La question – controversée s’il en est – de la compétence de dénoncer ou modifier les traités internationaux est appelée à être tranchée au niveau de la loi. Le Conseil fédéral considère avoir lui seul cette compétence. La Commission des institutions politiques du Conseil des Etats propose, pour sa part, que la dénonciation et la modification de traités importants soient soumises au même régime que la conclusion de pareils traités et doivent être approuvées par le Parlement ou, en cas de référendum, par le peuple.

​Par 11 voix contre 0 et 1 abstention, la Commission des institutions politiques du Conseil des Etats a approuvé à l’intention de son conseil un projet de loi qui règle clairement la répartition des compétences en matière de conclusion, de modification et de dénonciation de traités internationaux (16.456).

Jusqu’à présent, la question de savoir à qui revenait la compétence de dénoncer les traités internationaux importait peu en pratique étant donné qu’aucun traité important n’avait encore jamais été dénoncé. Toutefois, des initiatives populaires récentes ont soulevé la question de la dénonciation de traités importants. Indépendamment des questions pouvant se poser dans le cadre de la mise en œuvre éventuelle de ces initiatives, il serait judicieux de se pencher sur le thème de la compétence en la matière, qui pourrait se révéler d’une grande importance, et de répondre clairement aux questions en suspens. Il est en effet essentiel, pour garantir la légitimité des décisions politiques, de définir les règles avant que le «match» n’ait commencé.

Alors que le Conseil fédéral a estimé, dans son avis relatif à l’interpellation Schneider-Schneiter 14.4249 «Protection des droits politiques», être seul compétent en matière de dénonciation des traités internationaux en vertu de la Constitution (Cst.), la commission ne peut se rallier à cette interprétation. C’est pourquoi il est nécessaire que la loi réponde à cette question controversée et que ce point soit ainsi réglé dans le droit positif.

La commission est convaincue que le droit constitutionnel en vigueur règle déjà clairement cette question: les compétences en matière de conclusion de traités internationaux doivent également s’appliquer à la dénonciation et à la modification de ces mêmes traités. Les compétences de l’Assemblée fédérale d’approuver la conclusion de traités importants et les droits référendaires y afférents doivent s’appliquer par analogie aux dénonciations et modifications importantes de traités. Il existe un parallélisme entre les compétences pour légiférer au niveau national et au niveau international.

C’est le contenu des dispositions d’un traité qui doit être déterminant pour savoir si la dénonciation ou la modification de ce traité doit être approuvée par l’Assemblée fédérale et si la décision d’approbation doit être soumise à référendum. Si une modification contient des dispositions importantes fixant des règles de droit, qui définissent par exemple les droits et les obligations de certaines personnes, elle nécessite la même légitimité démocratique que l’abrogation ou la modification d’une loi nationale. Cela vaut également pour la dénonciation de traités ayant des effets importants sur la situation juridique en Suisse ou la population du pays.

Le projet précise également que le Conseil fédéral doit dénoncer seul – autrement dit, sans l’approbation préalable de l’Assemblée fédérale – des traités internationaux lorsqu’une disposition constitutionnelle prescrit expressément leur dénonciation. Ce principe s’applique uniquement aux dispositions constitutionnelles directement applicables qui ne laissent aucune marge de manœuvre quant à la détermination de la nécessité d’une dénonciation. Ce cas de figure surviendrait par exemple en cas d’acceptation de l’initiative dite «de limitation», qui exige du Conseil fédéral qu’il dénonce l’accord sur la libre circulation des personnes avec l’UE. Par contre, dans le cas de l’initiative «pour l’autodétermination», qui exige que les traités internationaux concernés soient dénoncés «au besoin» lorsqu’il y a conflit entre les obligations de droit international et les dispositions constitutionnelles, ce n’est pas au Conseil fédéral de déterminer si une dénonciation est nécessaire, mais à l’Assemblée fédérale et, en cas de référendum, au peuple. Une minorité de la commissionsouhaite renoncer à cette disposition. D’une part, elle considère qu’il va de soi qu’une disposition constitutionnelle directement applicable a la priorité et qu’une clarification à ce sujet est dès lors inutile; d’autre part, elle estime que la disposition risquerait d’être interprétée – à tort – comme un mandat impératif au Conseil fédéral de dénoncer lui-même des dispositions même quand il existe une marge de manœuvre qui doit être évaluée par le Parlement et, le cas échéant, par le peuple.

Le Conseil fédéral a maintenant la possibilité de se prononcer sur le projet. Ce dernier devrait être examiné par le Conseil des Etats à la session d’automne.

Le rapport et le projet d’acte de la commission ainsi que le rapport contenant les résultats de la consultation sont disponibles à l’adresse suivante:
https://www.parlament.ch/fr/organe/commissions/commissions-thematiques/commissions-cip/rapports-consultations-cip/vernehmlassung-spk-16-456