1. Iv.pa. Maitre. Réglementation du prix du livre. (04.430)
Le projet élaboré par la Commission de l’économie et des redevances du Conseil national et approuvé par le Conseil national lors de la session d’été prévoit l’introduction d’une réglementation du prix du livre. Selon le projet, les éditeurs et les importateurs fixent le prix des livres mis sur le marché. Les libraires sont tenus respecter même s’ils peuvent procéder à une remise de 5% ainsi qu’à notamment des rabais de quantité. La durée minimale du prix réglementé est de 18 mois. Afin d’éviter des écarts de prix abusifs par rapport aux prix sur les marchés étrangers, le prix de vente des livres importés devra se situer dans une fourchette allant de 100% à 120% du prix de vente dans le pays de publication (TVA non comprise). Le projet de loi ne concerne que les livres écrits dans une langue nationale suisse et ne s’applique pas aux livres achetés à l’étranger en vertu d’un contrat conclu par voie électronique.
Lors de sa séance du 16 octobre 2009, la commission de l’économie et des redevances du Conseil des Etats avait proposé par 8 voix contre 5 à son conseil de ne pas entrer en matière sur le projet. Selon la majorité de la commission, la réglementation du prix du livre ne permettait pas d’atteindre les buts culturels poursuivis par le projet Lors de la session d’hiver 2009, le Conseil des Etats n’a pas suivi la proposition de la majorité de la commission et a décidé, par 23 voix contre 15, d’entrer en matière sur le projet. Le dossier est par conséquent retourné à la commission laquelle devait procéder, lors de l’actuelle séance, à l’examen de détail du projet de loi.
Les discussions au sein de la commission ont avant tout porté, d’une part, sur le champ d’application de loi, d’autre part, sur la question de la différence des prix admises par rapport au prix des livres sur les marchés étrangers.
Sur le premier sujet, la commission a discuté principalement de la question de savoir si les livres expédiés au consommateur depuis un fournisseur sis à l’étranger devaient être soumis au projet de loi. Selon la version du Conseil national, les achats faits par Internet doivent être exclus du champ d’application de la loi. Confirmant cette décision de la grande chambre, la commission a rejeté par 7 voix contre 3 une proposition de soumettre au régime de prix unique ces achats. La majorité a en effet estimé qu’intégrer le commerce électronique transfrontalier au champ d’application de la loi poserait problème du point de vue des engagements suisses pris dans le cadre de l’accord de libre-échange avec l’UE. De plus, estimant qu’il n’y avait pas de raison de distinguer entre vente par correspondance traditionnelle et moyens de commande par internet, la commission propose, par 7 voix contre 3, d’étendre cette exclusion aux achats faits par correspondance traditionnelle.
Sur la question de la différence de prix admissible avec les prix pratiqués sur les marchés des voisins, la commission propose, par 8 voix contre 2, de rejeter le modèle de la fourchette décidé par le Conseil national au profit d’une version qui prévoit que le Surveillant des prix observe le marché du livre. Celui-ci serait de plus habilité à recommander, si nécessaire, au Conseil fédéral de fixer par voie d’ordonnance les différences de prix maximales autorisées par rapport à ceux pratiqués à l’étranger, ce en faisant fi des régions linguistiques. La majorité a estimé que le modèle de la fourchette constituait un chèque blanc pour des différences de prix beaucoup trop élevées. La Surveillance par M. Prix et le cas échéant l’intervention du Conseil fédéral devrait permettre d’avoir des prix tenant compte dans une juste mesure, i.e. sans abus, des coûts suisses.
Lors du vote sur l’ensemble, la commission a approuvé le projet par 6 voix contre 2 et 1 abstention. Le projet sera traité au Conseil des Etats lors de la session de printemps 2010.
2. Cinq initiatives cantonales concernant l’importation de denrées alimentaires produites dans des conditions sociales et écologiques inacceptables (08.301, 08.307, 08.320, 08.326, 09.311)
Les cantons du Jura, de Neuchâtel, de Genève, de Fribourg et de Vaud ont déposé cinq initiatives, dans lesquelles ils font part de leur inquiétude au sujet de l’importation de denrées alimentaires produites dans des conditions sociales et écologiques intolérables et demandent à la Confédération de prendre les mesures suivantes : s'engager dans les négociations avec l'OMC et l'UE, instaurer l’obligation de présenter une déclaration concernant les conditions sociales et la durabilité de la production des denrées importées en Suisse et interdire l’importation de denrées produites dans des conditions qui ne satisfont pas aux standards en la matière. Sensible aux préoccupations exprimées par les cantons, la commission a chargé l’administration de lui soumettre un rapport rendant notamment compte des efforts déjà entrepris dans ce domaine. Sur la base dudit rapport, la commission décidera de la suite à donner à ces initiatives au trimestre prochain.
3. Souveraineté alimentaire (09.324, 08.457, 08.3194, 08.3260)
Dans le cadre de l’examen de différents objets ayant trait à la souveraineté alimentaire, la commission a débattu de plusieurs questions telles que l’auto-approvisionnement, la sécurité de l’approvisionnement et, précisément, la souveraineté alimentaire. Dans ce domaine, la majorité de la commission partage l’avis du Conseil fédéral en ce sens que la notion de souveraineté alimentaire est trop imprécise pour servir de base légale et qu’il est surtout question ici de l’inquiétude des milieux agricoles face à une trop grande libéralisation du marché, inquiétude qui ne saurait être gommée par l’introduction de dispositions légales relatives à la souveraineté alimentaire. C’est pourquoi la commission propose de ne donner suite ni à l’initiative parlementaire 08.457 n (par 7 voix contre 2 et 1 abstention), déposée par le conseiller national François Bourgeois, ni à l’initiative 09.324 é (par 6 voix contre 1 et 3 abstentions), déposée par le canton de Berne, qui visent toutes deux à inscrire dans la loi la souveraineté alimentaire et qui réclament une production intérieure de qualité et conforme aux exigences du développement durable. Pour sa part, une petite minorité estime toutefois que, au vu notamment de la menace de pénurie mondiale en matière d’approvisionnement et de la réduction de la surface agricole utile en Suisse, la souveraineté alimentaire constitue une approche pertinente, raison pour laquelle elle propose de donner suite à l’initiative du canton de Berne.
Examinant une motion déposée par le conseiller national Erich von Siebenthal (08.3194n), qui charge le Conseil fédéral de proposer des mesures permettant d’atteindre, dans le cadre de la politique agricole 2015, un taux d’auto-approvisionnement de 60%, la commission a discuter si modifier le texte de l’intervention. Une proposition discutée demandait que l’accent soit mis sur l’auto-approvisionnement en général et non sur un taux d’approvisionnement, qui ne signifie finalement pas grand chose. Une tout autre proposition visait à accorder une importance primordiale à la sécurité de l’approvisionnement du fait de la forte implication de la Suisse sur le marché mondial et ainsi de garantir l’approvisionnement du pays indépendamment de la production intérieure. Finalement, la commission a décidé, par 6 voix contre 3, de suivre la proposition du Conseil fédéral de rejeter la motion, même dans une version modifiée.
Par ailleurs, la CER-E a recommandé, par 6 voix contre 2 et 1 abstention, le rejet de la motion 08.3260n, déposée par le conseiller national Josef Lang. Contrairement aux initiatives mentionnées plus haut, cette motion demande que la souveraineté alimentaire soit soutenue et garantie dans un contexte international. Une minorité propose, quant à elle, de transmettre la motion au Conseil fédéral.
4. Traitement de différents objets relevant du domaine agricole (09.3612, 08.3443, 09.3309, 09.3318, 08.3429)
La commission s’est penchée sur différentes interventions transmises par le Conseil national après sa session spéciale de décembre 2009 consacrée à la politique agricole. Estimant, tout comme la Chambre basse, que l’agriculture suisse ne pourra conserver et étendre ses parts de marché sur le territoire national et à l’étranger qu’en proposant des produits de grande qualité, elle a approuvé la motion 09.3612 (Bourgeois) « Stratégie qualité au sein de l'agriculture suisse », par 6 voix contre 0 et 3 abstentions, après avoir renoncé aux exigences concernant le projet « Swissness », afin de ne pas influer sur le cours de l’examen de ce projet au Conseil national.
Dans la même optique, elle a également adopté les motions 08.3443 (Germanier) « Promouvoir la consommation de produits agricoles de proximité » et 09.3309 (Graf Maya) « Créer une plus-value en encourageant l'agriculture biologique », respectivement par 8 voix contre 0 et par 5 voix contre 3. Bien qu’en accord, sur le fond, avec ces deux motions, elle a décidé d’en adoucir les exigences en renonçant à fixer un montant concernant les moyens à allouer à un plan d’action en faveur de l’agriculture biologique (09.3309), d’une part, et en transformant la motion 08.3443 en mandat d’examen, d’autre part.
La CER-E a également décidé, par 5 voix contre 3, de transformer la motion 09.3318 (Graf Maya) « Protéger les abeilles en interdisant l'usage du neurotoxique clothianidine comme insecticide » en mandat d’examen. Bien qu’informée du fait que les prescriptions concernant l’utilisation de l’insecticide en question ont été adaptées, la commission demande de plus amples éclaircissements, afin de s’assurer que ces adaptations sont à même de prévenir tous les risques que l’utilisation de cette substance peut faire peser sur les populations d’abeilles.
Quant à l’utilisation du phosphore des os comme engrais, dont la motion 08.3429 déposée par Elmar Bigger demande qu’elle soit autorisée, la CER-E considère que les prescriptions en vigueur, qui correspondent à celles appliquées dans l’Union européenne, sont adéquates. Elle a par conséquent rejeté tout assouplissement de ces prescriptions, par 8 voix contre 0.
5. Introduction de la perception à la source de l'impôt direct des personnes physiques (08.325)
Le canton de Neuchâtel a déposé une initiative visant à ce que la législation soit modifiée afin d’introduire la possibilité de la perception à la source de l'impôt direct des personnes physiques. Après avoir procédé à l’examen de cette initiative, la commission a considéré, par 4 voix contre 4, 2 abstentions et la voix prépondérante de la présidente, qu’il serait judicieux de connaître la position de tous les cantons sur ce sujet, avant de prendre une décision. Elle a par conséquent chargé l’administration de mener un sondage auprès des cantons afin de connaître leur avis sur la nécessité et la faisabilité d’une telle mesure et de lui présenter ensuite les résultats de ce sondage.
6. 09.072 Accord de libre-échange entre les États de l'AELE et les États du Conseil de coopération des États arabes du Golfe. Approbation
La CER-E se rallie à la décision prise par le Conseil national le 3 décembre 2009 et adopte, par 8 voix contre 0 et 2 abstentions, l’arrêté fédéral portant approbation de l'Accord de libre-échange entre les États de l'AELE et les États membres du Conseil de coopération des États arabes du Golfe.
La commission se félicite de la conclusion de cet accord important du point de vue économique, car l’élargissement de l’accès aux marchés d’une région financièrement très forte pourrait être générateur de croissance. Quelques voix se sont toutefois élevées pour regretter que cet accord ne tienne pas suffisamment compte des normes sociales et du respect des droits de l'homme.
La commission a siégé le 25 et le 26 janvier 2010 à Berne, sous la présidence de la Conseillère aux Etats Helen Leumann (PLR. Les Libéraux-Radicaux, LU) et en partie en présence de la Présidente de la Confédération Doris Leuthard.
Berne, le 26 janvier 2010 Services du Parlement