pour assurer un traitement digne aux migrants permettant le respect de leurs droits fondamentaux. Ces pauvres gens ont véritablement été pris en otage; ils sont tombés dans une nasse, dans le monde de l’horreur. On a ainsi assisté à la renaissance de l’esclavage. Je ferai trois remarques.
Premièrement, la chute de Kadhafi est le résultat d’une opération militaire, essentiellement par voie aérienne, de l’Occident. L’Occident a fait chuter un dictateur mais n’a pas assuré le service après-vente, ce qui a abouti à un Etat failli et au chaos. Cela a également conduit à la déstabilisation d’Etats voisins, notamment au Sahel. En effet, les mercenaires armés jusqu’aux dents de Kadhafi, lorsqu’ils se sont exilés après sa chute, ont apporté des armes et beaucoup de violence dans les pays aux alentours. Les forces occidentales, après leur succès, échaudées par leur expérience en Afghanistan ou en Irak, n’ont pas voulu s’engager dans le bourbier libyen. Toutefois, déstabiliser sans accompagner la reconstruction est une faute morale et politique.

Deuxièmement, l’Europe a délégué à la Turquie et, semble-t-il, à ce qui reste de l’Etat libyen, la responsabilité de bloquer les migrants hors d’Europe. L’Union européenne tend à se replier dans une forteresse, comme l’affirme Mme Van Gulik. Nous ne pouvons certes pas tout faire, comme le disait Lord Anderson, mais nous pouvons en tout cas en faire plus que ce que nous faisons actuellement.

Troisièmement, dans le projet de résolution, au paragraphe 10.2, notre Assemblée salue les initiatives tendant à prévenir l’entrée de migrants en Libye en fermant sa frontière sud dans le Fezzan. Un verrou de plus a donc été posé, ce qui est sans doute logique étant donné la situation en Libye. Toutefois, le défi des migrations africaines, si l’on prend en compte les perspectives démographiques annoncées, reste entier. Il faudra bien s’en occuper un jour, mais c’est un autre débat.

 

Jeudi, 26 avril 2018

Suivi du rapport du Groupe d’enquête indépendant sur les allégations de corruption au sein de l’Assemblée parlementaire (Débat selon la procédure d’urgence) (Doc. 14540, Doc 14543) – Alfred Heer

A. Heer (Suisse) – Everybody knew what was going on in our Council of Europe. The Swiss delegation initiated, with a letter to the Bureau, a request for an independent investigation body to look into the allegations surrounding us. We are pleased with the results of that work. They are not surprising. Our Parliamentary Assembly has been very busy for more than two years now and I am sure that that will continue.

I am sorry to say it, but this report is not the end of the corruption but the beginning of the end of our Parliamentary Assembly. How have I come to this conclusion? The only headlines that the Parliamentary Assembly makes in the media are ones about corruption. Our highly esteemed President from Italy was not re-elected. That is a sign. If a President of our Assembly cannot be re-elected, it reflects the reputation of our Assembly in, for example, Italy. I do not want to use this report to point at a particular member State, as this is a fundamental crisis for our Body as a whole and does not involve just one country or the people mentioned in the report. We can also say that money was taken by people from western countries, from so-called democracies, and that really should give us pause for thought.

Some of us forgot why we are here. We are here on behalf of 800 million people, to protect their rights to free speech, a free media, the separation of powers, the independence of justice, the rule of law, and democracy. We should not defend our governments or our nationalistic views here, as is done all the time. We are here for each and every citizen of our member States, whom we need to protect. I heard some applause in the Chamber this morning for some of the speeches. Today there is no reason for applause, because today is a black day for our Parliamentary Assembly. Let us face it: if each and every one of us is not willing to fulfil his task in an honest, transparent and decent manner, this Assembly will have no future.

Problèmes juridiques posés par la guerre hybride et obligations en matière de droits de l’homme (Doc. 14523, Doc. 14536) – Raphaël Comte (Rapport pour avis)

R. Comte (Suisse) – Chers collègues, il faut rendre à César ce qui est à César, et à M. Ariev ce qui est à M. Ariev! Ce dernier aurait dû vous présenter cet avis. Je vais donc jouer au ventriloque pour dire ce qu’il aurait souhaité vous dire ici.
Permettez-moi de commencer en exprimant le soutien de la commission de la culture au rapport de M. Cilevičs. Notre commission partage pleinement l’idée principale du rapport, à savoir que la question de la guerre hybride et les obligations relatives aux droits de l’homme dans un tel contexte sont devenues d’une actualité brûlante depuis quelques années.
Le rapport souligne, à juste titre, que les adversaires hybrides agissent par-delà les frontières légales et dans des espaces sous-réglementés. Ils exploitent les seuils légaux limitant les ripostes et sont prêts à commettre de graves violations du droit en profitant de l’ambiguïté du droit et des faits.

Parvenir à réglementer la guerre hybride est un défi, et ce pour une raison simple: l’une des parties cherche systématiquement à se soustraire à ses responsabilités légales.

Pour l’instant, l’utilisation du large éventail de moyens hybrides disponibles pour mener un conflit ne fait l’objet d’aucune limitation internationalement reconnue. Les Etats tentent de contrer ces nouvelles menaces à l’aide du droit pénal interne. Le problème est que certaines mesures internes prises pour faire face à des menaces hybrides peuvent, à leur tour, porter atteinte aux droits fondamentaux. A ce propos, les risques éventuels en matière de droits de l’homme peuvent être atténués en adoptant l’approche retenue pour les mesures antiterroristes. Les ripostes des Etats aux menaces hybrides devraient être légales et proportionnées.

Le rapporteur pour avis, M. Ariev, s’est intéressé en particulier à la question de la liberté d’expression. Il est d’accord que certaines restrictions visant à contrôler le contenu des informations peuvent être imposées, en particulier en ce qui concerne le discours de haine. Toutefois, comme le rapport l’indique justement, ces restrictions ne devraient pas être discriminatoires ni entraîner une censure générale. Ce qui rend le problème particulièrement délicat est le fait qu’il n’est pas toujours possible d’identifier l’adversaire hybride et d’attribuer la responsabilité des menaces hybrides à un Etat précis.

Par ailleurs, la «zone grise» juridique qui entoure actuellement les menaces hybrides met aussi en danger la coopération juridique fondée sur la confiance mutuelle et la compréhension commune des règles applicables. Voilà pourquoi la commission partage entièrement le point de vue selon lequel le Conseil de l’Europe doit jouer un rôle de premier plan en soutenant l’élaboration de réponses juridiques communes et en apportant sa grande expertise dans le domaine des droits de l’homme.

La commission de la culture approuve le projet de résolution et de recommandation proposé mais suggère néanmoins de lui apporter quelques modifications pour lui conférer plus de force. J’expliquerai nos propositions ultérieurement.

Lutter contre le crime organisé en facilitant la confiscation des avoirs illicites (Doc. 14516) – Jean-Pierre Grin

J.-P. Grin (Suisse) – Comme l’explique dans son excellent rapport M. van de Ven, la confiscation des avoirs illicites est nécessaire. Elle rend les activités criminelles financières moins rémunératrices, sape le pouvoir conféré aux criminels du fait de leur fortune, les prive des moyens nécessaires au financement de leurs prochains actes criminels ou de corruption. De plus, cette confiscation peut permettre d’indemniser les victimes et la société.

Mais souvent cette confiscation est entravée par la chaîne excessive de la preuve qui pèse sur les autorités nationales compétentes et par l’inefficacité de la coopération entre les autorités des différents pays concernés, ce qui profite aux criminels.
L’efficacité de la coopération internationale à des fins de recherche, de gel et de confiscation des avoirs d’origine criminelle dépend de l’existence d’un cadre juridique adéquat qui garantisse une harmonisation suffisante des procédures, tout en permettant des approches nationales différentes sans aucune discrimination.

Il importe également de mettre en place des règles strictes de contrôle de la provenance des avoir versés sur les comptes.

La Suisse, mon pays, a pris certaines mesures pour éviter de cautionner le placement sur des comptes de l’argent du crime. Les établissements bancaires ont l’obligation de faire ce contrôle pour les sommes de moyenne et surtout de grande importance. Le paiement en argent liquide ne peut s’effectuer que jusqu’à 100 000 francs suisses – montant peut-être trop important, me direz-vous ! Selon des sources dignes de confiance, comparé aux gains gigantesques générés par la criminalité, les avoirs illicites effectivement confisqués par les Etats sont plus que modestes.

Au niveau international et national, il est donc urgent de prendre de nouvelles mesures pour faciliter la confiscation de ces avoirs.

Le projet de résolution issu de l’excellent rapport de notre collègue prévoit une plus grande vigilance quant au contrôle judiciaire, à la réparation du préjudice subi et la promotion de la coopération internationale dans ce domaine.

Les fiduciaires doivent être plus transparentes, car elles peuvent aussi être un des maillons de la chaîne de blanchiment des capitaux, comme également les paradis fiscaux qu’il convient de combattre intensément.

Ces améliorations possibles au niveau aussi bien national qu’international apparaissent dans le projet de résolution, mais il appartient aux parlementaires nationaux que nous sommes de prendre le relais et de promouvoir ces améliorations dans nos pays respectifs. Car au même titre que la corruption, nous devons tous lutter pour confisquer l’argent du crime organisé. La démocratie ne peut pas tolérer cela.

 

Vendredi, 27 avril 2018

La tuberculose pharmaco-résistante en Europe (Doc. 14525) – Pierre-Alain Fridez

P.-A. Fridez (Suisse) – maladie très crainte qui accompagne depuis de nombreux siècles l’histoire des hommes, la tuberculose est devenue, transitoirement, un problème presque secondaire de santé publique à la fin du XXe siècle. Je suis médecin généraliste depuis trente ans: je peux compter les patients atteints de tuberculose, rencontrés dans mon cabinet, sur les doigts d’une main. Sa fréquence a fortement diminué, avec – c’est l’hypothèse originelle - l’introduction dans les années 1920 du BCG, le vaccin de Calmette et Guérin, puis la découverte des premiers tuberculostatiques. Cette hypothèse est aujourd’hui remise en cause, le vaccin étant peu efficace et juste susceptible de réduire le risque de tuberculose miliaire et de méningite tuberculeuse.

Le facteur réel qui a été identifié réside dans l’amélioration des conditions de vie, d’hygiène et d’alimentation, c’est-à-dire globalement l’amélioration du niveau de vie. Il est d’ailleurs intéressant de noter que le nombre de cas de tuberculose par 100000 habitants est un facteur utilisé pour évaluer le niveau de vie d’un pays et l’efficience de son système de santé. La tuberculose est une maladie de la pauvreté, c’est le premier message que je voulais envoyer.

J’ai précisé, au début de mon intervention, que l’amélioration des statistiques des cas de tuberculose n’avait été que transitoire. Le nombre de cas augmente actuellement, pour deux raisons: les brassages de populations, notamment avec les migrations, et le vieillissement de la population, avec des personnes âgées contaminées jeunes, mais dont la maladie n’a pas évolué durant leur vie, et qui, à la fin de celle-ci, du fait d’une baisse de leur immunité pour de multiples raisons – cancers, chimiothérapie, diabète –, redevient active.

Mon deuxième message est que la tuberculose pharmaco-résistante est devenue un problème en Europe. Des réponses médico-sociales claires doivent être apportées: les traitements sont longs et réclament des associations médicamenteuses multiples. Le respect du traitement par les patients et le respect des posologies sont essentiels, au risque de favoriser l’apparition de résistances. Pour cela il faut des moyens, des structures, un suivi. Nos systèmes de santé doivent mettre des moyens clairs à disposition.

Les conditions de vie des malades doivent être améliorées. Ne pas manger, vivre dans des conditions d’hygiène très mauvaises, voilà qui ne favorise pas l’efficacité du traitement. Le dépistage doit être plus efficace chez les personnes âgées. Quand une personne âgée tousse, ne va pas bien ou perd du poids, il faut savoir penser au bacille de Koch, tout comme pour les migrants, qui comptent beaucoup de cas, et les immuno-supprimés, tels les patients malades du VIH.

Mon troisième message est que la pharmaco-résistance ne concerne pas que la tuberculose. L’antibio-résistance est devenue un problème majeur de santé publique, et dans certains hôpitaux, dans certaines unités chirurgicales ou de soins intensifs, on ne sait plus comment traiter certains patients contaminés par des gènes multi-résistants. La raison? Trop de prescriptions, trop d’antibiotiques dans la nature, trop d’antibiotiques dans l’alimentation.

Nous pourrions penser que la solution viendra de nouvelles découvertes: des antibiotiques d’une énième génération. Cependant, je ne crois pas tellement à cette solution, qui ne fait que retarder le problème. Il faut surtout mieux traiter, prescrire à bon escient, libérer notre environnement de ces poisons, ou plutôt réduire leur présence. Pour la tuberculose, sujet de notre débat, il faut respecter les protocoles, surtout dans la durée, et combattre la pauvreté et les problèmes d’accès à l’eau. Une meilleure alimentation et un meilleur accès à l’hygiène ont démontré leur efficacité en Europe au XXe siècle.

L’intégration, l’autonomisation et la protection des enfants migrants par la scolarité obligatoire (Doc. 14524) – Raphaël Comte, Pierre-Alain Fridez

R. Comte (Suisse) – Je tiens, au nom du groupe ADLE, à remercier Mme De Sutter pour son excellent rapport qui dresse un tableau complet de la situation des enfants migrants en matière d’éducation.

Chacun doit être responsable de ses actes, et nul ne doit être tenu pour responsable des actes des autres. Par conséquent, si les parents doivent être responsables de leurs actes, les enfants ne doivent pas être tenus pour responsables des actes de leurs parents. Ils ne doivent donc pas subir de préjudices dans leur éducation du fait que leur situation est éventuellement irrégulière ou qu’ils se trouvent sur les routes, fuyant leur propre pays.

Le droit à l’éducation est un droit fondamental pour tous les enfants, quelle que soit leur situation juridique. Nous devons donc protéger les enfants migrants et faire de l’école un sanctuaire où ils pourront se développer dans les meilleures conditions possibles.

Le paragraphe 6.7 du projet de résolution parle de ces frontières hermétiques qui doivent être tracées entre l’école et les services de l’immigration. En effet, si nous voulons que ces enfants puissent aller à l’école, il faut qu’ils aient l’assurance que les services de l’immigration n’utiliseront pas le fait qu’ils aillent à l’école pour repérer leurs familles et procéder ensuite à des expulsions. Il faut donc, en quelque sorte, que les autorités scolaires soient muettes si elles ont connaissance du cas d’un enfant en situation irrégulière. Les enseignants sont là pour enseigner et non pour jouer les délateurs.

En outre, il est nécessaire d’intégrer le plus possible ces enfants au système scolaire ordinaire. Certes, lorsque ces enfants arrivent, ils rencontrent des défis très importants, notamment dans l’apprentissage de la langue, qui peuvent justifier qu’ils ne soient pas immédiatement intégrés au cursus ordinaire. Toutefois, ils doivent l’être par la suite, car c’est le meilleur moyen pour ces enfants de s’intégrer et de comprendre le mode de vie ainsi que les traditions socio-culturelles du pays d’accueil.

Certains de ces enfants éprouvent non seulement le choc du déracinement, mais aussi un choc culturel, puisqu’ils arrivent dans un pays dont les traditions et le mode de vie sont très différents du leur. Pour qu’ils puissent appréhender ce mode de vie différent, il est essentiel de les intégrer aux classes des enfants qui vivent dans le pays d’accueil.

Enfin, comme l’expose le rapport, les enseignants doivent être conscients des besoins de ces enfants migrants et de l’attention particulière qu’ils requièrent. En effet, ils ont parfois vécu des atrocités, ils ont perdu une grande partie de leur innocence et gardent des séquelles psychologiques. Il est donc nécessaire de les soutenir psychologiquement.

En conclusion, de nombreux instruments juridiques existent qui définissent ce droit à l’éducation. Toutefois, nous ne devons pas en rester aux principes, mais ils doivent être appliqués dans la réalité. La migration est bien sûr un domaine politiquement très sensible, mais lorsqu’il s’agit d’enfants, c’est sans aucun doute le principe d’humanité qui doit prévaloir, comme ce rapport le rappelle fort justement.

 

P.-A. Fridez (Suisse) – Un enfant migrant, quel que soit son statut ou le statut de ses parents, reste avant tout un enfant. L’enfance puis l’adolescence sont normalement des moments privilégiés de la vie, une période de découverte, d’émerveillements et de socialisation, le tout dans un cocon familial aimant et protecteur.

Cet idéal n’est malheureusement pas la règle, même chez nous. Les enfants migrants risquent tout particulièrement, vu le contexte souvent difficile de l’existence de leur famille, de ne pas bénéficier de ces conditions idéales pour se construire et s’épanouir. N’oublions pas non plus leur passé, les traumatismes subis, les plaies qu’ils conservent en silence au plus profond de leur âme; ils ont connu la guerre, vu la mort, subi les privations, assisté impuissants à la souffrance de leurs proches, parfois vécu la promiscuité et la terreur dans une frêle embarcation perdue au milieu des mers. Lorsqu’ils arrivent dans leur pays hôte, cela fait des mois, parfois des années qu’ils n’ont plus connu les bancs d’une école.

Or que nous apprend l’excellent rapport de Mme De Sutter? Que près d’un enfant migrant sur deux dans le monde n’est pas scolarisé. Pourtant, la scolarisation est essentielle pour tous ces enfants: pour réapprendre à vivre une vie d’enfant, tout simplement – jouer dans l’insouciance et la joie –; pour apprendre la langue du pays hôte; pour s’intégrer et jeter les bases d’une formation future, le sésame de leur avenir.

Le rapport de Mme De Sutter a été très favorablement accueilli au sein de la commission, qui vous demande unanimement de soutenir ce texte; pour preuve, aucun amendement n’a été déposé. Nous tenons à féliciter Mme De Sutter et à remercier le secrétariat de la commission, qui, une fois de plus, a fait un excellent travail. Merci à tous pour votre soutien.