La commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-E) a approuvé sans modification le projet du Conseil fédéral relatif à l'imposition du couple et qui vise à atténuer la discrimination dont sont victimes les couples mariés à double revenu par rapport aux concubins. La commission a par ailleurs achevé l'examen de la réforme de l'imposition des entreprises, modifiant sur certains points importants le projet du Conseil fédéral. La commission propose de rejeter la motion du Conseil national sur la réorganisation de la promotion de l'image de la Suisse. Partageant l'objectif du Conseil national, la commission préfère laisser plus de marge de manoeuvre au Conseil fédéral dans l'élaboration de son projet.

1. Mesures immédiates portant sur l'imposition des couples mariés (06.037)

La loi fédérale sur l'impôt fédéral direct (LIFD) entraîne une discrimination fiscale, contraire à la Constitution, des couples mariés à deux revenus par rapport aux concubins dans la même situation financière. Cette discrimination touche principalement les couples de la classe moyenne ou de la classe moyenne supérieure dont les conjoints fournissent chacun une grande part du revenu global du couple et totalisent un revenu brut du travail allant de 80 000 à 500 000 francs.

Répondant à de multiples motions transmises parlement, le message du Conseil fédéral a pour objectif d'atténuer la discrimination fiscale, contraire à la Constitution, dont sont victimes les couples mariés à deux revenus par rapport aux concubins dans le cadre de l'impôt fédéral direct. Pour y parvenir, des mesures aisément et rapidement applicables doivent être prises. Le Conseil fédéral propose une solution combinant une hausse de la déduction déjà existante pour couple marié à deux revenus et une nouvelle déduction pour couple marié, qui prendra la forme d'une déduction sociale dont tous les couples mariés pourront en bénéficier.

Pour ce qui est de la déduction pour couples mariés à deux revenus, celle-ci consistera à admettre la déduction d'un montant allant jusqu'à 50 % du revenu le moins élevé des deux époux, avec un plafond de 12 500 francs. La déduction actuelle pour couple à deux revenus de 7600 francs sera conservée en tant que montant minimum. La déduction pour couples mariés sera elle fixée à 2500 francs par couple. Si celle-ci contribuera aussi à réduire le surcroît de charge fiscale que supportent les couples mariés à deux revenus, cet allégement fiscal profitera également aux couples de retraités, aux couples mariés à un seul revenu et aux couples dont les revenus proviennent d'autres sources que d'une activité lucrative.

La solution combinée permettrait de supprimer la discrimination fiscale existant par rapport aux concubins pour quelque 160 000 couples mariés à deux revenus, soit pour 66 % des couples concernés. Pour les quelque 80 000 couples mariés à deux revenus restants, le surcroît de charge fiscale, contraire aux principes constitutionnels, ne serait toutefois qu'atténuée.

A la différence de la solution qui avait été envoyée en consultation et qui prévoyait une augmentation plus importante de la déduction pour couples mariés à deux revenus sans la nouvelle déduction pour couples mariés, la solution actuelle du Conseil fédéral doit permettre de maintenir dans les limites du raisonnable la différence de charge fiscale entre les couples mariés à un revenu et les couples mariés à deux revenus.

Les mesures immédiates doivent entrer en vigueur au 1er janvier 2008. Leurs effets devraient commencer à se faire sentir, pour les contribuables, au plus tôt à partir de 2009.

Les diminutions de recettes escomptées suite à l'augmentation de la déduction pour couple marié à deux revenus et à l'application de la nouvelle déduction pour couple marié sont de l'ordre de 650 millions de francs (dont 540 millions seront à la charge de la Confédération et 110 à celle des cantons).

Partageant totalement le but du Conseil fédéral de supprimer ou du moins atténuer la discrimination des couples mariés, la commission est entrée en matière sans opposition sur le projet du Conseil fédéral.

Lors de l'examen de détail, deux points ont fait l'objet de discussion. D'une part, une proposition de supprimer la déduction pour couples mariés a été déposée en commission. Selon son auteur, cette déduction ne se justifiait pas puisqu'elle n'était pas exclusivement ciblée sur les couples victimes de la discrimination visée, à savoir les couples à double revenu. D'autre part, la commission a discuté d'une proposition allant dans un sens inverse et qui visait à augmenter à 3'500 francs la déduction pour couple marié et réduire en conséquence celle pour les couples à deux revenus (abaissement du plafond à 10'500). Selon les défenseurs de cette modification, il s'agissait notamment d'amoindrir les inégalités créées par la déduction pour double revenu entre les couples à un revenu et ceux à deux revenus.

Lors des votes, la première proposition a été refusée par 7 voix contre 5 et 1 abstention. La seconde a été rejetée par 8 voix contre 5. Lors du vote sur l'ensemble, la commission a donc approuvé sans modification le projet du Conseil fédéral, et ce à l'unanimité.

La majorité de la commission a estimé que le projet du Conseil fédéral constituait un optimum qui supprimait au mieux la discrimination dont sont victimes les couples à deux revenus par rapport aux concubins sans pour autant créer d'inégalités trop fortes entre les couples à un revenu et ceux à deux revenus. La solution était également celle qui, par rapport à d'autres solutions ayant le même effet sur la discrimination des couples par rapport aux concubins, coûtait le moins en termes de pertes fiscales.

Enfin, la commission a estimé que la solution du Conseil fédéral était préférable puisqu'elle ne préjugeait pas de la réforme future du couple et de la famille. Elle permettra en effet au Parlement de décider librement du choix d'un nouveau système (imposition individuelle ou splitting), ce lorsque le Conseil fédéral lui soumettra prochainement un arrêté lui permettant de prendre une décision de principe sur le système fiscal à appliquer.

Le projet de loi sera traité au Conseil des Etats lors de la prochaine session.

2. Loi sur la réforme de l'imposition des entreprises projet 1 (05.058)

La commission a continué ses travaux sur la réforme de la fiscalité des entreprises.Cette révision complexe du point de vu technique et sensible du point de vu politique a pu être terminée après une deuxième lecture de la part de la commission.

La CER -E s'est occupée à nouveau de la question de la double imposition économique. Conformément au concept du Conseil fédéral, et contrairement à ce qu'elle avait décidé dans une précédente séance, la commission a reconnu la nécessité d'introduire un taux d'imposition différencié entre fortune privée et fortune commerciale. Pour cette raison la commission propose, par 5 voix contre 4 (et 2 abstentions), que les distributions de bénéfices de la fortune privée ne soient ajoutées aux autres revenus imposables qu'à hauteur de 60 pour cent. Pour l'impôt fédéral direct dans le cadre de la fortune commerciale, la Commission estime adéquate (par 8 voix contre 3) l'imposition partielle à raison de 50 pour cent des dividendes, des parts de bénéfices, des excédents de liquidation et de tout autre avantage.

En matière de commerce quasi-professionnel des titres, la commission propose à son conseil de modifier l'art. 8 al. 2bis de la « Loi sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes ». La formulation proposée est la suivante :

"Les bénéfices provenant de l'aliénation de titres et d'autres placements financiers qui ne proviennent pas de la fortune qui est en rapport fonctionnel avec une exploitation dirigée par le contribuable ne constituent pas des revenus d'une activité lucrative indépendante. Exceptionnellement, l'achat et la vente de titres constituent une exploitation commerciale si le produit de leur vente est supérieur à 500 000 francs par an pendant deux années fiscales consécutives et si la somme des achats et des ventes effectués chaque année fiscale équivaut au moins à quatre fois la valeur des titres détenus au début de l'année fiscale. Les titres et les placements financiers qui ont été détenus pendant plus de quatre ans ne sont pas pris en compte."

La CER-E a pris aussi des mesures en faveur des sociétés de personnes, en particulier en matière de bénéfices de liquidation.

Cette révision sera donc traitée au Conseil des Etats lors de la prochaine session d'été.

3. Mo. CER-CN Réorganisation de la promotion de l'image de la Suisse (06.3008)

En réponse à deux postulats déposés par les CER (04.3434 et 04.3199) et transmis par le parlement, le Conseil fédéral a élaboré un rapport sur la coordination de la promotion de l'image de la Suisse

Lors de l'examen de ce rapport, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national avait élaboré une motion de commission aux termes de laquelle le Conseil fédéral est chargé, au cours d'une première étape, de créer deux sociétés : l'une couvrira le domaine de la promotion du commerce extérieur (Osec, SOFI, SIPPO), tandis que l'autre regroupera les organisations qui oeuvrent à la promotion de l'image de la Suisse (Présence suisse, Tourisme suisse, Location: Switzerland). Ces mesures doivent permettre de réaliser des économies de l'ordre de 20 %, surtout dans le domaine administratif. Au cours d'une deuxième étape, il conviendra de déterminer s'il y a lieu ou non d'intégrer d'autres activités au domaine de la promotion de l'image de la Suisse.

Lors de la session de mai 2006, le Conseil national a approuvé cette motion à une majorité de 2 contre 1.

Lors de l'actuelle séance, la CER-E s'est saisie à son tour de la motion. A l'unanimité, la commission propose à son conseil de rejeter la motion. La commission partage certes totalement les objectifs visés par la motion, à savoir le regroupement des activités relatives à la promotion de l'image de la Suisse afin d'en renforcer l'efficacité.

La commission estime toutefois le texte de la motion beaucoup trop détaillé. La commission veut laisser le Conseil fédéral la marge de manoeuvre nécessaire lors de l'élaboration du projet de loi afin de décider si la variante choisie par le Conseil national - qui correspond plus ou moins à la variante « intégration du domaine central» contenue dans le rapport du Conseil fédéral) - ou si une autre - à savoir la variante « intégration du domaine élargi » contenue dans le rapport et qui vise à une intégration également d'organismes tel que Pro Helvetia, l'OSEC ou encore les organismes de vente de produits agricole - n'est pas préférable.

La commission ne craint donc pas que ce rejet enlève de la pression au Conseil fédéral pour amener ses propositions. En effet le parlement a limité à fin 2007 le financement de certaines de organisations concernées (Suisse Tourisme, Location Switzerland, OSEC), de sorte que le Conseil fédéral se devra de présenter son nouveau concept au moment de renouvellement du financement des ses organismes.

La motion sera traité au Conseil des Etats lors de la prochaine session.

La commission a siégé le 26 mai 2006 à Berne, sous la présidence du conseiller aux Etats Germann (UDC, SH) et en partie en présence du conseiller fédéral Hans Rudolf Merz.

Berne, le 26.05.2006    Services du Parlement