(ats) Le rejet de la loi sur le CO2 ne doit pas empêcher la Suisse de poursuivre ses objectifs climatiques. Le National a décidé mercredi de prolonger plusieurs mesures jusqu'à fin 2024.

"Le projet vise à éviter un vide juridique", a relevé Jacques Bourgeois (PLR/FR) pour la commission. "Sans lui, nous ne disposons par exemple plus de base légale pour fixer des objectifs climatiques nationaux." Des mesures incontestées, mais limitées jusqu'à 2021, doivent être prolongées trois ans supplémentaires.

Réduction de 1,5% par an

Elément central, l'ampleur de la réduction des émissions a été vivement discutée. La loi en vigueur exigeait une diminution de 20% par rapport à 1990 d'ici 2020, et une réduction annuelle supplémentaire de 1,5% en 2021. Le projet propose de continuer ainsi les trois années suivantes pour atteindre 26% en 2024.

La droite a tenté de porter le seuil à 21,5% et de supprimer l'obligation d'effectuer trois quarts des réductions en Suisse. "Il faut établir des objectifs réalistes qui peuvent être atteints", a argumenté Matthias Samuel Jauslin (PLR/AG). "Ce serait un mauvais signal", a contré la ministre de l'environnement Simonetta Sommaruga. "A partir de 2024, il faudrait alors réduire encore plus vite. Cela coûterait encore plus cher à l'économie."

La gauche et les Vert'libéraux ont eux voulu maintenir la possibilité d'une réduction supplémentaire de 20%, dont 75% peuvent être réalisées par des mesures prises à l'étranger. "Le Conseil fédéral aurait ainsi plus de latitude", a souligné Isabelle Chevalley (PVL/VD). Et la Vaudoise d'appeler à prolonger le droit actuel, et non faire un pas en arrière. Aucune des deux propositions n'a remporté de majorité.

Le camp rose-vert aurait également souhaité l'introduction d'un programme d'investissement pour la protection du climat, si les objectifs n'étaient pas atteints en moyenne. Il n'a pas eu plus de succès.

Compensation des importateurs

Les importateurs de carburant continueront eux de devoir compenser les émissions de CO2. Le Conseil fédéral pourra à l’avenir définir le taux de compensation sur la base de la seule évolution des émissions de CO2 dans les transports.

Comme auparavant, les importateurs pourront répercuter jusqu'à 5 centimes par litre de carburant sur les consommateurs. L'UDC a plaidé en vain pour plafonner le supplément à 1,5 centime, suggérant même qu'elle pourrait lancer le référendum si sa volonté n'était pas respectée.

La conseillère fédérale s'est opposée à ce pas en arrière par rapport au droit en vigueur. Interrogées sur le sujet, les branches concernées ont indiqué pouvoir vivre avec cette mesure. "Il n'y a aucune raison de la modifier."

Taxe remboursée sous condition

Certaines entreprises pourront également continuer à se faire rembourser la taxe sur le CO2, si elles s'engagent à réduire leurs émissions de 2% supplémentaires par an. Le montant maximal de cette taxe a fait l'objet de joutes entre gauche et droite.

Les premiers ont estimé qu'il devait être porté à 145 francs par tonne de CO2 dans le cas où les objectifs intermédiaires fixés pour les combustibles ne seraient pas atteints. Les seconds ont plaidé pour en rester à la loi en vigueur, soit un montant de 120 francs. Ils ont eu gain de cause.

Suivant une proposition individuelle de Fabio Regazzi (Centre/TI), les députés ont par ailleurs accepté de prolonger les conventions d'objectifs avec les organisations existantes. Les partenariats public-privé ont permis à l'économie d'atteindre ses objectifs climatiques, a souligné le Tessinois dans une explication écrite.

Nouvelle loi espérée rapidement

Le camp rose-vert a encore tenté de repêcher plusieurs éléments du projet de révision totale de la loi sur le CO2, rejeté en votation populaire le 13 juin. Il s'agit notamment de la taxe sur les vols d’affaires et privés et du contrôle des risques financiers climatiques par la FINMA et la BNS.

Les incitations volontaires ne sont pas suffisantes, a critiqué Delphine Klopfenstein Broggini (Vert-e-s/GE). Le changement climatique est une réalité. Il doit être contré rapidement. "Nous n'avons plus beaucoup de temps", a soutenu Martina Munz (PS/SH).

Les nouveaux éléments doivent être abordés lors de la prochaine grande discussion sur le climat, qui arrivera bientôt notamment lors d'un éventuel contre-projet à l'initiative sur les glaciers, leur a opposé Nicolo Paganini (Centre/SG). Et de plaider avec succès aux côtés de plusieurs orateurs de droite pour le "statu quo".

La solution transitoire, adoptée par 143 voix contre 53 au vote d'ensemble, devrait expirer à la fin de l'année 2024. "Nous aurons ainsi le temps de mettre sous toit une nouvelle révision de la loi sur le CO2 cette législature encore", a pointé Jacques Bourgeois (PLR/FR). Simonetta Sommaruga a promis un projet l'année prochaine. "Les mesures de la solution transitoire ne sont de toute manière pas suffisantes pour arriver au but de 50% de réduction en 2030."

Le Conseil des Etats doit maintenant empoigner le dossier.