Pour la Commission des affaires juridiques du Conseil des États (CAJ-E), il est évident que les dispositions légales en vigueur en matière de lutte contre les mariages avec une personne mineure doivent encore être améliorées. C’est la raison pour laquelle elle s’est prononcée, à l’unanimité, en faveur de l’entrée en matière sur le projet du Conseil fédéral concernant les mesures de lutte contre les mariages avec un mineur (23.057).

Aux yeux de la commission, la persistance des mariages avec des personnes mineures en Suisse est choquante. Après avoir auditionné différents experts et expertes lors de sa dernière séance, elle a entamé le débat d’entrée en matière sur le projet, qui entend lutter contre les mariages avec une personne mineure en modifiant aussi bien le code civil que le droit international privé. La commission salue en particulier le relèvement de l’âge maximal jusqu’auquel une demande d’annulation en raison de la minorité peut être déposée. Grâce à cette mesure, le vice entachant un mariage avec une personne mineure n’est plus « réparé » lorsque l’épouse mineure devient majeure ou l’époux mineur devient majeur, mais lorsque cette personne atteint 25 ans. De plus, la commission est favorable à la non-reconnaissance universelle des mariages avec des enfants de moins de 16 ans et des mariages conclus durant les vacances d’été, soit les cas dans lesquels des personnes mineures domiciliées en Suisse sont mariées à l’étranger pendant les vacances. La commission entamera la discussion par article du projet au cours de l’une de ses prochaines séances.

Moderniser les fondations de​ famille suisses comme alternative au trust suisse

Par 7 voix contre 2 et 2 abstentions, la commission soutient la proposition du Conseil fédéral (23.065), qui demande le classement de la motion 18.3383 « Introduction du trust dans l’ordre juridique suisse ». Le Conseil fédéral a proposé de classer cette intervention parlementaire après que l’avant-projet concerné a été évalué de manière critique par plusieurs parties lors de la procédure de consultation, notamment en ce qui concerne les aspects fiscaux. Au cours de sa séance, la commission a mené plusieurs auditions à ce sujet. Elle est arrivée à la conclusion que la pratique proposée en matière d’imposition rendrait le trust peu attrayant et que les autres possibilités de mise en œuvre sont limitées. C’est pourquoi, au lieu de poursuivre l’idée d’un trust suisse, la commission préconise une libéralisation des fondations de famille suisses, qui sont déjà inscrites dans le droit suisse et constituent un instrument alternatif à la planification du patrimoine et de la succession. Elle propose par conséquent, par 7 voix contre 5, d’adopter la motion 22.4445 « Renforcer les fondations de famille suisses en supprimant l’interdiction des fondations d’entretien », déposée par le conseiller aux États Thierry Burkhart. Une minorité aurait préféré que la question soit d’abord clarifiée à l’aide d’un postulat et propose donc de rejeter la motion.

Pas de comité consulta​tif pour la Commission judiciaire

La commission s’est penchée à nouveau sur le projet de création d’un comité consultatif destiné à épauler la Commission judiciaire dans la procédure de sélection des juges des tribunaux fédéraux (21.452). Par 6 voix contre 6 et la voix prépondérante du président, elle a finalement décidé de renoncer à poursuivre ces travaux sur cet objet, qui est ainsi liquidé. La commission doute en effet de l’efficacité d’un tel comité et considère qu’il ne permettrait guère de répondre aux critiques formulées, notamment par le Greco. Selon elle, c’est à la Commission judiciaire qu’il appartient de prendre les mesures nécessaires pour approfondir l’examen des candidatures et améliorer encore une procédure qui, dans l’ensemble, a fait ses preuves.

Autres obj​ets :

  • Par 8 voix contre 0 et 3 abstentions, la commission propose à son conseil de rejeter la motion Reimann 21.3388 « Accès à la justice pour tout le monde ! ».
  • Concernant la mise en œuvre de l’initiative parlementaire Caroni 22.448 « Un pacs pour la Suisse », la commission aimerait instituer une sous-commission ; elle décidera de sa composition au début de la nouvelle législature.
  • La commission a déjà pris connaissance du rapport du Conseil fédéral donnant suite au postulat 18.4092 « Conséquences des ‘actions de loyauté’ » à sa séance du 27 juin 2023. Après un complément d’information de l’administration, elle a décidé de ne pas entreprendre de travaux supplémentaires sur ce thème pour le moment.
  • Par 5 voix contre 3 et 2 abstentions, la commission propose de rejeter une motion de la conseillère nationale Christa Markwalder, qui vise à modifier les règles applicables aux comparaisons en cas de réduction de prix dans le commerce (21.4161).

La commission a siégé à Berne le 7 novembre 2023, sous la présidence du conseiller aux Etats Carlo Sommaruga (PS, GE).