(ats) Les victimes de placements abusifs doivent recevoir une contribution financière. Après le National, le Conseil des Etats a approuvé jeudi le contre-projet indirect à l'initiative populaire sur la réparation. Les initiants devraient retirer leur texte.

Les sénateurs ont soutenu le contre-projet par 36 voix contre une, celle de Werner Hösli (UDC/GL). Le droit actuel n'est pas là pour juger le passé, de surcroît sans égard aux conditions très difficiles d'une époque où les enfants placés de force n'étaient pas les seules victimes de mauvais traitements", a-t-il martelé, en vain.

"Notre responsabilité n'est pas de juger les actes du passé, mais de reconnaître une injustice faite à des victimes qui vivent encore aujourd'hui", a rétorqué la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga. Le contre-projet du Conseil fédéral est donc "fondé sur le présent, et on ne doit plus attendre pour aller de l'avant".

Et d'affirmer que si le référendum n'est pas demandé et que l'initiative est retirée, le contre-projet pourrait entrer en vigueur au début d'avril 2017. Soit de toute façon beaucoup plus vite que l'initiative, ont relevé Anita Joachim Eder (PLR/ZG). Un fait appréciable pour nombre de ces victimes déjà âgées.

Les montants qui seront versés sur demande ne sont pas des indemnités et ne fonctionnent pas à titre de réparation pour tort moral, a précisé la première. Ces contributions espèrent compenser quelque peu les fautes massives commises par l'Etat. Elles sont aussi "un avertissement pour le futur" qui met en exergue "un chapitre noir de l'histoire suisse", a dit Paul Rechsteiner (PS/SG).

Fonds de 300 millions

L'initiative sur la réparation demande la création d'un fonds de 500 millions de francs pour les victimes des mesures de coercition prises à des fins d'assistance avant 1981 en Suisse. Des enfants ont par exemple été placés de force dans un home ou une famille, des personnes ont été internées par décision administrative et d'autres ont été stérilisées de force ou données à l'adoption.

Le texte exige aussi une étude scientifique approfondie et un débat de société sur ce pan sombre de l'histoire helvétique. Le contre-projet indirect reprend ces deux mesures, mais propose une enveloppe de 300 millions, permettant aux bénéficiaires de toucher en moyenne 20 à 25'000 francs chacun.

La somme ne pourra pas être supérieure: les Chambres ont fixé ce plafond dans la loi. "Ces 300 millions permettent de prévenir une compensation qui serait peut-être, en fin de compte, plus élevée", a concédé l'indépendant schaffhousois Thomas Minder. Il s'agit d'un minimum pour les enfants placés de force, une solution "pragmatique et convenable", a insisté de son côté Stefan Engler (PDC/GR).

Des efforts récents

Le contre-projet prévoit encore que les moyens ne seront attribués que sur demande et uniquement aux personnes directement et gravement touchées. Les créances en lien avec les mesures de coercition seront annulées lors de l'entrée en vigueur de la loi.

Ces dernières années, des efforts en vue de la réhabilitation des victimes de placements abusifs ont été faits. Un fonds d'aide immédiate a été créé par la Confédération: jusqu'ici, 8,7 millions de francs ont été versés, a rappelé Claude Janiak (PS/BL). Mme Sommaruga a aussi demandé pardon au nom du Conseil fédéral et une loi reconnaissant l'injustice est entrée en vigueur en 2014.

L'initiative, déposée en décembre 2014 avec plus de 110'000 signatures, émane d'un comité interpartis réuni autour de l'entrepreneur Guido Fluri, avec des associations de personnes concernées et le magazine alémanique Beobachter. Les initiants ont confirmé jeudi leur intention de retirer leur texte, estimant le contre-projet "acceptable" même si moins d'argent est proposé.