La Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-N) a terminé son examen du projet de modification de la loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG ; 25.024). La CPS-N propose à son conseil d’assouplir la LFMG non seulement en ce qui concerne l’exportation de matériel de guerre depuis la Suisse, mais aussi la réexportation de matériel de guerre par les États auxquels il était destiné. Cette décision a été adoptée au vote sur l’ensemble, par 16 voix contre 9. En conséquence, la CPS-N a retiré son initiative parlementaire 23.403.

En ce qui concerne l’exportation de matériel de guerre, la CPS-N avait déjà soutenu, lors de sa séance du mois d’août, la compétence dérogatoire proposée par le Conseil fédéral, qui permettrait à celui-ci, en cas de circonstances exceptionnelles et si la sauvegarde des intérêts du pays en matière de politique extérieure ou de politique de sécurité l’exige, de déroger aux critères d’autorisation pour les affaires avec l’étranger (art. 22b). La CPS-N s’était en outre déclarée favorable à ce que la Suisse puisse livrer du matériel de guerre à des pays dont le régime d’exportation est similaire au sien et qui figurent à l’annexe 2 de l’ordonnance sur le matériel de guerre, même si ces pays sont impliqués dans un conflit armé, pour autant que les intérêts de la Suisse en matière de politique extérieure ou de politique de sécurité n’exigent pas un refus et qu’il n’y ait pas de circonstances exceptionnelles (art. 22a). Lors de la présente séance, la commission a explicitement précisé dans la LFMG que la décision relative à une telle demande d’exportation doit également tenir compte des intérêts de la Suisse en matière de politique de neutralité (art. 22a, al. 2bis).

Concernant la réexportation de matériel de guerre par les États auxquels il était destiné, la commission propose de renoncer désormais en principe aux déclarations de non-réexportation. Le Conseil fédéral doit toutefois pouvoir exiger de telles déclarations de la part des destinataires étatiques lorsque des raisons relevant de la politique extérieure, de la politique de neutralité ou de la politique de sécurité l’exigent. La CPS-N propose en outre qu’il soit en principe également possible de renoncer aux déclarations de non-réexportation pour des pièces détachées et des éléments d’assemblage lorsqu’il est établi que la livraison s’inscrit dans une chaîne de création de valeur internationale (art. 18). Les autres propositions de modification ont été rejetées par la commission.

Au vu de l’aggravation constante de la situation géopolitique, la majorité de la commission est d’avis qu’il est nécessaire de garantir la sécurité de la Suisse et de renforcer durablement la capacité de défense de l’armée suisse. Un élément important à cet égard est le maintien d’une base technologique et industrielle importante pour la sécurité (BTIS) qui soit forte et performante. La révision de la LFMG vise, en facilitant l’exportation de matériel de guerre, à favoriser le développement de la BTIS. Sans une BTIS forte, la majorité craint que la Suisse soit exclue des chaînes d’approvisionnement, de la recherche et de la coopération internationale dans le domaine de l’armement. La minorité estime qu’un assouplissement de la LFMG ne profiterait qu’à la BTIS et ne servirait pas la neutralité de la Suisse, qui doit notamment s’engager pour la paix et la protection des droits humains. Elle relève par ailleurs que l’Ukraine, qui fait usage de son droit de légitime défense selon la Charte des Nations Unies, ne pourrait pas bénéficier de la réglementation proposée.

Étant donné que la réexportation de matériel de guerre doit désormais être réglementée directement dans le projet 25.024, la CPS-N a décidé, par 16 voix contre 9, de retirer son initiative parlementaire 23.403. Compte tenu des décisions susmentionnées, la CPS-N propose également à son conseil, par 16 voix contre 7 et 2 abstentions, de ne pas donner suite à l’initiative parlementaire 24.455, déposée par la conseillère nationale Marionna Schlatter. Cette initiative vise à modifier la Constitution de manière à interdire l’exportation de matériel de guerre. Ces projets seront traités lors de la session d’hiver.

Des compétences claires en matière de protection de l’espace aérien suisse dans les situations en dessous du seuil du conflit armé

La CPS-N critique le fait que la réglementation des compétences face aux menaces aériennes soit lacunaire et constate que ce flou empêche une défense efficace et rapide. Par 13 voix contre 12, elle a déposé une motion (25.4410) qui charge le Conseil fédéral de soumettre au Parlement les modifications nécessaires des bases légales afin de régler clairement les compétences en matière de protection de l’espace aérien en temps normal et en situation extraordinaire.

Modification de la loi sur les armes

À l’unanimité, la CPS-N propose à son conseil d’adopter la motion 25.3256. Cette motion charge notamment le Conseil fédéral de soumettre les plateformes commerciales comme TEMU, Amazon et autres à l’obligation de signaler clairement et distinctement, sur leurs sites, tous les produits interdits en Suisse – comme les armes factices – afin que les consommatrices et consommateurs reconnaissent immédiatement qu’en commandant ces produits, ils enfreignent les dispositions légales de la Suisse. La motion demande aussi un assouplissement de la loi sur les armes afin que les cas d’articles importés de peu de gravité soient punis d’une simple amende, ce qui permettrait d’éviter des procédures pénales lourdes et inappropriées.

Service militaire pour les binationaux

La CPS-N partage l’avis du Conseil des États quant au fait que la participation des binationaux franco-suisses à une « Journée défense et citoyenneté » ne doit plus être considérée comme un service de remplacement au sens de la loi sur l’armée. La commission souhaite que les binationaux ne puissent pas remplir leurs obligations militaires en Suisse par le biais d’un service fictif à l’étranger, et ce, de manière générale et pas seulement en ce qui concerne la France. Par 22 voix contre 3, elle propose donc à son conseil de modifier la motion du Conseil des Etats 25.3037 (Poggia ). Le Conseil fédéral sera chargé de modifier les bases légales pour que, pour être reconnu, le service militaire accompli par les doubles nationaux suisses à l’étranger doive être comparable à celui effectué en Suisse. Ainsi modifié, le texte de la motion correspond à celui de la motion Heimgartner 24.3066, pendante au Conseil national. Dans ce contexte, la CPS-N a également décidé de suspendre le traitement de l’initiative parlementaire Schmid Pascal 24.405 (« Obligations militaires. Non aux privilèges pour les doubles nationaux ! »).

Devoir de diligence de l’armée

Par 17 voix contre 8, la CPS-N propose à son conseil de ne pas donner suite à l’initiative parlementaire 24.482 (Molina). La majorité estime que les bases légales qui règlent le devoir de diligence de l’armée envers les militaires sont suffisantes. Elle salue les mesures prises par l’armée contre la discrimination et les violences sexuelles ainsi que le plan d’action établi. La commission s’attend à ce que ce train de mesures soit mis en œuvre de manière systématique et accompagné de contrôles réguliers. Il n’est donc, selon elle, pas nécessaire de définir plus clairement et d’étendre le devoir de diligence de l’armée envers les militaires, comme le demande l’initiative.

Par 14 voix contre 9, la CPS-N s’est en outre prononcée pour l’application provisoire de l’accord entre la Confédération suisse et l’Union européenne régissant les modalités et conditions de la participation de la Confédération suisse à l’Agence de l’Union européenne pour le programme spatial (accord EUSPA).

Elle a également été informée de la situation actuelle au Proche-Orient et de l’évolution de la guerre en Ukraine, ainsi que de l’état d’avancement des projets les plus importants du DDPS et de l’OFPP.

La commission a siégé les 10 et 11 novembre 2025 à Berne, sous la présidence de la conseillère nationale Priska Seiler Graf (PS, ZH) et, pour partie, en présence du conseiller fédéral Guy Parmelin, chef du DEFR, et du conseiller fédéral Martin Pfister, chef du DDPS.