(ats) Les infirmiers devraient pouvoir bénéficier de compétences supplémentaires et l'accès à la formation être plus attractive. Le National a adopté mardi par 124 voix contre 68 un contre-projet indirect à l'initiative sur les soins infirmiers.

Par 107 voix contre 82, la Chambre du peuple recommande en revanche de rejeter le texte déposé en 2017 par l'Association suisse des infirmiers. Intitulé "Pour des soins infirmiers forts", il demande aux cantons et à la Confédération d'investir davantage dans la formation, d'améliorer les conditions de travail et surtout de renforcer les compétences du personnel soignant.

Au cours du débat qui s'est étalé sur deux jours, la majorité, réunissant la droite et une grande partie du centre, a remis en question les moyens proposés par les initiants pour contrer la pénurie de personnel soignant. L'écart entre la demande en soins de la population et le personnel formé augmente toujours plus, a reconnu Philippe Nantermod (PLR/VS) au nom de la commission.

Selon des estimations, 65'000 soignants manqueront d'ici 2030. La Suisse forme seulement 43% du personnel infirmier dont elle aurait besoin chaque année pour couvrir la demande. Fort de ces constats, le Conseil national propose ses propres solutions pour un coût maximal de 469 millions de francs sur huit ans.

Front de gauche

Socialistes et Verts se sont succédé à la tribune pour défendre l'initiative, estimant que le contre-projet indirect ne suffit pas. La profession est dévalorisée et ne bénéficie pas des conditions qui devraient être les siennes vu le niveau de formation et de compétence des soignants et vu leurs responsabilités, a expliqué Mathias Reynard (PS/VS). Il en va de la sécurité et de la vie de la population, a ajouté Franziska Ryser (Verts/SG).

Pour l'UDC, le PLR, une majorité du centre et des Vert'libéraux, l'initiative ne choisit pas la bonne voie. Elle veut accorder un traitement particulier à un groupe professionnel en l'inscrivant dans la constitution. Ce n'est pas le bon moyen, a fait valoir Stefan Müller-Altermatt (PDC/SO) préférant s'engager pour le contre-projet indirect.

Si le contre-projet indirect est marqué par une offensive sur la formation des infirmiers, son point central concerne l'attribution de compétences supplémentaires aux infirmiers, mesure également prévue dans l'initiative populaire.

Contre l'avis du Conseil fédéral, le National a décidé que les infirmiers puissent se passer de prescription médicale pour facturer certaines prestations à l'assurance-maladie obligatoire. Les prestations qui peuvent être fournies par un infirmier sur ordonnance et celles qui peuvent l'être sans prescription devraient être définies par le gouvernement.

Pas de liberté de contracter

En revanche, suivant une proposition de Pierre-Yves Maillard (PS/VD), le Conseil national a refusé que ces prestations fassent l'objet de conventions avec les assureurs pour réglementer la manière de déterminer les besoins en soins ou la coordination entre le personnel soignant et les médecins.

Obliger les soignants à conclure des contrats avec les assureurs ouvre le débat sur la liberté de contracter. Si cette mesure est introduite, l'initiative ne sera pas retirée, a mis en garde le socialiste.

Le Conseil fédéral aurait préféré ne pas autoriser les infirmiers à facturer directement leurs prestations auprès de l'assurance de base. A chaque fois que de nouvelles compétences sont attribuées à des groupes de personnes, cela entraîne une hausse des coûts à la charge de l'assurance maladie et par là des primes, a dit le ministre de la santé Alain Berset. Une crainte reprise par l'UDC.

La facturation directe va aussi à l'encontre des efforts faits pour mieux coordonner les soins, a ajouté le conseiller fédéral. On crée également des précédents. D'autres professions pourraient elles aussi y prétendre.

Formation assurée

Le contre-projet prévoit aussi toute une série de mesures pour favoriser la formation. Les cantons devraient prescrire aux hôpitaux, aux établissements médico-sociaux (EMS) et aux organismes de soins à domicile le nombre de places de formation aux soins infirmiers.

Le Conseil national veut aussi obliger les cantons à verser des aides à la formation en soins infirmiers pour encourager l'accès à ces études. L'UDC et le PLR auraient souhaité limiter ces aides aux personnes qui ont besoin d'assistance et d'entretien, voire à les supprimer. Le Conseil fédéral préférait une formulation moins contraignante pour les cantons pour mieux tenir compte de leur autonomie.

Le dossier passe au Conseil des Etats.