La Commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats avait déjà entamé la discussion par article de la révision totale de la loi fédérale sur les marchés publics (LMP/17.019) et pris de premières décisions en la matière lors de sa séance du 3 juillet dernier. Elle a maintenant examiné les 37 premiers articles de la loi tout en suspendant, jusqu’à sa séance du 1er novembre, l’examen de l’art. 29 et de l’art. 31, al. 1. Cela lui permettra d’attendre que l’administration ait procédé à des éclaircissements supplémentaires avant de répondre aux questions importantes relatives aux critères d’adjudication et à l’adjudication elle-même (art. 29 et 41).

La Commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) propose les modifications suivantes par rapport à la décision du Conseil national :

  • A l’art. 10, al. 1, let. e, la commission propose, par 10 voix contre 2, de ne pas prévoir d’exception générale pour les organismes d’insertion socioprofessionnelle, se ralliant ainsi au souhait de la Conférence suisse des directeurs des travaux publics, de l'aménagement du territoire et de l'environnement, qui s’oppose à toute réglementation sur ce point. La commission tient ainsi compte du fait que, dans certains cantons, ces organismes procèdent à des appels d’offres publics, tandis qu’ils ne le font pas dans d’autres, alors même que la LMP ne s’applique pas aux organismes cantonaux. La commission ne souhaite en aucun cas imposer une harmonisation aux cantons.
  • A l’unanimité, la commission propose que l’art. 12, al. 2bis, introduit par le Conseil national et prévoyant que l’application d’autres standards internationales du travail importantes – en plus des normes de l’OIT –  puisse être exigée et contrôlée, soit intégré à l’al. 2.
  • La CER-E a par ailleurs décidé, par 10 voix contre 2 et 1 abstention, de proposer la création d’un art. 12a, prévoyant qu’un marché public ne puisse être adjugé qu’aux soumissionnaires (y c. les sous-traitants) qui respectent au moins les prescriptions légales relatives à la protection de l’environnement en vigueur au lieu de la prestation.
  • En ce qui concerne l’art. 20, al. 3, la commission soutient, sans opposition, la décision du Conseil fédéral. Elle ne voit aucune raison d’autoriser le recours à la procédure sur invitation indépendamment de la valeur seuil lors de la délégation de tâches publiques.
  • Par 7 voix contre 5, la commission propose de compléter l’art. 21, al. 3, afin que la procédure de gré à gré puisse être appliquée si elle est indispensable non seulement au maintien d’entreprises suisses importantes pour la défense nationale, mais aussi à celui d’entreprises suisses qui revêtent une grande importance pour la sauvegarde des intérêts publics de la Suisse. Ainsi, la Suisse pourrait soutenir au besoin certaines entreprises.
  • Concernant l’art. 26, al. 1, la commission propose, par 11 voix contre 1, de modifier la formulation de telle sorte que l’adjudicateur ne doive pas se contenter de veiller à ce que les soumissionnaires et leurs sous-traitants remplissent les conditions de participation, mais doive le garantir. La commission est en effet d’avis que les soumissionnaires devraient déclarer que toutes les entreprises concernées remplissent les conditions.
  • l’art. 31, al. 2, la commission a décidé, sans opposition, de proposer le maintien du projet du Conseil fédéral et la pratique en vigueur. C’est la seule manière d’obtenir une harmonisation avec les cantons. Le Conseil national souhaite permettre en principe la participation multiple de sous-traitants à des communautés de soumissionnaires. Le Conseil fédéral, par contre, veut le permettre uniquement si cette participation est expressément admise dans l’appel d’offres.
  • La commission s’est en outre prononcée à l’unanimité en faveur d’un nouvel alinéa (4) à l’art. 37. Cet alinéa dispose que le procès-verbal est rendu accessible à tous les soumissionnaires immédiatement après l’ouverture des offres. C’est la seule façon de s’assurer que la procédure sera transparente et d’empêcher des négociations non autorisées portant sur le prix.
  • Enfin, la commission propose, par 12 voix contre 0 et 1 abstention, d’excepter l’adjudication de mandats à Switzerland Global Enterprise (S-GE) du droit des marchés publics (annexe 7). En revanche, les achats effectués par S-GE continueraient de faire l’objet d’appels d’offres. Cette situation correspond au droit en vigueur.

La commission terminera probablement la discussion par article à sa séance du 1er novembre, puis l’objet sera soumis au Conseil des Etats à la session d’hiver.

2. Aides financières aux organisations de cautionnement en faveur des petites et moyennes entreprises

A l’instar de ce qu’a décidé le Conseil national lors de la session d’automne 2018, la commission propose, à l’unanimité, d’approuver le projet du Conseil fédéral de révision de la loi sur les aides financières aux organisations de cautionnement en faveur des petites et moyennes entreprises (18.024). Cette révision vise principalement à porter les cautionnements de 500 000 francs actuellement à 1 million de francs, conformément à une motion Comte (15.3792) approuvée par le parlement en 2016. La commission estime que ce relèvement permet de renforcer l’instrument du cautionnement, lequel permet à beaucoup d’entreprises d’accéder au crédit. Un plafond de 1 million de francs peut notamment être très utile lorsqu'il s'agit de financer des transmissions ou des successions de PME. La commission propose aussi, par 6 voix contre 5 et 1 abstention, d’approuver l’abrogation de la loi fédérale sur l’octroi de cautionnements et de contributions au service de l’intérêt dans les régions de montagne et le milieu rural en général afin ainsi d’éviter des doublons dans la promotion du système du cautionnement.

3. Le délai d’échange des billets de banque doit être maintenu

La commission a achevé l’examen du projet de modification de la loi fédérale sur l’unité monétaire et les moyens de paiement (18.025) qu’elle avait entamé en juin (cf. communiqué de presse du 19.6.2018). Allant à l’encontre de la proposition initiale du Conseil fédéral, la commission propose à son conseil, par 9 voix contre 3 et aucune abstention, de maintenir le délai d’échange pour les séries de billets de banque rappelées, qui est actuellement de 20 ans. Par contre, elle souhaite que désormais seul un cinquième – et plus la totalité – de la contre-valeur des billets non échangés soit affecté au Fonds suisse de secours pour dommages non assurables causés par des forces naturelles. Un tiers du montant restant doit être versé à la Confédération et deux tiers, aux cantons. Au vote sur l’ensemble, la commission a approuvé le projet par 11 voix contre 0 et 1 abstention. Celui-ci sera examiné par le Conseil des Etats à la session d’hiver.

4. La commission recommande d’approuver la convention BEPS

Par 9 voix contre 0 et 3 abstentions, la commission propose à son conseil d’approuver le projet du Conseil fédéral relatif à la convention BEPS (18.063). Cette dernière doit permettre une adaptation efficace des conventions contre les doubles impositions conclues par la Suisse aux standards minimaux du projet BEPS de l’OCDE, destinés à empêcher l’évasion fiscale des sociétés multinationales. En outre, la Suisse reprend les propositions visant à améliorer l’efficacité des mécanismes de règlement des différends. En réaction aux réserves émises par les cantons lors de la consultation, la procédure d’arbitrage prévue dans le projet ne sera appliquée qu’à partir du moment où la convention aura pris effet. Le Conseil des Etats examinera l’arrêté fédéral portant approbation de la convention BEPS à la session d’hiver.

La commission a siégé les 08 et 09 octobre 2018 à Berne sous la présidence du conseiller des Etats Pirmin Bischof (PDC, SO) et, pour partie, en présence du conseiller fédéral Ueli Maurer.