Dans le cadre de la procédure d’élimination des divergences concernant le projet de loi sur les jeux d’argent (15.069), la Commission des affaires juridiques du Conseil national propose à son conseil, par 10 voix contre 8, de maintenir sa décision du 15 mars dernier prévoyant que, à l’avenir, les gains issus de jeux de grande envergure ne seront plus imposés. Contrairement au Conseil des Etats, qui souhaite exonérer d’impôt uniquement les montants inférieurs ou égaux à un million de francs, le Conseil national partage l’avis du Conseil fédéral selon lequel, en fin de compte, l’exonération générera des recettes supplémentaires pour la collectivité étant donné que la Suisse sera plus attrayante pour les joueurs et que les flux d’argent vers l’étranger seront moindres. Une minorité de la commission peut envisager un pas en direction du Conseil des Etats; elle accepte le type d’exonération proposé par la Chambre haute et souhaite même qu’il soit étendu aux gains réalisés grâce aux jeux en ligne.

​La commission a élaboré des propositions de compromis sur certains points encore en suspens. Par 16 voix contre 6, elle a ainsi décidé de se rallier au point de vue du Conseil des Etats sur la question du champ d’application de la loi, acceptant de formuler de manière différenciée les exceptions applicables au commerce de détail et aux entreprises médiatiques. Une minorité de la commission souhaite au contraire maintenir la version du Conseil fédéral, soutenue par le Conseil national, et faire dépendre l’exception du seul critère de la participation gratuite au jeu concerné. La commission propose également un autre compromis, à savoir que les maisons de jeu doivent pouvoir proposer des jeux de grande envergure à certaines conditions. Toutefois, sur la plupart des points encore en suspens, la commission propose à son conseil de maintenir son point de vue. La Chambre basse examinera cet objet à la session d’automne. Il est prévu que les divergences subsistant entre les conseils seront éliminées pendant cette même session.

Auditions concernant la révision du droit de la société anonyme

La commission a entamé l’examen du projet de révision du droit de la société anonyme proposé par le Conseil fédéral (16.077) et entendu un grand nombre de représentants des milieux concernés. Ces auditions ont permis d’aborder plusieurs questions: les répercussions potentielles du projet sur l’économie, les seuils prévus pour la représentation des sexes, les dispositions relatives à la transparence dans le secteur des matières premières, mais aussi la suppression partielle de l’obligation de la forme authentique et le transfert dans les lois fédérales concernées des dispositions de l’ordonnance de mise en œuvre de l’initiative contre les rémunérations abusives (ORAb). La commission devrait se prononcer sur l’entrée en matière à sa prochaine séance.

Droit de la protection de l’enfant et de l’adulte

La commission s’est attelée à la discussion par article du projet 15.033 relatif à la protection de l’enfant. Elle poursuivra ses travaux lors de l’une de ses prochaines séances.

La commission s’est également penchée sur deux initiatives parlementaires visant à modifier l’art. 420 du code civil (CC). Par 18 voix contre 0 et 4 abstentions, elle a donné suite à l’initiative 16.428 «Article 420 du Code civil. Changer de paradigme», déposée par le conseiller national Karl Vogler. Celle-ci vise à modifier l’art. 420 CC de telle sorte que les proches auxquels est confiée une curatelle et qui se sont, pour certains, occupés d’un enfant handicapé pendant plusieurs dizaines d’années avant l’entrée en vigueur du nouveau droit ne soient soumis qu’exceptionnellement à l’obligation d’établir des rapports et des comptes périodiques.

A l’unanimité, la commission a également donné suite à l’initiative 16.429 «Adapter l’article 420 du Code civil», elle aussi déposée par Karl Vogler. La commission souhaite ainsi que la liste actuelle des proches dressée à l’art. 420 CC, qui est exhaustive, soit transformée en une liste non exhaustive. Du reste, il s’agit là d’une mesure que le Conseil fédéral avait envisagée dans son rapport sur les premières expériences faites avec le nouveau droit de la protection de l’enfant et de l’adulte.

Contestation du loyer initial

Par 18 voix contre 6, la commission a donné suite à l’initiative parlementaire 16.451 «Bonne foi dans le droit du bail. Contestation du loyer initial limitée aux cas dans lesquels le locataire a conclu le bail par nécessité», déposée par le conseiller national Hans Egloff. La commission constate que, de par son arrêt ATF 142 II 442, le Tribunal fédéral (TF) a quasiment supprimé les obstacles que le droit oppose à la contestation d’un loyer initial excessif, ce qu’elle juge problématique. Dans l’arrêt en question, le TF a estimé que, s’agissant du deuxième motif de contestation de l’alternative citée à l’art. 270, al. 1, let. a, du code des obligations (situation sur le marché local du logement et des locaux commerciaux), il suffisait que le locataire apporte la preuve de la pénurie de logements sur le marché local, sans devoir en plus démontrer une situation personnelle qui l’aurait contraint à conclure le bail. Aux yeux de la commission, cette décision remet en question le principe de la bonne foi inscrit dans le droit suisse du contrat. Elle souhaite donc, au moyen de l’initiative parlementaire 16.451, faire figurer dans la loi que, pour pouvoir contester le loyer initial, le locataire doit démontrer qu’il a été contraint de conclure le bail par nécessité. Une partie de la commission souligne que, dans les faits, les loyers initiaux sont rarement contestés alors que les loyers ne cessent d’augmenter en dépit de la baisse du taux de référence ; selon elle, la mise en œuvre de l’initiative réduirait considérablement les possibilités dont dispose la classe moyenne pour se défendre contre cette évolution.

Les associations pourront continuer d’avoir une activité économique

Par 17 voix contre 6, la commission propose à son conseil de ne pas donner suite à l’initiative parlementaire 16.454 «Associations ayant un chiffre d’affaires élevé et poursuivant un but économique. Réforme du droit applicable», déposée par la conseillère national Regula Rytz. La commission considère en effet que le droit de l’association en vigueur comporte déjà tous les instruments nécessaires pour garantir la prise en considération des intérêts des créanciers; elle cite par exemple l’obligation de tenir une comptabilité ou la révision ordinaire par un organe de révision. En outre, elle estime que certains problèmes rencontrés par de grandes associations sportives ne sont pas fondamentalement dus à leur forme juridique. Une minorité de la commission propose au contraire de donner suite à l’initiative.

La commission a siégé à Berne les 22 et 23 juin 2017, sous la présidence du conseiller national Jean Christophe Schwaab (PS, VD).