(ats) Les contributions suisses à l'agence onusienne pour les réfugiés palestiniens doivent être suspendues. Le Conseil national a soutenu lundi par 99 voix contre 88 et 7 abstentions une proposition de l'UDC qui veut couper les vivres à l'UNRWA sans tarder. Le Conseil des Etats devra encore se prononcer.

Le National a ainsi voté contre les recommandations de la commission compétente et contre l'avis du Conseil fédéral, qui a déjà libéré 10 millions en faveur de l'agence onusienne pour 2024. L'UDC a reçu le soutien de plusieurs centristes et d'élus PLR.

Il faut cesser de soutenir financièrement une organisation potentiellement liée au terrorisme, a martelé David Zuberbühler (UDC/AR), auteur de la motion. Certains membres de l'organisation, actifs dans des écoles de l'UNRWA, se sont réjouis des attaques du Hamas le 7 octobre, une douzaine d'autres ont probablement pris part aux attaques, d'après lui.

Le rapport d'enquête indépendant de l'ancienne ministre française des affaires étrangères, Catherine Colonna, n'a pas permis d’infirmer ces accusations, selon l'UDC. La Suisse ne doit pas soutenir financièrement une organisation qui pourrait avoir des liens avec le terrorisme.

Organisation indispensable

Une coopération avec l'UNRWA est actuellement indispensable pour apporter une aide humanitaire urgente à Gaza, a contré Nicolas Walder (Vert-e-s/GE) pour la commission. Le rapport Colonna n'a au contraire pas permis d'étayer les accusations israéliennes contre l'UNRWA.

Au vu de l'absence d'autres solutions viables et de solution politique au conflit, l'arrêt immédiat du financement de l'UNRWA aurait des conséquences "catastrophiques" sur les deux millions de Gazaouis, a soutenu M. Walder.

En l'état actuel des choses, les tâches dont s'acquitte l’agence onusienne pourraient difficilement être assumées par une autre organisation ou autorité, a abondé le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis.

Un financement de 10 millions de francs, à la place des 20 millions initialement prévus pour 2024, a déjà été décidé par le Conseil fédéral, et avalisé par le Parlement, a-t-il encore rappelé, en vain. Ce soutien doit s'ajouter à l'enveloppe de 56 millions de francs en faveur des besoins humanitaires des pays du Proche-Orient, également avalisée par les commissions de politique extérieure.

Réaffecter l'aide

Dans la foulée, le National a soutenu par 120 voix contre 73 une motion de commission qui demande de réaffecter la contribution de la Suisse à l’UNRWA pour 2024 directement à la population palestinienne. Il s’agit de garantir qu’aucun transfert d’argent ne soit effectué en faveur de l’UNRWA.

La Chambre a aussi avalisé par 126 voix contre 73 une autre motion de commission qui charge le Conseil fédéral de s'engager auprès de la communauté internationale en faveur d'une solution pour remplacer l'UNRWA. Il s'agit d'examiner des alternatives, par exemple la possibilité d'intégrer l'aide aux Palestiniens et Palestiniennes dans l'agence des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR).

La gauche a échoué face à ces deux motions. La Suisse peut et doit soutenir une réforme de l'UNRWA, mais cela doit être fait au sein du système onusien et en temps voulu, lorsque la situation à Gaza le permettra, a plaidé sans succès Nicolas Walder.

Controverses

Le soutien à l'UNRWA fait débat sous la Coupole fédérale depuis l'an dernier, suite aux attaques du Hamas le 7 octobre. La droite du National a d'abord tenté de couper les vivres à l'agence via l'exercice du budget. Le financement a par la suite été suspendu, en attendant deux rapports devant examiner les liens présumés entre le Hamas et certains des membres de l'organisation d'aide.

Ces accusations avaient poussé d'importants donateurs à suspendre leur financement de l'agence, qui compte plus de 30'000 employés travaillant au service de 5,9 millions de Palestiniens dans la région, dont 13'000 à Gaza.

En avril, le rapport de Catherine Colonna avait conclu que l'UNRWA a des "problèmes persistants de neutralité" et fait des recommandations pour améliorer le fonctionnement de cette agence "irremplaçable" pour l'aide aux Palestiniens. Une enquête interne de l'ONU a elle conclu que neuf collaborateurs de l'UNRWA pourraient avoir été impliqués dans les attaques du Hamas.

Plusieurs donateurs ont depuis annoncé la reprise de leurs financements, comme le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Union européenne, la Suède, le Japon ou la France.