La commission a pris connaissance du rapport sur les résultats de la consultation relative aux deux initiatives parlementaires déposées par l’ancien conseiller national Hans Egloff, à savoir les initiatives 16.451 (« Bonne foi dans le droit du bail. Contestation du loyer initial limitée aux cas dans lesquels le locataire a conclu le bail par nécessité ») et 17.493 (« Loyers usuels dans la localité ou dans le quartier. Instaurer des critères à valeur probante), et a débattu de la suite à donner à ces deux objets.
À l’instar de plusieurs participantes et participants à la consultation, la commission est d’avis que les objectifs des initiatives parlementaires portent sur des aspects différents du droit du bail. Elle a donc décidé de les mettre en œuvre dans deux projets distincts. La commission a constaté qu’il était véritablement nécessaire d’intervenir dans le domaine de la fixation des loyers. En effet, la législation actuelle donne lieu à une grande insécurité juridique et favorise de longues procédures qui entraînent une lourde charge administrative pour les parties au litige et les autorités de conciliation. La commission s’est par ailleurs demandé si les initiatives parlementaires devaient être mises en œuvre conformément à leur texte initial ou selon une variante qui avait aussi été proposée dans le projet mis en consultation. Pour les deux objets, la commission a opté pour une mise en œuvre reposant sur le texte de l’initiative (par 16 voix contre 9 en ce qui concerne la contestation du loyer initial et par 15 voix contre 9 pour ce qui est des loyers usuels dans la localité ou le quartier). La commission se félicite ainsi de ce que le loyer initial ne peut plus être contesté que lorsque la locataire ou le locataire a été contraint de conclure le bail par nécessité personnelle ou familiale. Elle approuve également les diverses spécifications proposées concernant les loyers usuels dans la localité ou le quartier. Ces précisions doivent permettre de prouver plus facilement que le loyer d’un objet correspond à celui d’objets comparables et n’est donc pas abusif. Le nombre d’objets requis pour établir la comparaison pourra ainsi être réduit et les statistiques établies par la branche pourront être autorisées comme moyen de preuve.
Plusieurs propositions de minorité ont été déposées. Elles demandent notamment au conseil de ne pas entrer en matière sur les deux projets et de mettre en œuvre les initiatives parlementaires selon les variantes mises en consultation, qui tiennent comptent des intérêts tant des locataires que des bailleurs.
Le Conseil national devrait se pencher sur les projets adoptés à la session de printemps 2025.
Défauts de construction : maintenir le modèle du Conseil national
La commission s’est penchée sur les décisions du Conseil des États concernant le droit de garantie en cas de défauts de construction (22.066). Par 17 voix contre 7 et 1 abstention, elle propose de maintenir le modèle du Conseil national selon lequel les défauts peuvent être signalés en tout temps pendant le délai de prescription. Elle a toutefois décidé, par 15 voix contre 9, de conserver la durée actuelle du délai de prescription, qui est de 5 ans, et de ne pas le porter à 10 ans, comme cela était initialement prévu. Une minorité de la commission propose à son conseil de se rallier au Conseil des États et de prévoir un délai de 60 jours pour signaler les défauts. La CAJ-E procèdera à l’élimination des divergences au prochain trimestre.
Violence envers les femmes
La commission a procédé à l’examen préalable de deux initiatives parlementaires, déposées par la conseillère nationale Céline Amaudruz, qui soulèvent la question de la fixation des peines en cas d’infraction grave. Par 11 voix contre 4 et 10 abstentions, elle parvient à la conclusion que la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle la durée « relativement courte » d’un viol peut être prise en considération dans la fixation de la peine (arrêt 7B_15/2021, 7B_16/2021) doit être corrigée par le législateur (23.479). À l’une de ses prochaines séances, elle examinera en outre si les règles régissant la fixation des peines en cas d’infraction graves commises dans le contexte de la violence domestique doivent être adaptées, comme le demande l’initiative 23.480.
Inscrire le pédopiègeage en ligne et le cyberharcèlement dans le droit pénal ?
La commission a pris connaissance du rapport du Conseil fédéral du 8 décembre 2023 sur les mesures pour lutter contre la violence sexuelle à l’égard des enfants sur Internet et la diffusion en temps réel de pornographie infantile, établi en réponse aux postulats 19.4016 (Feri) et 19.4105 (Regazzi). Dans le cadre du projet de révision du droit pénal en matière sexuelle (18.043, projet 3), le Conseil des États a plusieurs fois refusé d’inscrire de nouvelles infractions concernant le pédopiègeage en ligne ou le cyberharcèlement dans le droit pénal, comme le Conseil national l’avait proposé afin de mettre en œuvre deux initiatives parlementaires (18.434 et 20.445). La commission examinera comment les objectifs de ces initiatives peuvent malgré tout être atteints et mènera des auditions à ce sujet à l’une de ses prochaines séances.
Autres décisions :
- Par 13 voix contre 9 et 2 abstentions, la commission propose de ne pas donner suite à une initiative parlementaire de la conseillère nationale Sophie Michaud Gigon qui vise à introduire un statut juridique facultatif « Entreprise durable » pour les PME suisses (23.454). À ses yeux, il convient notamment, avant de se prononcer, d’attendre que le Conseil fédéral ait rendu son rapport en réponse au postulat 23.4062 « Aider les PME suisses à appliquer les directives ESG ». Une minorité est favorable à l’objectif de l’initiative et propose d’y donner suite.
- La commission propose par 17 voix contre 3 et 2 abstentions de classer l’initiative parlementaire (Rickli) Rutz Gregor 18.467 (« Les mariages d’enfants ou de mineurs ne doivent pas être reconnus en Suisse »).
- Après avoir pris acte du rapport établi par le Conseil fédéral en réponse au postulat Caroni 20.4399 « Modernisation de la loi sur le Tribunal fédéral », la commission propose à l’unanimité d’approuver la motion éponyme 24.3023 de sorte à ce que les modifications d’ordre technique proposées dans le rapport puissent être rapidement mises en œuvre. Cette « petite » révision permettra d’améliorer la situation juridique, sans toutefois résoudre la question de la surcharge, qui sera rediscutée ultérieurement.
La commission a siégé les 15 et 16 août 2024 à Berne, sous la présidence du conseiller national Vincent Maitre (M-E/GE).