La CER-N a suivi majoritairement le projet du Conseil fédéral relatif à la loi sur le contrat d’assurance (17.043) Elle rejette, même si parfois avec des majorités étroites, la plupart des propositions visant à renforcer la position des assurés.

La commission repris la discussion par article aux dispositions du projet qu’elle avait suspendues lors de sa séance du mois d’avril (voir communiqué du 23-24 avril 2018). En ce qui concerne la possibilité contractuelle pour les assureurs d’adapter unilatéralement les conditions d’assurances et les primes (art. 35), la commission a suivi, avec des votes certes très serrés, la proposition du Conseil fédéral. Elle a notamment rejeté, par 11 voix contre 11, 2 abstentions et la voix prépondérante du président, une proposition qui voulait rendre nulle, sauf dans le domaine des risques professionnels et commerciaux, toute clause contractuelle permettant d’adapter unilatéralement les conditions d’assurance. La majorité ne veut en effet pas restreindre inutilement la liberté contractuelle. Elle renvoie également à l’obligation d’informer l’assuré avant la conclusion du contrat prévue à l’art. 3 al. 1 let .j. La minorité est pour sa part de l’avis que les conditions d’assurance ne doivent pas pouvoir être unilatéralement changées, faute de quoi les assurés ne peuvent pas avoir de protection suffisante.

La commission a par ailleurs également rejeté, par 12 voix contre 12 et voix prépondérante du président, une proposition, qui vise à introduire dans la loi une prolongation de couverture de 5 ans en matière d’assurance maladie complémentaire lorsque le dommage relatif au risque assuré n’apparaît qu’après la fin du contrat. Selon la majorité, l’obligation d’informer l’assuré (art. 3 al. 1 let. k) est suffisante et conforme à la liberté contractuelle. En matière de validité dans le temps de la couverture d’assurance, la commission a aussi rejeté, par 12 voix contre 9 et une abstention, une proposition qui visait à introduire dans la loi la nullité de clause contractuelle qui donne à une entreprise d’assurance le droit de supprimer ou limiter unilatéralement ses obligations de prestation lorsque le contrat prend fin après la survenance du sinistre. La majorité de la commission a suivi l’argumentation du Conseil fédéral selon laquelle cette limitation des obligations de prestation n’est pas problématique puisque l’assuré en a été informé avant la conclusion du contrat d’assurance (art. 3 al.1 1 let. l). Selon la minorité au contraire, de telles dispositions contractuelles se feront au détriment notamment des assurés âgés, qui seront contraints d’accepter que l’entreprise d’assurance dispose d’un droit correspondant de réduire ou de supprimer certaines prestations.

La commission est par ailleurs revenue sur la décision du 23 avril dernier en ce qui concerne l’art. 2a al.1. A l’instar du Conseil fédéral, elle propose par 12 voix contre 10 de ne prévoir un droit de révocation que dans le cadre de la conclusion du contrat, et non plus également en cas de modification importante du contrat. La commission a aussi procédé à quelques modifications du projet du Conseil fédéral. Elle propose ainsi, à l’unanimité, de ne pas abroger l’art. 34 en ce qui concerne la responsabilité de l’assureur pour ses agents. Une modification à l’art. 28 al. 2 a en outre été adoptée par 22 voix contre 0 et 1 abstention: selon cette proposition, le moment déterminant pour apprécier l’aggravation d’un risque sera le celui de la réponse aux questions et non plus celui de la conclusion du contrat. La commission propose enfin dans plusieurs articles que la résiliation du contrat d’assurance puisse avoir lieu par voie électronique.

Lors du vote sur l’ensemble, la commission a approuvé le projet par 14 voix contre 6 et 5 abstentions. Il n’est pas encore connu si le projet viendra à la session d’hiver 2018 ou, si faute de temps à disposition, le Conseil national ne pourra traiter cet objet qu’à la session de printemps 2019.

2. Pas de renforcement de l’encouragement de la construction de logements

La commission avait déjà entamé l’examen de l’initiative 18.035, intitulée «Davantage de logements abordables» et du crédit-cadre destiné à alimenter le fonds de roulement lors de sa séance des 13 et 14 août 2018; elle avait alors demandé à l’administration de lui fournir des éclaircissements supplémentaires. Les informations ainsi obtenues montrent quels instruments la Confédération, les cantons et les communes utilisent pour promouvoir la construction de logements. En fin de compte, la commission a décidé, respectivement par 13 voix contre 11, sans abstention, et par 18 voix contre 6 et 1 abstention, de ne pas entrer en matière sur le crédit-cadre et de proposer à son conseil de recommander le rejet de l’initiative.

La majorité de la commission est d’avis que, la situation sur le marché du logement s’étant apaisée et de nombreux logements restant vides, il n’est pas nécessaire d’allouer des moyens supplémentaires au fonds de roulement et encore moins de mettre en place de nouveaux instruments tels que le droit de préemption pour les cantons et les communes. Elle rappelle en outre que les cantons et les communes ont créé des programmes de promotion de construction de logements adaptés à leur propre situation. Une forte minorité considère toutefois que la pénurie de logements abordables est toujours d’actualité dans les zones urbaines et que l’encouragement de la construction de logements d’utilité publique pourrait y remédier. Elle estime qu’alimenter le fonds de roulement représente le strict minimum pour maintenir au niveau actuel le soutien financier apporté aux coopératives et pour remplir le mandat constitutionnel. Une autre minorité souhaite recommander l’adoption de l’initiative afin de soutenir clairement la politique de la Confédération en matière de construction de logements. Le Conseil national se penchera sur cet objet à la session d’hiver 2018.

3. TVA

La commission a donné suite, par 13 voix contre 11, à l’initiative parlementaire 17.479 «Imposer la TVA à partir d’un chiffre d’affaires de 150 000 francs», déposée par le conseiller national Erich Hess. La majorité de la commission estime qu’il faut alléger la charge administrative des petites entreprises en ne les assujettissant à la TVA que si elles réalisent un chiffre d’affaires de 150000 francs au moins. Le niveau auquel le seuil d’imposition devra effectivement être relevé ne serait déterminé qu’au cours de la phase de mise en œuvre de l’initiative, soit après que la commission aura obtenu l’aval de son homologue du Conseil des Etats. Par 11 voix contre 9 et 2 abstentions, la commission a en outre approuvé une version légèrement modifiée de la motion 18.3235 «Simplifier la TVA pour les ‘Packages’» déposée par le conseiller aux Etats Stefan Engler. La modification introduite précise que les «packages» ne doivent plus être constitués que de prestations dont le lieu se situe sur le territoire suisse.

4. Seuil d’identification des opérations de caisse

Enfin, la commission a décidé, par 16 voix contre 5 et 1 abstention, de déposer une motion (18.4094) chargeant le Conseil fédéral de créer les conditions juridiques nécessaires pour que le seuil d’identification des opérations de caisse soit maintenu à son niveau actuel de 25000 francs, et ne soit pas abaissé à 15000 francs, comme le prévoit la FINMA pour le mettre en conformité avec les normes instituées par le Groupe d’action financière (GAFI). La majorité de la commission considère en effet qu’un abaissement du seuil d’identification entraînerait, pour les clients des banques, une charge administrative supplémentaire considérable, que l’alignement sur des règles internationales ne justifie pas.

5. Autres décisions

La commission propose, par 16 voix contre 8, de ne pas donner suite à l’initiative du canton de Fribourg, qui visait à instaurer une amnistie fiscale générale (16.311). Elle propose également, par 14 voix contre 3 et 4 abstentions, de ne pas donner suite à une initiative du canton de Zoug, qui vise à inscrire dans la loi la valeur des coupures de billets de banque (16.314). Selon la commission, rien ne laisse penser que la BNS ait l’intention de modifier la valeur actuelle des coupures, et la nouvelle série de billets, qui est en train d’être mise en circulation, prouve justement le contraire, raison pour laquelle il n’y a pas lieu de légiférer plus avant.

La commission a siégé du 22 et 23 octobre 2018 à Berne sous la présidence du conseiller national Jean-François Rime (UDC, FR) et, pour partie, en présence du conseiller fédéral Ueli Maurer.