Union interparlementaire
4e Conférence mondiale des présidents de Parlement
New-York, 31 août – 2 septembre 2015

Contribution de Stéphane Rossini, Président du Conseil national

Les paroles prononcées font foi.

 

La démocratie et son élargissement sont au cœur des ambitions d’un nombre sans cesse croissant de pays. Ce progrès indéniable renforce les Droits de l’Homme, intègre la diversité des sociétés aux décisions et favorise la paix. Cependant, pour accéder à des formes plus abouties, les démocraties devront désormais intégrer les dynamiques de partage des pouvoirs et les règles de transparence. Ce sont là les conditions d’une bonne gouvernance et du rapprochement entre institutions et population.

Les déclinaisons de la démocratie et les mécanismes institutionnels dépendent certes de l’évolution historique de chaque Etat. Cependant, pour qu’une démocratie soit saine et durable, elle doit impérativement associer à la pratique du pouvoir la société civile. Celle-ci ne saurait en effet se concevoir de manière restrictive, comme un seul corps électoral, exclusivement destiné à désigner les autorités habilitées à gouverner. A cet égard, le «modèle» suisse de démocratie directe permet de tirer des enseignements précieux. Il est la preuve par l’acte de l’intérêt prépondérant d’associer au pouvoir la société civile.

La société civile, c’est d’abord le Peuple citoyen, qui élit et qui vote. Peuple qui peut par ailleurs imposer une initiative populaire constitutionnelle ou un référendum législatif. Cela se produit chaque année pour plusieurs dizaines d’objets aux trois niveaux institutionnels que sont la Confédération, les cantons et les communes.

La société civile, ce sont aussi des milliers d’organisations: politiques, culturelles, économiques, sociales, professionnelles, régionales, confessionnelles ou sportives. Elles sont une forme de structuration démocratique de la société. La population y exerce l’apprentissage du débat, de la prise de décision et de la gouvernance. Et, surtout, elles participent au fonctionnement des institutions politiques.

En effet, ces organisations collaborent avec les autorités pour l’élaboration des lois, leur application et leur évaluation. Concrètement, aucune modification constitutionnelle ou législative n’est entreprise sans procédure formelle «de consultation» des acteurs de la société civile. Gouvernement et Parlement intègrent ensuite ces prises de position dans l’élaboration des lois. Et si, en fin de processus, les acteurs sont insatisfaits, ils peuvent saisir le référendum pour imposer un débat public et un vote populaire.

Une telle démarche suppose un haut degré de responsabilité et d’engagement citoyen. Dans cette perspective, les acteurs de la société civile apparaissent non seulement comme les défenseurs d’intérêts particuliers, mais aussi comme les acteurs de l’application des lois, dans un Etat fondé notamment sur le principe de subsidiarité.

Enfin, le partage des pouvoirs suppose des relations étroites entre Gouvernement et Parlement. En Suisse, la définition d’objectifs gouvernementaux et les processus de surveillance parlementaire concrétisent cette culture de collaboration et de transparence. Chaque année, le Gouvernement publie l’état de réalisation de ses objectifs. Des indicateurs sont présentés pour tous les champs de l’activité étatique. Le Parlement, après analyse des rapports et audition de ses Ministres, accepte ou refuse la gestion gouvernementale de l’Etat. Il formule des critiques ou des suggestions, entreprend des audits ou des évaluations.

En conclusion, pour toutes les démocraties, peu importe leur niveau d’évolution, le défi majeur sera celui du partage des pouvoirs et de l’intégration effective de la société civile à la (bonne) gouvernance de l’Etat. Donner simultanément aux citoyens et aux acteurs institutionnels les clés de la construction du Vivre ensemble, tel est le gage de qualité et de durabilité de nos démocraties.