Hans Wilhelm Auer, l’architecte du Palais fédéral, s’était fixé pour objectif de construire le bâtiment en faisant appel exclusivement à des artistes et à des artisans suisses et en utilisant uniquement des matériaux suisses. Il affirma avoir atteint cet objectif à 95 %. Les talents pléthoriques d’un artisan anglais du nom de Clement Heaton (1861-1940) prennent une large place dans les 5 % restants.

Du papier peint, par amour

Fils du fondateur de la très réputée fabrique de vitraux londonienne Heaton, Butler & Bayne, le jeune Clement Heaton entreprit plusieurs voyages, dont un en Suisse. Il séjourna dans le Val-de-Travers, où il épousa la fille d’un horloger. La résiliation de son contrat avec Heaton, Butler & Bayne lui imposa d’abandonner son métier de verrier de 1886 à 1904.

Clement Heaton se tourna alors vers le cloisonné, une technique artisanale pour le travail de l’émail, et inventa une machine pour réaliser des papiers peints gaufrés. En 1888, il inaugura un premier atelier à Neuchâtel. En 1895, il entama une collaboration avec le peintre Paul Robert (1851-1923). Ensemble, ils réalisèrent la décoration de la cage d’escalier du Musée des Beaux-Arts – l’actuel Musée d’art et d’histoire – de Neuchâtel. Paul Robert travailla sur les peintures murales, et Clement Heaton sur les éléments décoratifs qui l’entouraient. À la suite de cette réalisation, les deux hommes reçurent de nombreuses commandes en Suisse. Après l’incendie de son atelier de Neuchâtel en 1914, Clement Heaton émigra à New York, où il réalisa les vitraux de nombreuses églises.

 

Clement Heaton (source: «Clement Heaton : 1861-1940 : Londres, Neuchâtel, New York», ouvrage publié en 1996 par les Editions Gilles Attinger et le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel, sous la direction de Nicole Quellet-Soguel et avec le concours de Walter Tschopp)


Les papiers peints

Le Palais du Parlement abrite plusieurs œuvres de Clement Heaton, dont quatre papiers peints ornant les murs des antichambres du Conseil national et du Conseil des États. Ces papiers peints ont été créés en pressant le papier humide sur des rouleaux sertis d’ornements faits de tiges de métal. Ils ont ensuite été colorés à la main.

 

 

Dans l’antichambre du Conseil des États Est - Ouest

 

 

Dans l’antichambre du Conseil national Est - Ouest

 
La croix suisse...

La croix suisse ornant le hall de la coupole, entourée des armoiries des cantons, est une mosaïque de Clement Heaton. Ironiquement, la croix suisse la plus impressionnante du bâtiment n’a pas été créée par un Suisse, mais par un étranger…

 


Les armoiries des cantons...

Les armoiries cantonales sur la façade surplombant l’Aar sont également des mosaïques de Clement Heaton.

 


… et les vases en «ciment Heaton»

Lorsque la Commission fédérale d’art se rendit à l’Exposition universelle de Paris en 1900, elle fit l’acquisition de deux grands vases de Clement Heaton, réalisés selon un procédé basé sur la technique du cloisonné. Cette technique consiste à appliquer des bandelettes métalliques sur un support, à remplir les cloisons ainsi formées de poudre de verre et à cuire l’objet décoré. Heaton a modifié le procédé, en remplissant les espaces vides avec un ciment de son cru, composé de résine, de cire, de pigments et de marbre pulvérisé. Cette masse avait l’avantage de durcir d’elle-même, de sorte que les vases n’avaient pas besoin d’être cuits.

 

  

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