Ce Pacte, adopté par l'Assemblée générale de l'ONU en décembre 2018, est un cadre d'action global destiné à améliorer la coopération internationale dans le domaine des migrations transnationales. Le Parlement avait suspendu le traitement de ce dossier dans l'attente des résultats des travaux d'une sous-commission commune des deux Chambres concernant le droit souple (soft law).
La Suisse ne retirerait pas d'avantages concrets en le ratifiant. Il convient donc de maintenir le statu quo, a indiqué Benedikt Würth (Centre/SG) pour la commission. Et de préciser que, selon l'administration fédérale, le fait que la Suisse se soit abstenue lors du vote sur le pacte n'a pas eu de conséquences négatives sur la collaboration avec les pays de provenance et de transit.
"Eloigné de la réalité"
Bien que le pacte ne soit pas contraignant, l'accepter serait un signal politique qui aurait un certain poids, a encore noté M. Würth.
Beat Rieder (Centre/VS) a dénoncé un pacte "éloigné de la réalité", écrit "par des diplomates pour des diplomates". Le Valaisan a critiqué le fait que le document mette unilatéralement l'accent sur les effets positifs de la migration. Or les réalités politiques en Europe sont tout autres. L'Allemagne par exemple est en train de renforcer le contrôle de ses frontières.
Les sénateurs ont toutefois ajouté leur soutien pour la coopération internationale en matière de migration. Cette dernière est importante pour la Suisse et sa politique extérieure, a précisé M. Würth.
Relevant les conséquences négatives sur la souveraineté du pays, Marco Chiesa (UDC/TI) a lui plaidé pour rejeter aussi bien le pacte que ses principes directeurs, en vain. Sa proposition a été rejetée par 30 voix contre 13. Le Tessinois aurait aussi voulu que le pacte soit sujet au référendum.
Image de la Suisse
La gauche et le PVL ont au contraire défendu une acceptation du pacte. Aucun pays ne peut régler seul la question des flux migratoires. Ce pacte est une tentative de trouver une coopération au niveau mondial. Il donne des lignes directrices mais n'est pas contraignant, a plaidé Daniel Jositsch (PS/ZH). Et en tant que petit pays riche au centre de l'Europe, la Suisse a tout intérêt à collaborer avec les autres pays dans ce domaine.
Carlo Sommaruga (PS/GE) a aussi déploré que la Suisse se prive d'avoir un impact sur les discussions internationales, tout en rappelant que les organisations onusiennes spécialisées dans la migration ont leur siège à Genève. Que la Suisse l'accepte ou non, le pacte s'impose comme référence internationale. L'enjeu est donc l'image de la Suisse, a complété le Genevois.
La Suisse peut parler avec les pays de provenance sans adhérer au pacte, mais il en va aussi de sa crédibilité, a abondé le ministre des affaires étrangères Ignazio Cassis. Et d'ajouter que le pacte n'est pas un remède universel, mais peut aider notamment en développant un langage commun.
Levée de boucliers
Le Conseil fédéral avait initialement décidé de signer le pacte lors de la conférence internationale de Marrakech en décembre 2018. Il avait toutefois dû faire marche arrière face à la levée de boucliers du Parlement, qui exigeait d'être consulté avant la signature de ce texte.
Lors du vote à l'Assemblée générale de l'ONU, la Suisse s'était donc abstenue, à l'instar de onze autres pays, dont l'Autriche et l'Italie. 159 Etats avaient voté en faveur du texte et 5 contre, soit les Etats-Unis, la Pologne, la Hongrie, la Tchéquie et Israël.
Le pacte vise à définir des critères harmonisés pour la migration. Il veut renforcer l'aide fournie sur place, lutter contre la traite des êtres humains et le trafic des migrants, sécuriser les frontières, veiller au respect des droits humains, au rapatriement et à la réintégration ainsi qu'à l'intégration durable dans le pays d'accueil.
Le dossier retourne au Conseil national.