Les substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) forment un groupe de plusieurs milliers de composés chimiques. On les trouve partout, dans les objets de notre vie quotidienne mais aussi dans les sols, les nappes phréatiques, l'alimentation.
Selon les experts, une concentration trop élevée peut être nocive pour la santé humaine, avec des effets cancérogènes et perturbateurs pour le système endocrinien, a rappelé le rapporteur de commission Nicolas Kolly (UDC/FR) en ouverture de la session extraordinaire consacrée aux PFAS.
Mardi, le National a empoigné pas moins de huit motions visant à serrer la vis à ces produits. Par 129 voix contre 61, il en a notamment accepté une demandant au Conseil fédéral de fixer des valeurs limites pour les PFAS dans l'environnement.
La motion, déjà acceptée au Conseil des Etats mais modifiée, avait été déposée après les révélations sur la présence de teneurs trop élevée en PFAS dans la viande et le lait provenant de vaches de certaines exploitations agricoles dans le canton de Saint-Gall.
Cette pollution provient de l'épandage de boues d'épuration, une pratique qui était autorisée et même encouragée à l'époque. L'agriculture ne doit pas être jugée seule responsable, selon M. Kolly. Le soutien aux exploitations agricoles demandé dans la motion n'est dès lors pas contesté.
Texte édulcoré selon la gauche
Mais au lieu de reprendre la directive de l'UE sur l'eau potable, la motion charge le gouvernement d'étudier une "réglementation autonome qui garantisse la production agricole en tenant compte des teneurs maximales pour les produits finis".
La motion demande en outre de limiter la fabrication et l'utilisation de produits qui pourraient contenir des PFAS et de les remplacer par des alternatives.
Bien que l'orientation générale de la motion soit juste, Martine Docourt (PS/NE) a critiqué le fait qu'elle s'accommode trop de critères économiques avant la protection de la santé et de l'environnement. En outre, la gauche regrette que la Suisse ne coordonne pas sa législation avec celle de l'UE sur les produits chimiques.
Soutien de la droite
Reste que la droite est désormais aussi décidée à appuyer une régulation. Plusieurs de ses motions ont passé la rampe. Susanne Vincenz-Stauffacher (PLR/ZH) propose l’instauration d’une déclaration obligatoire pour les PFAS, afin d'accroître la transparence pour les consommateurs. Son texte a été accepté par 99 voix contre 95.
Andri Silberschmidt (PLR/ZH) demande lui au Conseil fédéral d'élaborer une stratégie pour développer des produits innovants de substitution. "On ne doit pas traiter tous les PFAS de la même manière, certains sont moins dangereux que d'autres", a-t-il expliqué. Une argumentation qui a convaincu 102 élus contre 93.
Thomas Rechsteiner (Centre/AI) veut quant à lui des valeurs limites assorties de mesures d’accompagnement. "Il faut des exceptions temporaires pour certains domaines où l'on n'a pas encore de produit de remplacement".
Deux motions de la gauche jugées trop extrémistes ont été rejetées. Une autre du PVL pour des trajectoires de réduction par secteurs a échoué sur le fil. Le Conseil des Etats devra se prononcer à son tour.
Non à du "swiss finish"
La Confédération élabore déjà des rapports pour réguler les PFAS en coordination avec les cantons, a rappelé le chef du Département fédéral de l'Environnement Albert Rösti. Mais il faut aussi éviter des entraves au commerce. Il importe dans ce dossier de se coordonner avec l'UE, selon le conseiller fédéral.
Le Conseil fédéral finalise actuellement un rapport qui doit déterminer si un plan d'action au niveau national est nécessaire. Il sera prêt d'ici la fin de l'année. Mais M. Rösti a précisé ne pas vouloir de "swiss finish".
Le coût économique est omniprésent dans ce dossier. Outre le fait que l'industrie est placée devant une transition délicate, l'élimination de ces substances dans l'environnement pose un défi pour les communes, les cantons et la Confédération. Certaines études chiffrent les travaux de dépollution en Suisse à 26 milliards de francs pour les 20 prochaines années, a rappelé Marionna Schlatter (Vert-e-s/ZH).