Après deux séances de commission extraordinaires et environ six heures de délibérations, la Commission des finances du Conseil national (CdF-N) présente son modèle de financement de l’armée. S’agissant du montant dont l’armée devrait disposer au cours des quatre prochaines années, elle approuve à la majorité la décision du Conseil des États d’augmenter de 4 milliards de francs le plafond des dépenses défini dans le projet du Conseil fédéral. Le Conseil des États a récemment prévu, dans un arrêté relatif au financement de l’armée, une réduction radicale des dépenses dans d’autres domaines d’activité de la Confédération afin de compenser cette augmentation, sans que ces coupes aient pu être examinées au préalable par sa Commission des finances. Aux yeux de la CdF-N, cette démarche est contestable du point de vue de la politique budgétaire. Sur le fond également, la commission rejette à l’unanimité la solution de compensation du Conseil des États. Dans un corapport à la Commission de la politique de sécurité de son conseil, elle propose de compenser les moyens nécessaires aux investissements d’armement par une diminution de la part cantonale au produit de l’impôt fédéral direct ainsi que par une réduction des dépenses dans le domaine propre de la Confédération et dans la coopération internationale. La CdF-N soumet également ses propositions au Conseil national, qui se penchera sur le projet probablement lors de la session d’automne 2024.

Les principales propositions relatives à certains projets d’arrêtés fédéraux du message sur l’armée 2024 (24.025 é) sont résumées ci-après. Les autres propositions de la CdF-N figurent sur le dépliant du conseil, qui sera publié ultérieurement.

Projet 2 : Arrêté fédéral sur l’acquisition de matériel de l’armée 2024

Par 17 voix contre 8, la CdF-N propose d’approuver le projet. Une minorité propose de réduire de 10 % les crédits d’engagement prévus pour le matériel de l’armée.

Projet 3 : Arrêté fédéral sur le programme d’armement 2024

Par 17 voix contre 8, la CdF-N se prononce en faveur d’un crédit d’engagement de 660 millions de francs pour des systèmes de défense sol-air de moyenne portée, suivant ainsi le Conseil des États. Une minorité propose de biffer ce crédit d’engagement, se ralliant ainsi au Conseil fédéral.

Projet 5 : Arrêté fédéral sur le plafond des dépenses de l’armée pour la période 2025 à 2028

Cet arrêté est celui qui a le plus donné lieu à discussion. À sa première séance consacrée au message sur l’armée 2024, la commission avait demandé à l’administration et aux Services du Parlement de lui fournir des informations complémentaires en vue de l’examen préalable des décisions prises par le Conseil des États. Elle s’est penchée sur celles-ci lors de sa deuxième séance.

Se ralliant à la décision du Conseil des États, la majorité de la CdF-N propose d’augmenter le plafond des dépenses de l’armée de 4 milliards de francs par rapport au projet du Conseil fédéral. À ses yeux, cette augmentation est nécessaire pour réduire plus rapidement l’excédent de planification en matière d’investissements. Elle correspond à un relèvement des dépenses de l’armée à 1 % du PIB d’ici 2030 (et non pas d’ici 2035, comme le Conseil fédéral le prévoyait jusqu’à présent). 

Par ailleurs, la majorité propose que les dépenses d’exploitation de l’armée soient réduites au profit des investissements d’armement, grâce à un accroissement de l’efficacité (art. 1a). Ce transfert de fonds doit être mis en œuvre de manière échelonnée et atteindre 500 millions de francs à partir de 2028. Compte tenu de ce transfert interne, une minorité demande que le plafond des dépenses ne soit augmenté que de 2,8 milliards de francs, afin que l'augmentation totale soit effectivement de 4 milliards de francs, comme souhaité par la majorité (proposition rejetée par 15 voix contre 9 et 1 abstention). Une minorité soutient le projet du Conseil fédéral ; la proposition formulée en ce sens a été rejetée par 16 voix contre 9. Une autre minorité souhaite que l’armée participe aux coupes transversales dans les domaines faiblement liés de la Confédération et veut par conséquent réduire le plafond des dépenses de 1,4 % (proposition rejetée par 17 voix contre 8).

La majorité de la commission propose également, à titre de décision de principe et de planification au sens de l’art. 28 de la loi sur le Parlement, que les ressources nécessaires aux investissements d’armement soient financées par la baisse de la part cantonale au produit de l’impôt fédéral direct et par des compensations dans le domaine de la coopération internationale et dans les charges de personnel de tous les départements (art. 1b). Elle ne s'est toutefois pas prononcée sur la répartition exacte de ces compensations. Une minorité de la commission estime qu’il n’y a pas lieu de préciser dans l’arrêté fédéral sur le plafond des dépenses de l’armée pour la période 2025 à 2028 les domaines dans lesquels les compensations doivent se faire. Selon elle, les décisions nécessaires à cet effet doivent plutôt être prises dans le cadre d’arrêtés fédéraux distincts (proposition rejetée par 14 voix contre 10). Une autre minorité souhaite financer les dépenses supplémentaires uniquement par des recettes supplémentaires (proposition rejetée par 16 voix contre 8 et 1 abstention).

La majorité de la commission soutient, sur le principe, pour diverses raisons, l’augmentation de 4 milliards de francs décidée par le Conseil des États et souhaite fixer un cadre au Conseil fédéral pour la mise en œuvre des dépenses supplémentaires. La minorité critique vertement cette décision, la considérant en partie contradictoire et impossible à appliquer.

En annexe au présent communiqué de presse, la CdF-N publie les décisions de la majorité concernant le plafond des dépenses de l’armée ainsi que deux rapports complémentaires qu’elle avait demandés à l’administration fédérale et aux Services du Parlement dans la perspective de son examen du message sur l’armée 2024.

La commission a siégé les 6 et 13 juin 2024 à Berne, sous la présidence de la conseillère nationale Sarah Wyss (PS, BS) et en présence de représentantes et de représentants du DDPS, du DFF, du DFAE et du DEFR.