Chers Collègues,
La Confédération fête aujourd’hui son 165e anniversaire !
Sans doute avez-vous remarqué l’élégante plaque de marbre noir qui orne la façade principale du Palais du Parlement. Une date y est gravée : « 1848 ».
Cette plaque surplombe une figure féminine, appuyée sur une épée, et qui tient une branche d’olivier dans la main gauche. Elle représente la paix et rappelle le jour où nos prédécesseurs de la Diète, - nos « pères », puisque les femmes n’étaient pas encore habilitées à voter - ont mis en vigueur la première Constitution fédérale. Il y a 165 ans de cela.
Die NZZ schrieb damals euphorisch: Am 12. September 1848 gleich nach 1 Uhr verkündete der Kanonendonner die frohe Botschaft, dass der neue Bund angenommen worden ist. Das Herz wogt höher. Die Schweizernation ist endlich zum Wort gekommen, sie hat ihr gebührendes Stimmrecht erhalten.
Die Nation bisher nur in den Herzen der Besseren lebend, steht nun da in unbestreitbarer Wirklichkeit, mit ausgedehnten Vollmachten ausgerüstet.
Avant de quitter le Parlement fédéral, l’ancien conseiller national Hans-Jürg Fehr a proposé au Bureau du Conseil national de marquer le 12 septembre la fondation de la Suisse moderne. Nous nous associons volontiers à la démarche de notre Chambre-sœur.
La Confédération helvétique est chronologiquement la deuxième fédération d’Etats après celle des Etats-Unis d'Amérique. Le bicaméralisme qui repose sur la Constitution de 1848 reste – malheureusement - un modèle minoritaire dans le monde. Ainsi, seuls 17 Etats européens sur 47 l’ont adopté.
Et le bicaméralisme parfait de la Suisse est un cas unique sur le Vieux Continent. Un conseil ne peut pas prendre l’ascendant sur l’autre ni imposer sa volonté ou sa vision des choses: le Conseil national et le Conseil des Etats sont condamnés à s’entendre s’ils veulent promulguer une nouvelle loi. Ce modèle est unique en Europe.
Chers Collègues,
Notre bicaméralisme est une grande richesse, vous en conviendrez. Les décisions politiques sont examinées en profondeur par les deux conseils et les enjeux sont envisagés à long terme. Le Parlement peut ainsi se libérer, dans une large mesure, de la pression de l’actualité politique.
Et puis, la Chambre Haute reflète une dimension particulière de la cohésion nationale: celle des cantons. Et oui : notre conseil est le digne successeur de la Diète, dont les membres étaient envoyés par les cantons. (Il faudra du reste attendre la révision de la constitution fédérale en 1874 pour que les conseillers aux Etats soient tous élus, en bonne et due forme, par le peuple.)
Les délégations étrangères sont toujours frappées lorsqu’on leur dit que dans notre Sénat, le canton d’Uri avec ses quelque 37.500 habitants a le même poids que le canton de Zurich, dont la population dépasse 1,4 million d’habitants.
Le Conseil des Etats reflète la volonté d’unité dans la diversité de la Suisse moderne, comme du reste son homologue le Conseil national. Certaines voix prétendent que notre système politique coûte trop cher et voudraient y renoncer. Ce genre de réflexion conduit à une impasse. Si l’on voulait vraiment faire des économies, il faudrait supprimer la Chambre du peuple…
Le Conseil des Etats jouit d’une très forte légitimité et son histoire recoupe celle de l’histoire suisse. Il suffit pour s’en convaincre de parcourir les dates gravées dans les boiseries de cette salle.
Nous honorons les Waldstätten et le Pacte des Trois Confédérés. A partir de 1291, de nombreux territoires s’émancipent pour se joindre à l’alliance défensive des trois républiques paysannes alpines – Uri, Schwyz et Unterwald (aujourd’hui Nidwald). Puis des villes les rejoignent : Lucerne, et la prospère Zurich, puis Zoug et Glaris.
La Confédération prend son essor en 1353, lorsque la puissance militaire européenne de Berne entre dans la Confédération des huit cantons. Fribourg, Soleure, Bâle et Schaffhouse se joignent bientôt à l’alliance. Après l’entrée du 13e membre, Appenzell, en 1513, la Réforme met un frein à l’extension de l’ancienne Confédération.
En 1798, la Suisse passe sous tutelle française et Napoléon transforme les anciens baillages et territoires alliés en six nouveaux cantons: Vaud, le Tessin, Argovie, Thurgovie, Saint-Gall et les Grisons.
A la chute de Napoléon, en 1815, lors du congrès de Vienne, la frontière suisse est déplacée vers l’Ouest : viennent s’ajouter le Valais, Neuchâtel et Genève. Le Jura est attribué au canton de Berne. L’appartenance religieuse provoque la division du canton d'Appenzell en 1597. Les parties rurale et citadine de Bâle se séparent quant à elle en 1833. Les Jurassiens qui ne se sentent pas tous bernois créent un nouveau canton qui entre dans la Confédération en 1978.
Cette petite chronologie (ces dates) nous rappelle que les cantons ont choisi de déléguer une partie de leur pouvoir à l’Etat fédéral pour devenir les piliers de la Suisse moderne.
Je vous remercie de votre attention.